JPM - Films vus - Notules - Mars 2009

Notules - Mars 2009

 

Plus courtes que les critiques, les notules traitent d’un ou plusieurs films, ou de sujets d’actualité en rapport avec le cinéma. Jusqu’en septembre 2004, elles provenaient de divers forums aujourd’hui disparus. Par la suite, elles s’en affranchissent et sont rédigées directement ici.

Œuvres citées (entre parenthèses, autre que des films) : The wrestler – Pi – Requiem for a dream – La vague – Die Welle – Pour un fils – Le retour de Martin Guerre – Last chance for loveLast chance HarveyHarvey MilkMilk – Elephant – Mala noche – Will Hunting – The mayor of Castro StreetLoin de la terre brûléeThe burning plainLe premier cercle – Jean-Philippe – L’enquêteThe international – Lord of war – La journée de la jupe – Ressources humaines – JCVD – The chaser – Chugyeogja – The host – Une famille brésilienneLinha de passe – Central do Brazil – Avril brisé – Diarios de motocicleta – Dark water – Une nuit à New York Nick and Norah’s infinite playlist – Raising Victor Vargas – Long way home

Personnes citées : Darren Aronofsky – Mickey Rourke – Dennis Gansel – Jean-Paul Sartre – George Bush jr – Alix De Maistre – Miou-Miou – Olivier Gourmet – Gus Van Sant – Robin Williams – Dan White – Josh Brolin – George W. Bush – Oliver Stone – George Moscone – Harvey Milk – Sean Penn – Anne Kronenberg – Alison Pill – Guillermo Arriaga – Alejandro González Iñárritu – Charlize Theron – J.D. Pardo – Jean Reno – Laurent Tuel – Johnny Hallyday – Robert de Niro – Matt Damon – Vahina Giocante – Sami Bouajila – Gaspard Ulliel – John Fitzgerald Kennedy – Clive Owen – Naomi Watts – Denis Robert –

Isabelle Adjani – Éric Neuhoff – Bruno Podalydès – Hong-jin Na – José Trajano – Juca Kfouri – Paulo Vinicius Coelho – João Palomino – Fernando Calazans – Marcio Guedes – Walter Salles – Daniela Thomas – Vinícius de Oliveira – Peter Lovett – Michael Cerax

The wrestler

Lundi 2 mars 2009

Réalisé par Darren Aronofsky

Sorti aux États-Unis le 8 décembre 2008

Sorti en France le 18 février 2009

Encore un film sur la rédemption par le sport. Le réalisateur Darren Aronofsky s’inspire de la vie réelle de son interprète Mickey Rourke. Rien d’inattendu, et le film n’aurait pas plus d’intérêt que tous ceux qui l’ont précédé, si, pour une fois, le procédé irritant de la caméra portée ne donnait à la réalisation un caractère de reportage sur les matches de catch, qui semblent assez réels et constituent les seuls temps forts de ce récit.

C’est peu, mais il faut s’en contenter. Le film passe presque pour un progrès, par rapport aux précédentes productions du même réalisateur, plus que décevant dans Pi, et calamiteux dans Requiem for a dream.

En bref : à voir à la rigueur.Haut de la page

La vague

Vu le vendredi 13 février 2009, sorti le mercredi 4 mars 2009

Réalisé par Dennis Gansel

Titre original : Die Welle

Sorti en Allemagne le 13 mars 2008

Sorti en France le 4 mars 2009

Film sorti partout début 2008, sauf en France ! Une classe de terminale, de nos jours en Allemagne. Le professeur (d’histoire, de philosophie ?) veut mettre ses élèves en garde contre le nazisme. Or ils en sont gavés depuis qu’ils vont à l’école, de mises en garde contre le nazisme. Alors il choisit un thème moins « connoté », l’autocratie. Ce mot une fois défini (le gouvernement d’un homme ou d’un groupe, qui impose ses lois à la collectivité), il propose une expérience : et si nous tentions pendant une semaine une mise en pratique dans la classe, via une sorte de jeu de rôle ? Trois garçons refusent et quittent le cours... mais deux reviendront très vite, car ils ne veulent pas rater leur bac !

