Œuvres citées (en italiques, autres que des films de cinéma) : Une séparation – Jodaeiye Nader az Simin – À propos d’Elly –Shrek – Naomi – Hitparzut X – La femme infidèle – Radioscopie d’un adultère – Pater – Les Sanguinaires – Le centre du monde – Ressources humaines – Falstaff – Chimes at midnight – Campanadas a medianoche – A.I. – Peter Pan – Hook –Pinocchio – Le Chat botté – La petite sirène – Alice au pays des merveilles – Le sceptre d’Ottokar – Le secret de la Licorne – Le trésor de Rackham le Rouge – Le crabe aux pinces d’or – Billy Elliott – Shaun of the dead – Paul – Hanna – Orgueil et préjugés – Reviens-moi – Le soliste – Nikita – Switch (2011) – The switch – Switch (1991) – Dans la peau d’une blonde – Deep end – Les contes de la nuit – Azur et Asmar – Princes et princesses – Dragons et princesses – Le loup-garou – Garçon tam-tam – Ti Jean et la belle-sans-connaître – Submarine – J’aime regarder les filles – Nos 18 ans – Les émotifs anonymes – Un amour de jeunesse – Ping-pong – Absent – Ausente – Plan B – Lourdes – Le miraculé
Personnes citées : Asghar Farhadi – Claude Sautet – Claude Lelouch – Serguei Rachmaninoff – Eitan Zur – Claude Chabrol – Anne Fontaine – Benoît Poolvoerde – Jean Yanne – Alain Cavalier – Vincent Lindon – Steven Spielberg – Tim Burton – Roberto Benigni – Hergé – François Truffaut – Jean-Jacques Beineix – Roman Polanski – Jack Nicholson – Gad Elmaleh – Andy Serkis – Jamie Bell – Simon Pegg – Nick Frost – Daniel Craig – Kim Stengel – Joe Wright – Luc Besson – Saoirse Ronan – Frédéric Schoendorffer – Blake Edwards – Jean-Christophe Grangé – Éric Cantona – Jerzy Skolimovski – Diana Dors – John Moulder Brown – Michel Ocelot – Richard Ayoade – Frédéric Louf – Pierre Niney – Michel Vuillermoz – Thomas Chabrol – Claude Chabrol – Mia Hansen-Løve – Sebastian Urzendowsky – Alfred Hitchcock – Jessica Hausner – Jean-Pierre Mocky
Réalisé par Asghar Farhadi
Titre original : Jodaeiye Nader az Simin
Sorti en Allemagne (Festival de Berlin) le 15 février 2011
Sorti en Iran le 16 mars 2011
Sorti en France le 8 juin 2011
Seul le hasard, qui organise bien les choses comme on sait, a fait que ce film iranien, sorti depuis trois semaines, je ne suis allé le voir que ce matin, moins de deux heures après avoir appris par la radio que Dominique Strauss-Kahn serait peut-être tiré d’affaire, vu que son accusatrice n’est pas sans tache. En effet, ce film raconte qu’une femme du peuple, employée par un homme aisé, l’accuse d’un acte violent lui ayant causé un grave préjudice, et que l’homme, rapidement inculpé puis incarcéré, sort de prison grâce à la caution que verse sa femme, et se trouve libéré lorsque son accusatrice est convaincue d’avoir menti et fait cela pour de l’argent !
Blague à part, la critique est ICI.
Réalisé par Eitan Zur
Titre original : Hitparzut X
Sorti en Israël le 16 décembre 2010
Sorti en France le 29 juin 2011
Je suis vert.
