Œuvres citées (en italiques, autre que des films) : Le grand alibi – Stage fright – Mon petit doigt m’a dit – L’heure zéro – Ciao Stefano – No pensarci – La nuit des morts-vivants – Jackpot – What happens in Vegas? – Friends – Trade – Trade - Les trafiquants de l’ombre – Deux jours à tuer – Le trou – Casque d’or – Rendez-vous de juillet – Goupi mains rouges – Touchez pas au grisbi – L’été meurtrier – Les hauts murs – Enfances – Et puis les touristes... – Am Ende kommen Touristen – The Tudors – Deux sœurs pour un roi –Rome – Queer as folk – Match point – Cleaner – Rivière sans retour – Indiana Jones et le royaume du Crâne de Cristal – Indiana Jones and the Kingdom of the Crystal Skull – Un conte de Noël – Les amitiés maléfiques – La sentinelle – Les hauts murs – Entre les murs – Française – Sex and the city
Personnes citées : Pascal Bonitzer – Agatha Christie – Pascal Thomas – Dany Brillant – Alfred Hitchcock – Marlene Dietrich – Mathieu Demy – Frédéric Chopin – Eva Longoria – George Romero – Marylin Monroe – Dana Fox – Cameron Diaz – Ashton Kutcher – Cesar Ramos – Kevin Kline – Jacques Becker – Jean Becker – Isabelle Adjani – Christian Faure – Albert Algoud – Auguste Le Breton – Carole Bouquet – Catherine Jacob – Yann Le Gal – Ismaël Ferroukhi – Corinne Garfin – Joana Hadjithomas – Khalil Joreige – Isild Le Besco – Safy Nebbou – Fritz Lang – Orson Welles – Jacques Tati – Jean Renoir – Alfred Hitchcock – Ingmar Bergman – Isild Le Besco – Robert Thalheim – Frédéric Royer – Arnaud Demanche – Stéphane Rose – Jeanne Moreau – Catherine Deneuve – Steven Spielberg – Federico Fellini – Michel Denisot – Leonardo DiCaprio – Martin Scorsese – Howard Hugues – Michael Hirst – Anne Boleyn – Henry VIII – Jonathan Rhys Meyers – Woody Allen – Natalie Dormer – Sam Neill – Maria Doyle Kennedy – Charles Brandon – Henry Cavill – Penelope Cruz – Sean Connery – Shia LaBeouf – Frank Lebœuf – Arielle Dombasle – Bernard-Henry Lévy – Steven Spielberg – George Lucas – Cate Blanchett – Christine Bravo – Ray Winstone – Harrison Ford – Michel Denisot – Jean-Paul Grousset – Arnaud Desplechin – Bernard Herrmann – Emmanuel Bourdieu – Émile Berling – Laurent Cantet – Souad El-Bouhati – Hafsia Herzi
Réalisé par Pascal Bonitzer
Sorti en France le 30 avril 2008
Les romans d’Agatha Christie sont presque tous passionnants – sauf ceux d’espionnage, genre qu’elle maîtrisait mal –, et rivalisent d’invention et d’ingéniosité. Mais, très british, ils ne sont pas aisés à transposer en France. Le réalisateur qui veut porter à l’écran un de ces romans doit disposer d’un scénariste et d’un dialoguiste de talent, et s’intéresser à son histoire. Avec ses films Mon petit doigt m’a dit et L’heure zéro, Pascal Thomas démontra brillamment que c’était possible.
Pascal Bonitzer, au contraire, ne s’intéresse pas à son film, sans doute sous prétexte qu’il s’agit d’une commande, ce qui est aimable, et honnête à l’égard des commanditaires. Mauvais signe : la profusion au générique d’acteurs très connus indique souvent que c’est sur eux que l’on compte, davantage que sur le scénario (que fait Dany Brillant dans cette galère ?). Et c’est le cas pour ce film, dont le titre est d’ailleurs fâcheusement repris à la version française de Stage fright, un film d’Hitchcock avec Marlene Dietrich. Le réalisateur, c’est évident, mise sur les dialogues pour faire avancer son intrigue, or ils sont plats et mornes. En outre, tout le début est occupé par des scènes où l’on parle de gens que l’on n’a pas encore vus, faute de débutant, car le spectateur, privé de support concret, ne comprend rien à ce qu’on lui raconte.
Les acteurs eux-mêmes semblent s’ennuyer, sauf Mathieu Demy. Mais son personnage est caricatural : comme il incarne un écrivain, il n’est pas rasé, s’habille mal, boit, fume et couche sans se souvenir de quoi que ce soit le lendemain. Ne manque guère que la cocaïne à sa panoplie.