Pour commencer, se choisir un chef. Ce sera le professeur, évidemment (il a du charisme et ses élèves l’admirent). Puis les jeunes devront l’appeler désormais « monsieur Wenger », et non plus « Rainer » comme ils en avaient l’habitude, et se lever pour parler... après en avoir demandé l’autorisation.

On devine – et on vérifie – que, de détails en détails, l’expérience va aller très loin. D’abord parce que les élèves, et surtout les moins favorisés, les moins populaires, les plus timides, les plus frustrés, vont trouver, dans la solidarité artificielle qu’on leur propose, à la fois un moyen de défense et une compensation à ces frustrations. Très vite, ils accepteront le port d’un uniforme (une chemise... blanche), se choisiront un emblème, un nom pour le groupe, « La Vague », inventeront une manière de saluer, et, bien entendu, excluront ceux qui ne pensent pas comme eux. Au passage, voyez le hasard, l’un des élèves réinvente le fameux slogan beaucoup entendu chez nous, « Ensemble tout est possible »...

Le professeur, malgré les avertissements de sa propre femme, mais approuvé – ce qui semble un peu gros – par la directrice de l’établissement, ne veut pas voir que cela va se terminer en catastrophe. En effet, le jour où il met fin à l’expérience en montrant qu’ils sont devenus prêts à tuer pour lui, un garçon mal dans sa peau donc particulièrement motivé refuse de croire à cette fin de ses rêves, et va jusqu’à tirer au pistolet sur un autre élève, avant de se suicider. Les autres élèves ont enfin compris où on voulait les amener : voir combien il serait facile, même dans un pays où les citoyens sont avertis, de faire renaître une nouvelle dictature. Mais le professeur a joué avec le feu, il a sur les bras un suicide et une tentative de meurtre, la police l’arrête.

Le film est réalisé avec soin, et les acteurs ont été choisis, peut-être un peu trop bien, pour que leur physique incarne leur mental : les très gentils sont très beaux, les moins gentils et les indécis sont banals, les méchants sont très laids ; c’est le système hollywoodien, bien que le film soit allemand. Mais que faut-il penser de la signification du film, adapté d’un roman, lui-même tiré d’un téléfilm, qui situait ces péripéties aux États-Unis et s’inspirait d’une expérience ayant réellement eu lieu en 1967 en Californie, expérience dont l’auteur n’a plus que des souvenirs assez... vagues, justement ? Ce serait une fable s’il en avait le style, mais ce n’est pas le cas. On est plutôt du côté du théâtre d’idées, à la manière de Sartre. Fort bien, mais est-ce convaincant ? Hélas, pas vraiment. Certes, des évènements analogues se sont vraiment déroulés sur une période aussi courte... mais aux États-Unis, où l’on n’a pas l’expérience de la dictature, et où la réélection – sans tricherie – de George Bush a montré que les citoyens de ce pays ne sont pas préparés à résister, pas même à anticiper le cours de cet genre d’évènements. En revanche, on a du mal à croire qu’en Allemagne, où justement tous les citoyens sont prévenus des dangers, les jeunes soient à ce point influençables ; et surtout si vite. Ainsi, dès le deuxième jour, après seulement deux heures de ce cours d’un genre nouveau, voir un jeune homme brûler tous ses vêtements de couleurs – et de grande marque, alors qu’à cet âge on en est obsédé – pour ne garder que sa chemise blanche, c’est un peu dur à gober. Ensuite, accumulation de détails du même ordre destinés à nourrir la démonstration. Hélas, le spectateur aura peut-être décroché...

Bref, c’est honorable dans les intentions, mais un peu trop démonstratif, encore une fois, plutôt lourdingue, et le dénouement est encore plus artificiel que le reste. Le vrai peut quelquefois n’être pas vraisemblable ! Mais il faut s’attendre que la presse bien-pensante, celle qui juge les intentions et non le résultat, encense le film.