Non, pas écolo, soyons sérieux. Vert de rage, parce que je viens de débusquer un plagiat honteux, et que personne, critiques ou spectateurs, ne s’en aperçoit. Évidemment, quand il s’agit du « Canard enchaîné », je ne suis pas surpris, ces gens ne connaissent rien au cinéma (et voient de la politique partout, ce qui, en l’occurrence, est ridicule). Mais les autres journaux ? Et c’est encore ce pauvre Claude Chabrol qui trinque, puisque Naomi recopie à 90 % le scénario de La femme infidèle, qui n’est pourtant pas un obscur navet resté ignoré, mais l’un des trois chefs-d’œuvre de cet excellent cinéaste. Tout y est : un mari découvre que sa femme, plus jeune que lui, a pris un amant ; il va discuter avec l’amant, et la conversation reste de bon ton, jusqu’à ce que le pauvre homme n’y tienne plus et tue son rival. Puis il emballe le corps dans un tapis, le charge dans sa voiture et s’en débarrasse. Après cela, lui et sa femme ne disent pas un mot à propos du disparu. La seule modification par rapport à l’original réside dans la scène de fin : la mère du meurtrier, qui est au courant, meurt en laissant une lettre où elle s’accuse, et le crime restera donc impuni. Scène grotesque, soit dit en passant, puisque la lettre a été envoyée à un ami policier de l’assassin, qui débarque chez lui et lui déclare tout de go : « Tiens, à propos, ta mère est morte et elle m’a laissé une lettre. Je vais te la lire »... tandis que le fils ne réagit absolument pas ! Conception du scénario, écriture du dialogue et direction d’acteurs déficientes, par conséquent.
Je disais plus haut que feu Chabrol écopait une fois de plus, mais je suppose que, la fois précédente, il l’a su et s’est marré en douce. Il s’agissait de son meilleur film, Le boucher, dont Anne Fontaine lui avait piqué, non pas 90 % du scénario, mais la totalité ; jusqu’à l’idée de faire interpréter l’assassin par un acteur comique, Benoît Poolvoerde succédant à Jean Yanne. Oui, mais Anne Fontaine « a la carte », comme on dit, et nul n’avait dénoncé le forfait.
Bien entendu, le générique de fin de celui d’aujourd’hui se garde bien de rendre hommage à Claude Chabrol : il affirme que le film est l’adaptation d’un roman israélien de la scénariste – je m’abstiens d’écrire son nom –, Radioscopie d’un adultère, or l’on voit bien qu’entre une femme adultère et une femme infidèle, il n’y a rien de commun. Elle est bien honnête, cette scénariste !
Le film a été présenté dans douze festivals et le sera encore dans trois autres, mais, apparemment, personne n’a relevé le pompage digne des Shadoks. En tout cas, je lui colle l’étiquette « À fuir », il ne mérite pas mieux.
Réalisé par Alain Cavalier
Sorti en France (Festival de Cannes) en mai 2011
Sorti en France et en Belgique le 22 juin 2011
Je sais bien que ce film a battu le record de durée des applaudissements au Festival de Cannes... avant de repartir sans la moindre récompense – bien que son réalisateur ait été proposé (les cons disent « nominé ») pour la Palme d’Or. Mais enfin, on n’ignore pas ce que c’est, le Festival de Cannes : un marché, pas un endroit où la qualité est reconnue.
Dans ce cas, serait-il blasphématoire d’écrire ici que ce film n’est pas tout à fait à la hauteur de ce qui a été annoncé ? Qu’il est assez brouillon et bourré de scènes inabouties ? Et qu’après s’être intéressé au début (un cinéaste et un acteur jouent à être le président de la République et son Premier ministre), le spectateur doit convenir que le seul enjeu politique est cette idée à laquelle tenait beaucoup Vincent Lindon, de réduire autoritairement les salaires pour tous les citoyens français, y compris celui du président, de telle sorte que le plus élevé ne dépasse pas dix fois le moins élevé ? Et puis ? Et puis... c’est tout !
La fin de cette fiction repose d’ailleurs là-dessus : le « président » aurait voulu un éventail des salaires allant de 1 à 15. Désaccord idéologique, donc. Là-dessus, et c’est la partie bâclée du film, le Premier ministre démissionne et se présente contre lui à l’élection suivante, puis tous les deux sont battus. Dérisoire...
Vincent Lindon est très sympathique, et apparaît contre un être humain normal. Le réalisateur, lui, ne se donne aucun mal pour nous faire savoir qui sont tous ces hommes gravitant autour des deux personnages principaux, et croit judicieux de filmer Lindon dans sa chambre à coucher, avec une femme (nue et endormie) couchée à côté de lui. Cela rime à quoi ? Tout cela est passablement expédié, en fin de compte. Et puis, ces gens « de gauche » qui n’arrêtent pas de se goberger de nourritures coûteuses, cela fait un peu bizarre...
À voir pour l’idée, mais surtout pour la personnalité de Lindon.