Réalisé par Gianni Zanasi
Titre original : Non pensarci
Sorti en Italie (Mostra de Venise) le 1er septembre 2007
Sorti en France le 30 avril 2008
Titre faiblard pour la version distribuée en France. Le titre original signifie « N’y pense pas ».
Stefano, 36 ans, n’est pas verni : lorsque le chanteur de son groupe de rock punk plutôt ringard se lance de la scène pour plonger dans la foule – si l’on peut dire –, les spectateurs s’écartent, il s’écrase au sol, et le concert s’arrête net, on s’en doute. Puis Stefano découvre que sa femme le trompe. Mais il n’est pas du genre à se disputer, il ne discute même pas, il abandonne. Quittant Rome pour aller, comme on dit dans les pubs télévisées, « se ressourcer » chez ses parents, il accumule les bourdes. Ainsi, prié d’aller chercher ses neveux à la sortie de l’école, il part en vadrouille avec eux, leur achète un chien qui pue, et leur fait des démonstrations de dérapage contrôlé en voiture sur un parking désert ; les gosses vomissent, et la police lui sucre son permis. Pour faire diversion, il raconte à ses parents que sa sœur est lesbienne, ce qui est complètement inventé ! Tête des géniteurs, qui s’efforcent de « comprendre »... Pour ne rien arranger, son frère Alberto tombe amoureux d’une call-girl, et l’entreprise d’emballage de cerises en bouteille que lui a laissé leur père à la retraite est au bord de la faillite : les employés n’ont pas été payés depuis trois mois. Enfin, lorsque le plus jeune député d’Italie promet de les aider s’il vient jouer du Chopin (!) pour l’anniversaire de sa mère, il se pointe un jour trop tôt, ne salue personne, et, sans même s’asseoir devant le piano, joue le Septième Prélude en la majeur de Chopin, le morceau le plus court et le plus facile de l’histoire de la musique !
On a compris que Stefano est hors normes, et ne fait ni ne ressent rien comme tout le monde. Ainsi, tout le monde semble empressé à lui faire des confidences, qu’il n’a nulle envie d’écouter. Peu courant. À la fin, regonflé, il retourne à son orchestre, et cette fois, c’est lui qui plonge dans le public ; arrêt sur images, on ne saura pas si les spectateurs, cette fois, l’attraperont au vol, mais il y a de l’espoir.
Le film est très sympathique. Mais il n’aura aucun succès.
À mon (très humble) avis, lors des festivals de cinéma, ce ne sont pas les actrices qui devraient recevoir les prix d’interprétation, mais leurs maquilleurs. Voir « en vrai » une vedette de cinéma quand elle n’est pas encore maquillée, ça fait un choc.
La semaine dernière, on a pu voir sur Canal Plus quelques vedettes féminines au saut du lit, évidemment choisies aux États-Unis, puisqu’il n’existe aucun autre pays au monde qui soit digne d’intérêt, comme l’on sait. Eh bien, chers cinéphiles, c’était effrayant. La pire étant Eva Longoria, radicalement méconnaissable et qui semblait sortir d’un plateau où George Romero tournerait une nouvelle version de La nuit des morts-vivants.
Or il est notoire que la plupart des vedettes féminines sont dans ce cas. Marylin Monroe, par exemple, devait se maquiller pendant trois heures avant de mettre le nez dehors.
Mais comment font les hommes, sans maquilleur ? Je n’ose pas répondre...
Réalisé par Tom Vaughan
Titre original : What happens in Vegas
Sorti au Royaume-Uni le 22 avril 2008
Sorti en France le 7 mai 2008
Si votre rêve secret, lecteur, coïncide avec celui de votre (très humble) serviteur, le début du film comblera vos vœux : les deux héros s’offrent un séjour de trois semaines dans un palace au luxe tapageur de Las Vegas, et pardon pour ce pléonasme. Las Vegas, où rien de ce qui touche au summum de la distinction ne semble déplacé ; par exemple, ces bagues de fiançailles dispensées par les distributeurs automatiques, et dont le chaton s’orne élégamment, non d’un diamant, mais d’une paire de dés. Certes, et soit dit en passant, comment le garçon, fauché, viré de son emploi par son propre père, a-t-il pu payer ne serait-ce que le voyage depuis New York ? Mais ne chipotons pas.