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Pour un fils

Jeudi 5 mars 2009

Réalisé par Alix de Maistre

Sorti en France le 4 mars 2009

L’histoire classique du personnage qui a disparu et revient quelques années plus tard, mais suffisamment changé pour qu’il y ait un doute sur sa personnalité. L’archétype de ce genre de films, c’était Le retour de Martin Guerre, qui avait d’ailleurs fait l’objet d’un remake aux États-Unis. Et le point commun à ces films, c’est que le personnage est un imposteur. Ici, le spectateur le sait dès le début, car il a vu le garçon répéter son rôle, et se raser pour se débarrasser d’une barbe dure qu’on a rarement à quinze ans, puisqu’il en a vingt-deux. L’originalité, c’est que l’imposteur est une victime, sans doute de son père, une sorte d’ermite qui a probablement enlevé le véritable fils : sans cela, comment Matteo Pasquale – c’est le nom du fils prétendu – en saurait-il autant sur Tony, l’enfant de cinq ans disparu dix ans plus tôt ?

Ce qui a intéressé la réalisatrice Alix De Maistre, qui, après un court métrage et un téléfilm, signe ici son premier long métrage ? Sans doute le fait que la mère frustrée (incarnée par Miou-Miou) et le garçon imposteur vont s’attacher l’un à l’autre, échangeant un regard d’amour lorsque la police vient arrêter le second. C’est peu, là aussi, et pas très inattendu, mais il n’y a pas grand-chose d’autre.

Au fait, l’auteur devrait prendre quelques cours de français : presque tous ses personnages, y compris le policier que joue Olivier Gourmet, emploient l’expression « se rappeler DE quelque chose ». Jusqu’à quand devra-t-on subir ce charabia ?

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Last chance for love

Vendredi 6 mars 2009

Réalisé par Joel Hopkins

Titre original : Last chance Harvey

Sorti aux États-Unis le 25 décembre 2008

Sorti en France le 4 mars 2009

Emma Thompson joue une quinquagénaire, Kate, qui travaille à Londres et qui est harcelée par une mère envahissante. Résultat, pas d’homme dans sa vie. Dustin Hoffmann (Harvey), est un musicien sexagénaire et divorcé, qui fabrique aux États-Unis des jingles pour la pub, se trouve en perte de vitesse, sur le point d’être licencié, et qui vient à Londres assister au mariage de sa fille. Il tient si peu de place dans sa vie qu’on l’a logé dans un hôtel, seul, à l’écart des invités de la noce ; pour couronner le tout, fifille lui demande de laisser la place à son beau-père pour la conduire à l’autel.

Les deux exclus se rencontrent par hasard à l’aéroport d’Heathrow, et vont vivre un commencement d’histoire d’amour, d’ailleurs très chaste. Au bout du compte, sans doute, le bonheur.

Miracle, cette histoire dont le résumé semble nunuche n’est pas mièvre du tout. Ce qui domine, c’est le sourire. Ce miracle, qui défie les esprits forts, est signé Joel Hopkins, lequel en est à son troisième film (en dix ans ; il a trente-huit ans).

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Harvey Milk

Mercredi 11 mars 2009

Réalisé par Gus Van Sant

Titre original : Milk

Sorti aux États-Unis le 28 octobre 2008

Sorti en France le 4 mars 2009

Le véritable titre est Milk tout court, mais les distributeurs français, qui estiment sans doute que les spectateurs sont trop incultes pour ne pas confondre le film avec une pub pour du lait, ont préféré préciser, avec leur légèreté d’esprit habituelle.

Jamais je n’ai pris Gus Van Sant pour un maître du cinéma. Disons que c’est un petit maître, au sens le plus péjoratif du terme. Il se trouve pourtant que cet ancien cinéaste indépendant a su se faire sa place au soleil, surtout après sa Palme d’Or à Cannes pour Elephant, et le voilà quasiment au sommet. Tant mieux pour la communauté gay dont il est l’un des piliers artistiques. Ses films traitent fréquemment de thèmes homosexuels, dès son premier long métrage, tourné à 33 ans, Mala noche. Et précisons que le projet de ce film est antérieur à 1997, puisque le réalisateur s’était déjà intéressé à un scénario sur la vie de Milk avant de faire Will Hunting : cela devait s’intituler The mayor of Castro Street, et Robin Williams devait en être l’interprète principal.