Réalisé par Laurent Cantet
Sorti en Italie (Festival de Venise) le 30 août 1997
Sorti en France à la télévision seulement (Arte)
Film vu en vidéo, puisqu’il n’est jamais sorti en salles chez nous (seulement... en Hongrie ! Le 7 janvier 1999).
Le paradoxe de ce film est qu’il a été réalisé avec le concours de la Mission pour la célébration de l’an 2000 – ce qui a facilité la décoration anticipée des rues d’Ajaccio –, alors que le point de départ de cette histoire, c’est le désir d’un petit groupe d’amis parisiens de fuir la foule des gogos et les festivités qui devaient saluer ce pseudo-évènement (le vingt-et-unième siècle et le troisième millénaire ne commençaient nullement à ce moment-là, mais seulement le 1er janvier 2001. Or tout le monde officiel faisait semblant, pour satisfaire les commerçants... et on remit ça un an plus tard, pour la même raison).
Bref, l’un des allergiques, François, a organisé un court séjour sur la plus grande des îles Sanguinaires, petit archipel proche d’Ajaccio. Ils ont ainsi loué une maison, qui ne sert d’ordinaire que l’été, par conséquent dépourvue de chauffage. Stéphane, jeune homme qui vit sur place à titre de gardien, fera les courses en ville grâce à son canot pneumatique. Mais François, trop rigoriste et qui a interdit jusqu’aux postes de radio, indispose très vite ses amis, lesquels, renonçant à leurs beaux principes, ont subitement envie de faire la fête au moment fatidique du 31 décembre 1999 à minuit. Mais François disparaît...
Le film est court, une heure et huit minutes, et compte Jalil Lespert dans sa distribution, sous le nom de Djallil Lespert (signalons que ceux qui le connaissent prononcent « Djélil »). Il jouera l’année suivante dans un autre court métrage du même réalisateur, Le centre du monde, avant de devenir célèbre avec Ressources humaines, en 1999.
En avril 2009, j’avais écrit une petite note sur ces films que l’on ne peut plus revoir parce que quelqu’un parmi les ayant-droits s’y oppose. Et je citais le chef-d’œuvre d’Orson Welles, connu chez nous sous le titre Falstaff (en fait, il s’intitule Chimes at midnight, ou plutôt Campanadas a medianoche, puisqu’il a été tourné en Espagne sous une production hispano-suisse). Il était sorti en Espagne le 22 décembre 1965, et chez nous, au Festival de Cannes, le 8 mai de l’année suivante.
Eh bien, le film ressort... mais pas en salles, ce qui privera bien des cinéphiles. C’est en DVD, depuis le 20 juin. Version originale, c’est-à-dire en anglais, et sous-titres français qu’on peut désactiver. Absolument aucun bonus.
Dans ma (longue) critique du film de Spielberg A.I., j’écrivais ceci : « Après avoir salopé Peter Pan avec Hook, Spielberg a donc massacré Pinocchio. Attendons sans impatience sa version du Chat botté, de La petite sirène et d’Alice au pays des merveilles ». Pour Alice, Tim Burton s’en est chargé l’année dernière, merci, et pour Pinocchio, c’est Roberto Benigni qui s’est dévoué en 2002... Comme cette critique a presque dix ans et que je ne lis pas dans le marc de café (ma boule de cristal est en réparation), je ne pouvais pas encore savoir que tonton Steven s’attaquerait à Tintin !
Et pourtant si, bien qu’aux États-Unis, le petit reporter qu’on ne voit jamais travailler, surtout pas dans un journal (il doit savoir comment on les fabrique !), soit quasiment inconnu. En fait, Spielberg a découvert son existence en 1981, en lisant des articles qui comparaient Indiana Jones à Tintin : il s’est renseigné, a été emballé, s’est décidé à porter à l’écran une de ses aventures, et a fait soumettre le projet à Hergé, qui l’a immédiatement accepté. Les deux hommes devaient se rencontrer à Bruxelles fin mars 1983, mais le dessinateur est mort le 3 de ce mois-là, et Spielberg négocia avec sa veuve. Il envisagea d’engager un réalisateur français, François Truffaut, Jean-Jacques Beineix, voire... Roman Polanski, lequel travailla quelque temps sur Le sceptre d’Ottokar avant de jeter l’éponge. On sait aussi qu’il voulait faire jouer le capitaine Haddock par Jack Nicholson ! Finalement, ce sera une distribution inattendue – voir plus loin.