Comme la scénariste Dana Fox a vu et assimilé la série Friends, elle n’a pas oublié le mariage involontaire de Ross et Rachel, unis à l’issue d’une nuit de cuite (saison 5, épisode 24, pour les connaisseurs). Ainsi, Joy et Jack se retrouvent mariés au petit matin, et ils sont d’accord pour divorcer, mais voilà que Jack gagne trois millions de dollars au casino. Bien sûr, Joy change d’avis ! Ils se retrouvent devant le tribunal, où le juge, rétrograde et qui les trouve antipathiques, décide de mettre l’argent sous séquestre, et les condamne à vivre ensemble pour six mois ; le délai passé, s’ils ne se sont pas mis d’accord, il leur collera un procès qui les ruinera !
La suite, donc la cohabitation qui s’ensuit, est très drôle, et les gags abondent. On regrette un peu l’attendrissement final, qui ne surprend personne. Mais le film se clôt sur le mariage initial, qu’on n’avait pas vu, et qui culmine dans le mauvais goût. Et c’est bien le mauvais goût assumé qui fait tout l’intérêt du film, avec les deux acteurs : Cameron Diaz, qui commence à faire son âge, est néanmoins efficace, et Ashton Kutcher est aussi beau garçon que bon acteur.
Réalisé par Marco Kreuzpaintner
Titre original : Trade
Sorti aux États-Unis (Festival de Sundance) le 23 janvier 2007
Sorti en Allemagne le 18 octobre 2007
Bon film, certes, mais pas sorti en France ! Cela commence à Mexico, où une jeune fille de treize ans est enlevée par la mafia russe, et envoyée aux États-Unis pour y être vendue sur Internet – commerce florissant, mais qui intéresse peu de monde. Son frère aîné, Jorge (l’excellent Cesar Ramos), avec l’aide d’un policier venu des États-Unis, va la retrouver à New York, la ramène au pays, et poignarde ensuite le responsable russe de ce trafic puant, installé à Mexico.
Un dialogue m’a retenu, car il est, à ma connaissance, unique. Jorge demande à Ray, le policier états-unien (Kevin Kline), s’il a des amis mexicains. « Oui, j’en ai un », répond l’homme. Jorge s’étonne : « Mais là où tu vis, tu devrais en avoir mille ! ». Ray se défend : « Ah bon ? Tu as des amis américains, toi ? ». Rigolade de Jorge : « Tous mes amis sont américains. Ils sont mexicains, dont ils sont américains. L’Amérique, c’est l’Amérique du Nord, les États-Unis, le Canada, le Mexique. Plus l’Amérique Centrale, plus l’Amérique du Sud. Pas uniquement vous, les Gringos, qui vous croyez au centre du monde ». Très juste, mais il est bon que cela soit dit au moins une fois.
Réalisé par Jean Becker
Sorti en Allemagne (European Film Market) le 8 février 2008
Sorti en France le 30 avril 2008
Jacques Becker était un bon réalisateur, et il a laissé des films importants, comme Le trou, sa dernière œuvre (1960), ou encore Casque d’or, Rendez-vous de juillet, Goupi mains rouges et Touchez pas au grisbi. Son fils Jean Becker, lui, fut son assistant et n’a guère connu qu’un seul succès, L’été meurtrier, en 1983 – encore s’agissait-il d’un film mineur, dont le public a surtout retenu l’unique rôle nu d’Isabelle Adjani.
Deux jours à tuer n’est qu’un misérable navet, et sa conception même le flingue en plein vol : Antoine, surpris durant un déjeuner au bistrot avec une femme dont on croit que c’est sa maîtresse alors que c’est une amie cancérologue, subit une scène de sa femme jalouse, et saisit ce prétexte pour démolir, au cours d’un dîner d’anniversaire, famille et amis : c’est le Festen du pauvre, qui étonne un peu, car les horreurs qu’il débite alors sont de celles qu’on balance à sa famille quand on a dix-sept ans, pas quarante-deux. Puis il part rejoindre son père en Irlande, père qui a lui aussi abandonné toute sa famille lorsque Antoine avait treize ans. On apprend alors que la scène du lavage de linge sale en famille n’était qu’une comédie : se sachant atteint d’un cancer qui effectivement l’emporte peu après, il a voulu « dégoûter son entourage » pour lui éviter des regrets de sa mort prochaine ! Mais alors, pourquoi donc a-t-il chargé son père d’aller raconter tout cela à ses proches après son décès ? Incohérent. Voire franchement idiot...
Au passage, compliments aux scénaristes-dialoguistes, qui ne méritent pas qu’on les nomme, et qui ont inséré dans le dialogue l’expression « s’en rappeler », ainsi qu’à l’acteur principal, qui n’a pas refusé de dire la réplique incriminée : ces gens, qui gagnent leur vie avec la langue française, n’ont pas scrupule à piétiner leur instrument de travail. Un jour, exemple aidant, tout le monde parlera aussi mal que les acteurs français.
Réalisé par Christian Faure
Sorti aux États-Unis (Los Angeles COLCOA Film Festival) le 19 avril 2008
Sorti en France le 30 avril 2008
Le scénario est dû à l’estimable Albert Algoud, d’après un livre d’Auguste Le Breton, qui est l’un des personnages centraux de l’histoire, sous son nom d’Yves Tréguier, à l’âge de quatorze ans, c’est-à-dire en 1932. Ces hauts murs, qui ne sont que métaphoriques puisque le centre de détention pour garçons dont il est question ici ne comporte aucune enceinte infranchissable – à preuve, l’évasion finale –, abritent une sorte de prison pour jeunes pré-délinquants ou supposés capables de le devenir ; tel ce jeune garçon surnommé « Fil de fer », que sa mère (Carole Bouquet), pourtant aisée, a placé dans ce bagne parce qu’elle s’est remariée et que son nouveau mari ne supporte pas son fils. Le jeune homme finit par se suicider.
D’autres personnages sont aussi attachants, et les deux plus sympathiques finissent par s’enfuir, au volant de la voiture que la directrice, compatissante mais impuissante (Catherine Jacob), leur a permis de lui voler (!).
Le film n’est pas parfait – la prise de son n’est guère satisfaisante –, mais les jeunes interprètes, tous excellents, lui donnent toute son importance.
Réalisé par Ismaël Ferroukhi, Corinne Garfin, Joana Hadjithomas, Khalil Joreige, Isild Le Besco, Yann Le Gal et Safy Nebbou
Sorti en Allemagne (Festival de Hambourg) le 2 octobre 2007
Sorti en France le 14 mai 2008
L’idée de départ de ce film français est séduisante en apparence, mais la mise en œuvre est très inégale, comme il fallait s’y attendre : un seul scénariste, Yann Le Gal, mais sept réalisateurs (dont le scénariste lui-même). Et le générique de fin est abusif, car il désigne les six sketches du film sous le titre global L’enfance de..., or les enfants qui nous ont été montrés ne sont PAS les futurs réalisateurs Fritz Lang, Orson Welles, Jacques Tati, Jean Renoir, Alfred Hitchcock et Ingmar Bergman, mais des personnages imaginaires, et les anecdotes qui les mettent en scène sont seulement inspirées d’une phrase qu’ils auraient écrite ou prononcée – citation qui n’est le plus souvent qu’un lieu commun assez navrant. Par exemple, il est faux qu’Hitchcock était fils de bourgeois (son père était un simple épicier) et que sa mère ait été aussi terrifiante que celle qui nous est décrite. On peut en outre douter qu’à l’âge de neuf ans, il ait connu des pollutions nocturnes l’incitant à se lever la nuit pour laver ses draps en cachette !
Des six courts-métrages, le moins long et le plus insignifiant concerne le prétendu Orson Welles, et il est signé Isild Le Besco. Il n’évoque le réalisateur que via un tour de magie que lui montre son père, et une tirade que l’enfant récite (fort mal). Le meilleur des six concerne Jacques Tati, car il évoque assez bien l’univers visuel et absurde que le grand créateur devait ensuite offrir au public : l’histoire d’un jeune garçon trop grand pour être « casé » sur la photographie de sa classe. Ce sera la seule occasion de sourire qui se présentera au spectateur.
Le reste balance entre le plat et le grotesque, voire le malhonnête, et les spectateurs peu au fait de la vie réelle des grands metteurs en scène risquent de prendre pour argent comptant l’anecdote du dernier sketch : Ingmar Bergman enfant, qui tente d’étouffer sa petite sœur, encore bébé, sous un coussin !
Réalisé par Robert Thalheim
Titre original : Am Ende kommen Touristen
Sorti en France (Festival de Cannes) le 21 mai 2007
Sorti en Allemagne le 16 août 2007
Sorti en France le 14 mai 2008
Le titre allemand signifie « À la fin, les touristes arrivent » (les cons diraient « Au final... »). C’est le deuxième film, très autobiographique, de Robert Thalheim, réalisateur allemand de trente-quatre ans.