Le projet fut mis en sommeil, puis Spielberg l’a repris pour le réaliser lui-même, après bien des années. Il va même l’étendre : après le film tiré de deux albums, Le secret de la Licorne et Le trésor de Rackham le Rouge, qui sortira le 26 octobre en France, en Belgique, en Irlande, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni (les États-Unis attendront le 23 décembre), un autre film est prévu pour 2015.
Les personnages de Tintin parlant anglais ? « La Licorne » rebaptisée « Unicorn » bien que le vaisseau fut français ? Haddock empêché de fumer, de boire et de jurer ? On peut être sceptique. Le seul Français de la distribution est Gad Elmaleh, qui joue Omar Ben Salaad, personnage qui, sauf erreur, vient plutôt d’une autre aventure, Le crabe aux pinces d’or. Le scénariste s’est emmêlé les pieds ?
Les personnages ? Alors que Tintin sera interprété par Jamie Bell, l’excellent acteur de vingt-cinq ans qui débuta en 2000 dans Billy Elliott, le capitaine Haddock sera joué par Andy Serkis. Le professeur Tournesol, qui a pourtant un rôle important dans l’aventure d’origine, puisque c’est l’argent gagné avec l’invention de son sous-marin qui permettra au capitaine Haddock d’acquérir son château de Moulinsart, sera... absent ! Les deux policiers jumeaux et idiots, Dupont et Dupond, deviennent Thomson et Thompson, et sont représentés par les deux rigolos du cinéma anglais, Simon Pegg et Nick Frost, acteurs et scénaristes de Shaun of the dead et de Paul. Le dernier titulaire du rôle de James Bond, Daniel Craig, sera Rackham le Rouge, et Kim Stengel sera Bianca Castafiore. Je ne sais pas qui joue Milou. Attention, vous ne reconnaîtrez personne, il ne s’agit que de motion capture, c’est-à-dire d’images de synthèse plaquées sur les mouvements des acteurs réels. Pour ne rien arranger, le film sortira en 3D, et en Imax (voir ma critique d’Inception) dans les rares salles commerciales équipées – cinq en France à ce jour, aucune à Paris.
Réalisé par Joe Wright
Sorti à Aruba, en Grèce, à Hong-Kong et aux Antilles Néerlandaises le 7 avril 2011
Sorti en France le 6 juillet 2011
Avec Joe Wright, 39 ans seulement, venu de la télévision et du court-métrage, et qui avait commencé avec deux films excellents, Orgueil et préjugés puis Reviens-moi, on avait cru tenir un nouveau petit génie du cinéma britannique. Mais Le soliste, tourné il est vrai à Hollywood avec les énormes moyens de Dreamworks et d’Universal, sans être déshonorant, avait déçu. Or, à présent, la débâcle est totale, et on se retrouve avec une resucée du Nikita de Luc Besson – qui, justement, est passé hier soir... sur Arte !
Le début, empreint de mystère mais trop calqué sur ce dernier film surestimé (n’y manque guère que l’initiation d’ailleurs inutile à l’informatique), montre Hanna qui, selon les journaux, a entre quatorze et seize ans, parle une demi-douzaine de langues – dont l’arabe, mais pas le français, au risque de nous vexer –, sait se battre mieux que Jean-Claude Vandamme, et vit recluse dans la forêt proche du Cercle arctique où son père l’a élevée. Puis, ayant terminé son éducation, elle se trouve miraculeusement transportée dans le désert marocain, près d’Essaouira, l’ancienne Mogador ; quoique, d’après les vues qu’on en a, ce serait plutôt Taroudant ! But : combattre les agents secrets qui veulent la tuer. On apprendra bien plus tard qu’elle n’a pas eu de mère et a été fabriquée dans un centre d’expérimentation sur les embryons (donc que son père n’était qu’un faux père), que les autorités ont changé d’avis, annulé l’opération et décidé de la faire disparaître, et que son seul recours est de tuer tout le monde. Subtil, comme on voit...
Le périple d’Hanna va la transporter en Espagne, puis en France, et enfin en Allemagne, probablement à Berlin, quoique les lieux ne soient jamais précisés. Et, dans le duel final, elle affronte le chef des méchants, une femme glaciale, incarnée par Cate Blanchett, qui devait avoir un arriéré d’impôts pour s’être égarée dans ce navet abominable.