Le jeune Berlinois Sven, pour éviter l’armée, fait son service civil. Il voulait obtenir une affectation dans une maison de jeunes à Amsterdam ; pas de chance, on l’envoie... à Auschwitz, où il devra faire diverses tâches au service du musée local.
On s’en serait douté, Auschwitz est devenu un haut-lieu du tourisme, et cela fait un choc de voir la ville et ses environs vivre de ce commerce. Imagine-t-on de ramasser un P.V. pour avoir mal garé sa voiture sur le parking d’Auschwitz ?
Sven n’a pas tiré le gros lot. L’une de ses occupations consiste à s’occuper d’un vieillard bourru, Krzeminski, ancien interné polonais au camp de prisonniers (il y avait deux camps à Auschwitz, un camp d’extermination et un camp de concentration), et qui, refusant de quitter l’endroit, gagne quelques sous en restaurant les valises des martyrs du camp d’extermination. Mais comme il n’a pas bien compris ce qu’on attendait de lui, il les répare au lieu de les conserver en l’état, si bien que la direction le vire, le privant ainsi de sa seule source de revenus. Étrange rebondissement de scénario, car ladite direction aurait pu s’en apercevoir plus tôt.
Le film est maladroit, et franchement un peu ennuyeux. On le regrette, mais les bonnes intentions ne suffisent pas.
Frédéric Royer, Stéphane Rose et Arnaud Demanche (à gauche, et qui écrivait le faux blog de Jacques Chirac) sont trois joyeux drilles qui, depuis deux ou trois ans, décernent les Gérard du cinéma, une série de « récompenses » valant bien les Oscars, Césars et autres Molières officiels. Ces mal élevés ne respectent rien. Je vous recommande le Gérard de l’actrice que les journalistes s’obstinent à appeler « Mademoiselle » alors qu’elle a une tête à être appelée « Mémé ». Jeanne Moreau a failli l’avoir, mais c’est Catherine Deneuve qui l’a emporté ! Ils ont fait aussi, l’année dernière, les Gérard de la télé. Hilarant.
On peut les écouter sur www.paris-premiere.fr, en tapant « Gérard » dans la boîte de recherches.
On nous informe que les acteurs ayant participé au dernier film de Spielberg n’ont pas eu le droit de lire le scénario. Voilà que Spielberg se prend pour Fellini ! Il a encore du chemin à faire... Mais enfin, peu importe, nul n’est forcé de jouer dans un film du « plus grand réalisateur du monde », comme l’a qualifié ce benêt de Michel Denisot (il a confondu pognon et génie).
Ce qui est plus grave, c’est ceci : les acteurs qu’on a recrutés se sont engagés à ne rien dire de l’histoire que raconte le film. Elle doit donc être géniale. Or un acteur a enfreint la consigne, et a bavardé inconsidérément. Eh bien, non seulement son rôle a été coupé au montage, ce qui n’est pas excessif, mais surtout, Spielberg l’a fait mettre sur liste noire, et l’acteur en question ne trouvera plus jamais de travail à Hollywood !
Si c’est vrai, l’image de papa gâteau entretenue par tonton Steven en prend un sacré coup. Spielberg, homme « de gauche », remet à l’honneur les méthodes du maccarthysme. Après DiCaprio et Scorsese tournant une biographie d’Howard Hugues sans mentionner son racisme et son antisémitisme, elle est fraîche, la gauche hollywoodienne.
J’espère que Spielberg recevra la nationalité chinoise à titre honoraire, il la mérite.
Sur le même sujet que le film récent Deux sœurs pour un roi, ce feuilleton écrit par Michael Hirst et produit pour la chaîne de télé Showcase (celle qui produisait la version états-unienne de Queer as folk) est en cours de diffusion, et a remporté un grand succès. Mais avoir comparé sa qualité à celle de Rome (produit par HBO), comme l’ont fait quelques critiques, est un peu abusif, car l’œuvre souffre de quelques défauts.
D’abord, la musique est d’une grande lourdeur, et tout à fait ridicule dans les génériques, avec l’orchestre « soutenu » par une batterie qui a tout de la boîte à rythme pour discothèque : il eût mieux valu ne mettre rien, que d’y coller cette musique-là.
Ensuite, cela traîne en longueur. Il aura fallu quatorze épisodes pour arriver à la fausse couche d’Anne Boleyn, évènement qui, ôtant au souverain son dernier espoir d’avoir un fils, l’a éloignée d’Henry VIII.
Et puis, Jonathan Rhys Meyers est un peu trop beau pour jouer le roi. Certes, c’est un bon acteur (il était la vedette de Match point, de Woody Allen), mais on a l’impression d’une erreur de distribution – voir les portraits du vrai Henry VIII. Néanmoins, la pire erreur de distribution est dans le choix de l’actrice Natalie Dormer, qui, justement, joue Anne Boleyn : on a beaucoup de mal à croire qu’un roi ait pu perdre la tête – avant de lui faire perdre la sienne – pour cette petite boulotte pas vraiment attrayante. Heureusement, Sam Neill, en cardinal Wolsey, présent seulement dans la première saison (dix épisodes), est à la hauteur, ainsi que Jeremy Northam en Thomas More, et Maria Doyle Kennedy, impressionnante de dignité dans le rôle de la reine Catherine, répudiée par son royal époux parce qu’elle ne lui avait pas donné d’héritier mâle. À noter, aussi, dans le rôle de Charles Brandon, duc de Suffolk, un jeune acteur de vingt-cinq ans, très beau et très talentueux, Henry Cavill, dont je vous prédis qu’il ira loin. D’ailleurs, Woody Allen l’a déjà engagé pour un film encore sans titre qui ne sortira que l’année prochaine, et où lui-même jouera aussi. Cela nous changera, et agréablement, de Penélope Cruz.
Réalisé par Renny Harlin
Sorti au Canada (Festival de Toronto) le 11 septembre 2007
Sorti en Finlande le 18 janvier 2008
Sorti en France le 14 mai 2008
Lorsqu’une mort violente a eu lieu chez vous, les services publics vous débarrassent du cadavre, mais vous laissent le soin de nettoyer les lieux. Comme la tâche ne vous enthousiasme pas forcément, l’entreprise Steri-Clean, qui emploie Tom, se charge de tout briquer chez vous, à grand renfort de détergents et autres désinfectants.
C’est ainsi que Tom a remis à neuf le luxueux salon d’une villa des beaux quartiers. Hélas, la commande lui a été passée par téléphone, il ne sait pas que le crime n’a pas été découvert par la police, et que c’est l’assassin en personne qui, ayant enlevé le corps, l’a envoyé sur place en vue de faire disparaître toutes les traces de son crime !
S’ensuit une histoire très embrouillée, de laquelle il ressort, sans la moindre surprise, que l’assassin (que Tom s’est mis à rechercher quand il a compris qu’on s’était joué de lui) était en fait... le meilleur ami de Tom et le parrain de sa fille.
C’est l’application du vieux principe selon lequel l’assassin ne doit jamais être le maître d’hôtel qu’on a seulement vu annoncer « Madame est servie », mais au contraire un personnage essentiel et si possible proche de l’enquêteur. Parfois, c’est encore plus subtil : l’assassin est l’enquêteur lui-même ! Bien entendu, les spectateurs qui ne dorment pas ont tout compris longtemps avant la fin. Ils devinent aussi que le méchant va tenter de tuer son copain qui a découvert la vérité, et qu’il va être abattu juste à temps par l’enfant du type qu’il menace. Il existe une trentaine de films qui se terminent ainsi (par exemple Rivière sans retour).
Réalisé par Steven Spielberg
Titre original : Indiana Jones and the Kingdom of the Crystal Skull
Sorti en France (Festival de Cannes) le 18 mai 2008
Sorti en France le 21 mai 2008
Film qui ne sort qu’après-demain, et le lendemain seulement aux États-Unis. La suite, donc, du retour de la vengeance du professeur Henry Jones, dit « Indiana Jones » parce qu’avec « Massachussetts » c’était imprononçable. Dans l’épisode 3, il était accompagné par son père à présent décédé (Sean Connery) ; dans le présent épisode 4, c’est son fils, dont il ignorait jusqu’alors l’existence, Henry III dit Mutt, fan de moto et fort préoccupé de sa coiffure, comme Fonzie (joué par Shia LaBeouf, dont le nom est un gag à lui tout seul, cette orthographe ayant sans doute été choisie pour éviter toute confusion avec Frank Lebœuf). Le père, le fils… On peut déjà prédire que l’épidose 5 fera appel au Saint-Esprit (probablement incarné – le mot s’impose – par Arielle Dombasle, si les réseaux d’influence de BHL fonctionnent aussi bien que jusqu’ici).