Hypothèse : le réalisateur s’est entiché de sa très jeune interprète dans Reviens-moi, Saoirse Ronan (elle avait alors treize ans, elle en a dix-sept aujourd’hui), et a voulu lui faire jouer un rôle en vedette. Elle avait entre-temps paru dans cinq films, elle en a fait un autre après Hanna, et a deux engagements en vue. Mais elle devrait peut-être changer de metteur en scène, à présent.
Réalisé par Frédéric Schoendorffer
Sorti en France le 6 juillet 2011
Titre un peu malencontreux, car le film peut être confondu avec The switch, sorti le 25 août 2010, ou encore avec le Switch de Blake Edwards (chez nous, Dans la peau d’une blonde, sorti en 1991)... sans compter les 27 autres films de ce nom ! On ne se creuse pas beaucoup la tête pour trouver des titres, dans le cinéma.
L’histoire d’une machination : dans les années 1970-1980, un couple de bourgeois génétiquement incompatible avait fait appel à l’insémination artificielle pour avoir un enfant. Mais la fille née de cette opération s’est avérée mentalement déséquilibrée, et ses parents se sont détachés d’elle. Devenu adulte, et très douée pour l’informatique (et le piratage, par conséquent, selon les clichés du cinéma), elle veut se venger du monde entier, et recherche ses demi-frères biologiques, issus du sperme du même donneur. Elle en trouve deux, un garçon, qu’elle tue et décapite, et une fille, s’arrangeant pour ce crime lui soit attribué.
L’aspect extrêmement tordu et invraisemblable de cette histoire est dû au fait que le co-scénariste et co-producteur est Jean-Christophe Grangé, qui en a commis bien d’autres. Mais comme tout cela ne nous est révélé qu’à la fin, le spectateur n’a pas le temps de s’interroger, il se contente, mis dans la peau de la victime, de suivre cette histoire, qui tourne assez vite à la course-poursuite dans Paris. C’est très mouvementé, mais l’épilogue ne se perd pas en explications, et Cantona fournit la touche de comique involontaire, comme à chacune de ses apparitions à l’écran.
Réalisé par Jerzy Skolomovski
Sorti en Italie (Festival de Venise) le 1er septembre 1970
Sorti en France le 15 décembre 1971
Ressorti en France le 13 juillet 2011
Une charmante comédie, hélas gâchée par un dénouement tragique apparaissant plaqué sur le reste, et qui ne semble justifié que par le désir de rappeler un plan vu auparavant, de Mike mimant l’amour dans une piscine avec le poster de la fille dont il est amoureux : à la fin, c’est avec son cadavre qu’il réitère la scène ! Certes, l’image est esthétique, mais ce n’est ni très fin ni très subtil.
L’histoire est celle d’un jeune garçon de quinze ans qui obtient son premier travail, garçon de bains dans un établissement public de Newford, à Londres (deep end désigne l’endroit d’une piscine où la profondeur est la plus grande) – bien qu’aucun quartier de Londres ne semble porter ce nom, et que le film ait été tourné à Münich. Comme il est craquant, les clientes d’âge mûr tentent de le séduire, ce qui nous vaut une scène hilarante avec l’ancienne pin-up Diana Dors, qui a, disons, pris du poids, mais il n’a d’yeux que pour Sue, sa collègue, laquelle préfère fréquenter des hommes plus fortunés. La façon dont il l’amènera à lui céder est ingénieuse, un peu machiavélique et pleine de fantaisie, mais hélas, il échoue à, euh... remplir sa mission, s’en désespère, demande des explications, et provoque un accident mortel.
Tout l’intérêt du film est dans cette perpétuelle fantaisie, et dans le charme du jeune homme, joué par John Moulder Brown, qui, à dix-sept ans, en était déjà à son vingt-sixième film ! Il avait débuté à cinq ans, et il joue toujours.
Comme le film ressort en copie neuve, le distributeur a cru bon de faire refaire les sous-titres, confiés à une sous-titreuse prénommée Hélène. C’est donc l’occasion (à ne pas rater) d’inclure quelques bourdes. Ainsi, en 1970, on ne traduisait pas « See you later » par le lassant « À plus », on se contentait de dire « Au revoir » ; et on ne disait certes pas d’une fille qu’elle était « bonne » ! Sic.
Et puis, il y a cette scène où une prostituée, qui tarifait ses passes habituellement à cinq livres sterling, consent le demi-tarif à ses clients, parce qu’elle a provisoirement une jambe dans le plâtre. Elle annonce donc que ce sera « two and ten », ce qui, dans le langage commerçant de l’époque, signifiait deux livres et dix shillings. Or le shilling, qui a été supprimé en 1971, valait un vingtième de livre. Par conséquent, deux livres et dix shillings équivalait à deux livres et demie, qui sont bien la moitié de cinq. Mais la traductrice, qui ne connaît rien à tout cela, a traduit par... 2,10 livres ! Pourtant, un peu plus loin, il est bien dit dans le dialogue que la fille demande 2,50 livres...
Tout cela est donc l’effet du fameux « dépoussiérage » dont les cuistres se gargarisent sans arrêt, et qui consiste à remplacer les traductions exactes par des équivalents faux ou vulgaires, voire les deux. Mais qu’importe, le public n’est pas si exigeant.
Réalisé par Michel Ocelot
Sorti en Allemagne (Festival de Berlin) le 13 février 2011
Sorti en France le 20 juillet 2011
L’auteur de ce chef-d’œuvre qu’était Azur et Asmar possède un style bien reconnaissable, qui persiste même lorsque ses personnages sont représentés en ombres chinoises, comme dans ce recueil de six contes. C’est toujours aussi charmant, et réalisé de manière impeccable, avec des décors somptueux. Ce que le public ne perçoit peut-être pas vraiment, c’est aussi la qualité des dialogues : rédigés à la perfection et sans erreurs ni vulgarité, ils sont en outre dits par des voix fraîches, à la diction parfaite, qu’on aimerait entendre dans les autres films que nous devons subir à longueur de semaines.
Les intrigues de ces contes sont inattendues, et l’on prend à les suivre un immence plaisir. Michel Ocelot est bien le meilleur auteur de films d’animation que nous ayons en France. Mais, pour être franc, ce film n’est pas tout à fait inédit. Il y avait déjà eu, dans ce style, en 2000, Princes et princesses, réalisé avec une toute autre équipe, puis l’année dernière, parallèlement à la réalisation du film dont il est question aujourd’hui, une série télévisée de dix épisodes, Dragons et princesses, réalisés avec le même équipe, où se trouvait déjà trois des contes qu’on peut voir ici, Le loup-garou, Garçon tam-tam et Ti Jean et la belle-sans-connaître. Le tout a été diffusé les 6 mai, 25, 26, 27 et 29 octobre 2010, puis les 1er, 2, 3, 4 et 5 novembre. Et en juin au Festival d’Annecy. Pour le cinéma, on a ajouté la 3D, mais je n’ai pas vu cette version, puisque je boycotte ce procédé.
Réalisé par Richard Ayoade
Sorti au Canada (Festival de Toronto) le 15 septembre 2010
Sorti en France le 20 juillet 2011
Premier film d’un réalisateur de télévision de trente-quatre ans, Submarine a peu de choses à dire : Oliver a quinze ans, il n’est ni beau ni laid, ni intelligent ni très bête (mais il lit chaque jour une page du dictionnaire), et sa seule ambition est d’attirer dans son lit une camarade de classe qui lui plaît, mais qui... a de l’eczéma ! Et puis, sa mère est attiré par un type assez moche mais qui se fait passer pour un gourou, il faut donc l’en empêcher.
Tout est moyen dans ce film, l’histoire, cent fois vue, les acteurs, inconnus et banals. Le film est cependant sauvé par sa réalisation et son montage, plutôt originaux, où abondent les images vues par un œil neuf. Mais enfin, c’est oublié très vite.
Réalisé par Frédéric Louf
Sorti en France (Festival de Cabourg) le 15 septembre 2011
Sorti en France le 20 juillet 2011
Premier long-métrage, après un court et un téléfilm, d’un inconnu qui a quelques chances de le rester. Dans le cinéma français, voilà qui est monnaie courante. L’acteur principal, Pierre Niney, un jeune qui est pensionnaire à la Comédie-Française, a paru dans quelques films dont Nos 18 ans et Les émotifs anonymes, mais j’avoue n’avoir retenu alors ni son nom ni son visage. La distribution compte un autre membre du Théâtre-Français, Michel Vuillermoz, qui joue le père bourru, ainsi que Thomas Chabrol, en professeur sarcastique, et qui n’apparaissait jamais que dans les films de son père.