Cette fois, on a fait un grand pas dans le temps et pour l’Humanité, puisque nous sommes en 1957, en pleine guerre froide. Au passage, on remarquera qu’il n’y avait aucune possibilité de caser des nazis dans cette histoire, à l’instar des épisodes 1 et 3, ce qui évite à Steven Spielberg, réalisateur, et à George Lucas, scénariste, d’encourir le reproche d’antinazisme primaire que l’on a pu entendre parfois du côté de Saint-Cloud. En revanche, les affreux communistes, qui nous manquaient tant à l’écran depuis 1989, sont de retour, et bienvenue camarades Popoff. En fait, on a plutôt affaire à une camarade Popova, prénommée Irina comme dans Alias, et que joue Cate Blanchett, pas celle de monsieur Seguin, mais l’autre : elle dirige les services secrets de l’empire soviétique, et elle est en concurrence avec Indy. Sans quoi, que ferait-il de son fouet ? (Mais non, ce n’est pas une remarque grossièrement sexiste ! Qu’allez-vous chercher là ?)
De retour également, la fille vue dans le premier épisode, Marion, celle qui tenait la vodka encore mieux que Christine Bravo, donc bravo. Outre Mutt déjà cité, il y a aussi le copain Mac (Ray Winstone), un peu traître puisque capitaliste donc vénal, et tout ce petit monde va aider Indy à chercher au Pérou un crâne de cristal mexicain, doté de pouvoirs surnaturels comme tous les gadgets des épisodes précédents, et c’est fou comme on baigne dans la rationalité avec tonton Steven. Or ils feraient bien de le trouver, ce crâne, car Indy s’est fait flanquer à la porte de son université, donc il est au chômage comme tout le monde, et l’argent se fait aussi rare que les bons films français. À quoi sert-il, ce crâne ? À rien, c’est le « McGuffin », comme disait Hithccock, le prétexte, l’équivalent des « documents » dans les films d’espionnage ou du « trésor » dans les films d’aventure ; il est convoité parce que le camp d’en face le convoite aussi, comme l’Arche dans l’épisode 1, les pierres magiques dans le 2, ou le Graal dans le 3.
Il y a enfin une bombe atomique (à laquelle Indy échappe en se cachant dans un frigo), des fourmis géantes et voraces, des singes, des marmottes (mais pas de raton-laveur), plusieurs poursuites que des critiques bien meilleurs que votre (très humble) serviteur qualifieront sans doute d’« époustouflantes », une soucoupe volante, des squelettes, des séismes, des inondations, le mariage d’Indiana Jones (si-si !), plus un dénouement ouvert, c’est-à-dire annonçant une suite, qui ne saurait tarder si on ne veut pas qu’Harrison Ford soit doublé très bientôt par un acteur numérique, lequel coûterait moins cher, du reste (ce brave Harrison exige vingt millions de dollars pour chaque film, et refuse de descendre au-dessous).
On se divertit beaucoup, et le film confirme ce qu’on sait depuis un quart de siècle : que Spielberg, bêtement qualifié de « plus grand réalisateur du monde » par Michel Denisot – le plus grand animateur de télé du monde –, n’est bon que dans le film d’action à multiples rebondissements, et qu’il ne restera rien d’autre de lui.
Réalisé par Arnaud Desplechin
Sorti en France (Festival de Cannes) le 16 mai 2008
Sorti en France le 21 mai 2008
Si j’étais Jean-Paul Grousset, le plus mauvais critique de cinéma du « Canard enchaîné » (il écrit sans se lasser le même article depuis plus de quatre décennies), je dirais sans doute que ce film d’Arnaud Desplechin est « un grand film dans le sens de la longueur » !
Ce n’est pas qu’Un conte de Noël soit franchement ennuyeux, mais il s’agit d’un « film choral », et comme tous les films choraux, la plupart des épisodes pourraient, à partir de la table de montage, tomber dans la corbeille à papier sans aucun dommage. Au lieu de cela, Desplechin, qui fait visiblement un film pour festival et n’a jamais été capable d’être concis, a gardé tout, enfournant de force dans un seul scénario la matière d’une demi-douzaine de films. S’il se ramasse à Cannes la Palme d’Or qu’il convoite tant, ce sera bien fait pour lui...