Le point de départ est assez improbable, puisque l’un des fils d’un couple de fleuristes installés en province a été envoyé à Paris... pour y passer son bac, alors que le moindre bourg offre cette possibilité sans frais supplémentaire. Il redouble sa terminale et fréquente des lycéens friqués. Naturellement, il tombe amoureux de l’une des filles de la bande, et s’efforce de lui cacher qu’il n’a pas d’argent. Il finira avec une autre fille et décrochera son bac.
On voit que les deux coscénaristes, dont le réalisateur, ne se sont pas trop creusé l’imagination. Quant au dialogue, il a été rédigé avec l’amateurisme coutumier. Ainsi, en 1981, on ne disait pas « au final » ni « être DANS la compassion », ces tics ridicules sont beaucoup plus récents. Et puis, cette caricature des jeunes bourgeois déblatérant les pauvres et la gauche...
Seules deux scènes sont regardables : celle filmée sur les toits, avec le panorama de Paris, et la scène finale où les deux tourtereaux s’agenouillent. Mais on s’ennuie beaucoup.
Réalisé par Mia Hansen-Løve
Sorti en France le 6 juillet 2011
Ils s’aiment dès avant le début du film. Camille a quinze ans et Sullivan, dix-neuf. Mais il a décidé d’arrêter ses études et de partir au Venezuela pour devenir quelqu’un ; et puis, sa petite amie, qui dramatise tout, est un peu étouffante. Il part, écrit un peu, ne téléphone pas, puis cesse de se manifester. Lorsqu’il reviendra, il ne donnera pas signe de vie avant des années. D’ailleurs, il s’est installé à Marseille, car il ne supporte pas la ville de Paris, où Camille est restée et a fini par devenir l’assistante et la compagne d’un architecte qui a l’âge d’être son père. Lorsqu’ils se revoient, ils ne peuvent que constater qu’ils s’aiment toujours, mais la vie les a rivés dans leurs nouvelles activités, il est trop tard pour changer d’existence. Sullivan, malheureux d’être séparé de la femme qu’il aime, prend alors l’initiative de rompre.
Sebastian Urzendowsky, l’interprète de Sullivan, épatant dans Ping-pong (vu en 2006), né et vivant à Berlin, et qui à 26 ans a déjà 32 films et téléfilms à son actif, mais surtout allemands, est si attirant que, lorsqu’il disparaît provisoirement, l’attrait de cette histoire faiblit un peu. Pourtant, la partie sur l’architecture ne manque pas d’intérêt. Les scènes d’amour, plutôt pudiques, ne sont pas ridicules, et cela, c’est rarissime.
Si vous vous intéressez aux curiosités cinématographiques, ce dont je ne doute pas, allez prendre connaissance de la dernière découverte qu’ont faite des passionnés de la chose, en lisant cet article de Rue89. Vous pourrez y entendre ce qu’est le Wilhelm scream, gag à répétition des films montés à Hollywood.
Pour ma modeste part, je me contente de suggérer ceci : en vue de « dépoussiérer », comme on dit, les films d’Alfred Hitchcock (qui en ont bien besoin), je propose de remplacer par ce fameux cri toutes les apparitions que le maître faisait dans ses films. Il doit bien y en avoir une quarantaine. Cela fera une saine récréation pour les monteurs de son, et un nouveau sujet de conversation pour les cinéphiles, un peu frustrés ces temps-ci.
Réalisé par Marco Berger
Titre original : Ausente
Sorti en Allemagne (Festival de Berlin) le 13 février 2011
Sorti en France le 27 juillet 2011
Les deux courts métrages et le long métrage (Plan B) tournés auparavant par Marco Berger portaient la marque du film fauché : on les aurait dit fabriqués avec un caméscope. Mais la qualité – et les obsessions de leur auteur – étaient là. Avec Absent, restent les obsessions, mais entre-temps l’argent est venu, et l’on hérite d’un film léché, pourvu d’une musique d’ambiance visiblement écrite pour la circonstance, mais dont on aurait pu se passer. Voir Un amour de jeunesse, qui, justement...
Bref, Martín, seize ans (mais l’interprète en a visiblement un peu plus), lycéen de Buenos Ayres, a jeté son dévolu sur son professeur de natation, et invente une histoire pour passer la nuit chez lui. Mais, déception du garçon, rien ne se produit. Au matin, ses parents découvrent qu’il a découché. Ils font du foin. Puis Martín avoue à son professeur qu’il a menti et qu’il regrette que la manœuvre n’ait pas marché. Il reçoit une gifle de l’adulte, et le met au défi d’aller se plaindre : « On verra qui aura des ennuis ! », menace-t-il. Charmant garçon. Cependant, peu après, il meurt d’un accident, et le professeur, regrettant alors ce qui n’a pas eu lieu, se met à fantasmer. Fin du film.
Le premier tiers du film, s’il crée une gêne voulue par l’auteur, est réussi. Au deuxième tiers, on assiste à la vie quotidienne du garçon, et l’intérêt de l’histoire tombe en chute libre, car il ne fait rien de spécial. Le dernier tiers, après l’accident mortel, est inutile, maladroit, lourd, et l’on regrette que ce film déjà court ne le soit pas davantage.
C’est dommage, car Marco Berger excelle à faire avancer par petites touches une histoire fondée sur le non-dit. C’est pourquoi les deux plans imaginaires de baisers entre l’homme et le garçon paraissent de trop et constituent une fausse note. Le film n’est à voir que pour ses intentions et pour la maîtrise qui imprègne le début, les travaux d’approche du dragueur, ses petits sourires en coin et ses regards sournois.
Notons que le film est très mal distribué : quatre copies pour toute la France, une seule en numérique... et dont les sous-titres sont décalés, puisqu’ils sont affichés avec une seconde de retard sur l’image. Il paraît qu’on « ne peut pas » corriger ! Bien la peine d’avoir du numérique, pour lequel les sous-titres sont dans un fichier à part... Ce genre de problème, sur un ordinateur, se corrige très facilement. On veut inciter les spectateurs à télécharger le film pour qu’ils puissent y remédier eux-mêmes ?
Réalisé par Jessica Hausner
Sorti en Italie (Festival de Venise) le 5 septembre 2009
Sorti en France le 27 juillet 2011
Présenté il y a presque deux ans à Venise, ce film ne sort que cette semaine, on se demande pourquoi.
Christine a une sclérose en plaques, ce qui l’a rendue tétraplégique. Pour ne pas rester seule, elle voyage, escortée par les bénévoles de l’ordre de Malte. À Lourdes, visite dont elle n’espère rien car elle ne semble pas très croyante, elle retrouve l’un des accompagnateurs qu’elle avait déjà rencontré à Rome. Garçon séduisant et sympathique.
Puis voilà qu’inexplicablement, elle est guérie. Mais le médecin chargé de vérifier ce type d’évènement l’avertit que sa maladie connaît des rémissions, et que l’amélioration de son état peut n’être pas définitive. Effectivement, le dernier soir, alors qu’elle danse avec son amoureux, elle trébuche et tombe. Mais elle se relève, et on n’en saura pas davantage.
Le film, qui ressemble furieusement à un documentaire, au moins dans sa première moitié, ne prend aucun parti. Il ne dénonce pas non plus le commerce dont vit la ville de Lourdes, contrairement à ce qu’écrit bêtement le critique du « Canard enchaîné », qui prend ses désirs pour des réalités. Il n’a non plus, enfin, ni la malice ni la lourdeur du film de Mocky Le miraculé. Mais il montre que les bénévoles accompagnateurs sont comme tout le monde ; que l’aînée qui les dirige peut avoir ses antipathies envers certains malades ; que les plus jeunes des filles peuvent délaisser leur mission pour aller flirter avec les beaux garçons de la troupe, qui n’y sont pas indifférents ; et que les familles des malades peuvent éprouver de l’hostilité envers celui qui semble guéri : pourquoi lui (ou elle) et pas mon fils ou ma fille ?
Cela semble étrange, mais ce film est passionnant. Bien plus que les pâles films policiers dont nous avons la spécialité chez nous (la réalisatrice est une Autrichienne de trente-neuf ans, qui fait là son premier film en France).
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Dernière mise à jour de cette page le jeudi 1er janvier 1970.