Inutile de tenter un résumé, ni d’examiner la mise en scène. Tout au plus, au rang des qualités du film, on peut dire que la musique, parfois, évoque lointainement Bernard Herrmann. En revanche, les critiques sont faciles à trouver, par exemple l’amateurisme occasionnel des dialogues, dus à Desplechin lui-même et à Emmanuel Bourdieu. J’avais déjà épinglé ce dernier, pour avoir décrit dans son film Les amitiés maléfiques un milieu dont visiblement il ne connaissait rien : l’armée française. Cette fois, on fait dire « Votre Honneur » à un avocat dans un tribunal français, bourde que commettent seulement les jeunes de banlieue traduits devant les flags et gavés de télé ! Il y a aussi ce prof de médecine qui parle de « pallier AU déficit » des globules blancs d’une malade, et cet acteur qui prononce le verbe argüer sans faire entendre le « u », preuve que le réalisateur ignore lui aussi la règle, sinon il lui aurait fait rectifier. Et dire que ces gens sont des littéraires...
Les acteurs, à part cela, sont bons, et on revoit avec plaisir le jeune Émile Berling, déjà remarqué dans Les hauts murs. Il joue ici le rôle de Paul, un jeune garçon de seize ans, mélancolique et fou. Il va faire une belle carrière. Mais enfin, le meilleur film de Desplechin reste La sentinelle, et cela remonte loin. Très loin...
Pour une fois, le festival de Cannes ne s’est pas ridiculisé. Bien que n’ayant pas vu son film Entre les murs (personne ne l’a vu), dès que j’ai su que Laurent Cantet était en compétition, j’ai pressenti qu’il aurait la Palme d’Or. Cantet est un grand cinéaste, qui laisse loin derrière lui tous ses confrères français.
Il semble que les autres films couronnés ne sont pas négligeables non plus.
Réalisé par Souad El-Bouhati
Sorti en France le 28 mai 2008
L’affiche inspire quelques craintes : non seulement le titre est en lettres tricolores, mais l’héroïne porte elle-même une chemise aux trois couleurs, et l’on se dit qu’on va avoir droit à une leçon de morale bien-pensante. Mais pas vraiment, et les réalisateurs (ici, une réalisatrice, Souad El-Bouhati, qui n’avait réalisé jusqu’ici qu’un court-métrage en 1999) ne sont pas responsables de l’affichage.
Le sujet est tout simple : la famille de Sofia est d’origine marocaine, mais elle-même est née en France et ne connaît rien d’autre. Lorsque le père est touché par le chômage, toute la famille se résigne à émigrer au Maroc, mais Sofia s’en désespère, comme d’un arrachement à son univers.
Pourtant, ce pseudo-retour se passe bien : on retrouve le père propriétaire d’une plantation d’oliviers, la famille vit dans une grande maison confortable, et Sofia, maintenant âgée d’une vingtaine d’années, continue ses études avec succès dans une école visiblement huppée. En outre, elle est aimée d’un beau garçon qui veut l’épouser.
Mais la condition féminine au Maroc étant ce qu’elle est, Sofia veut à tout prix retourner en France – son véritable pays. Son père consentira-t-il à lui rendre son passeport français ?
La fin de ce film sans heurts est une fausse piste : on pense que Sofia a réussi en rentrer en France, mais non, c’est à Casablanca qu’en fin de compte elle vit, apparemment mariée, heureuse et intégrée – comme le souhaitaient ses parents.
On aimerait adhérer au film, mais il est terriblement plat. L’actrice Hafsia Herzi est bonne, sauf dans une scène d’hystérie plutôt déplacée, où elle surjoue inutilement.
Réalisé par Michael Patrick King
Sorti au Royaume-Uni le 12 mai 2008
Sorti aux États-Unis le 27 mai 2008
Sorti en France le 28 mai 2008
Deux heures et vingt-huit minutes ! Cinq fois la durée d’un épisode de la série...
C’est surtout le budget des costumes qui a dû coûter cher. Heureusement, car il y a au moins quelque chose à regarder. Le scénario, lui, est très conventionnel, et on ne s’étonnera pas que, sur un film de cette longueur, on ait éprouvé le besoin de déverser une cataracte de sentimentalité. Le fil conducteur lui-même est fâcheusement centré sur le couple le plus antipathique de la série, une journaliste (qu’on ne voit jamais travailler) intoxiquée de mode, et un (plus très) jeune loup aux dents longues, qui, en France, certainement, aurait « fait » H.E.C., l’école des blaireaux n’ayant que le fric en ligne de mire.
Cela mis à part, aucune surprise, on sait que deux des trois couples en péril vont se reconstituer avant la fin. Même le dialogue a été furieusement édulcoré. Vous pouvez emmener votre grand-mère au cinéma.
Sites associés : Yves-André Samère a son bloc-notes films racontés
Dernière mise à jour de cette page le jeudi 1er janvier 1970.