Milk est une sorte d’aboutissement dans l’esprit militant, et retrace la dernière partie de la vie du premier homosexuel à se faire élire au conseil municipal d’une grande ville des États-Unis, en l’occurrence San Francisco. Mais Harvey Milk n’y est pas resté longtemps, il s’est fait assassiner par un de ses collègues, Dan White (joué par Josh Brolin, qui interprétait George W. Bush dans le film d’Oliver Stone !). Il ne s’agissait probablement pas d’un crime homophobe, puisque le meurtrier venait, quelques minutes auparavant, de tuer le maire George Moscone parce qu’il refusait de le réintégrer après sa démission de l’équipe municipale – et qu’il avait avec Milk des relations agitées ; un malade mental, de toute évidence, qui s’est suicidé deux ans après sa sortie de prison, où il venait de tirer cinq ans pour ce meurtre. Le film laisse clairement entendre que ce père de famille très convenable était en fait un homosexuel honteux.

Milk joue la carte de l’identification du spectateur avec le personnage central, et le scénario force beaucoup sur les sentiments ; si bien que toute la sympathie est acquise aux gays, tandis que toute l’aversion éprouvée à la vision du film se porte sur les homophobes, au premier rang desquels la sinistre Anita Bryant, une chanteuse qui n’avait que la Bible et la sacro-sainte protection de la famille en guise d’argument (soit dit en passant, jamais ces cinglés n’ont expliqué en quoi les homosexuels « menaçaient » la famille !). Hélas, le tout est sans surprise, et s’apparente à une biographie banale. Bref, la vie réelle de Milk est intéressante, le film ne l’est pas vraiment. La réalisation est correcte, elle n’a pas dû être facile à cause des scènes de foule, ce qui ne l’empêche pas d’être parfois paresseuse : les images d’archives, tournées au format 4/3, ont souvent été insérées sans être recadrées, et les personnages sont ainsi étirés en largeur par l’anamorphose, comme sur les téléviseurs mal réglés. La post-production a donc été bâclée.

Sean Penn est très bien, et il y a quelques autres acteurs masculins qui ne manquent pas d’attraits. Une seule fille, en revanche, Anne Kronenberg, la lesbienne du mouvement, jouée par Alison Pill.

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Loin de la terre brûlée

Jeudi 12 mars 2009

Réalisé par Guillermo Arriaga

Titre original : The burning plain

Sorti en Italie (Festival de Venise) le 29 août 2008

Sorti en France le 11 mars 2009

Tout commence avec l’explosion et l’incendie d’une caravane, loin de tout. À l’intérieur, un couple illégitime. Il va s’agir pour le spectateur de deviner qui a fait sauter la caravane et tué les deux occupants. À vrai dire, ce n’est pas bien difficile. Alors, pour compliquer un peu le récit, Guillermo Arriaga, romancier connu, scénariste habituel d’Alejandro González Iñárritu, procède comme d’habitude, il raconte son histoire dans le désordre, sur trois moments différents. À charge pour le spectateur de reconstituer le puzzle pendant la projection.

J’ai déjà dit tout le mal que je pensais de cette manière très artificielle de raconter, qui est illégitime la plupart du temps, et ne sert qu’à masquer la pauvreté des péripéties.

On ne retient de tout cela que le charme de Charlize Theron, d’ailleurs productrice du film, et de son partenaire, interprète du jeune Santiago, le seul personnage qui n’a rien à se reprocher, J.D. Pardo (« J.D. » pour Jorge Daniel), lequel possède une beauté remarquable.

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Le premier cercle

Vendredi 13 mars 2009

Réalisé par Laurent Tuel

Sorti en France le 4 mars 2009

Il aura fallu attendre mars pour découvrir ce qui sera sans doute le film le plus bête de l’année. Cocorico ! il est français.

D’abord, évacuons, comme disent les critiques, la question du titre : il ne veut strictement rien dire.

Malgré la présence de Jean Reno en vedette, on va voir ce film de Laurent Tuel (quatrième long-métrage), parce qu’il avait plutôt réussi son précédent, Jean-Philippe, sur Johnny Hallyday. Déception, c’est ahurissant de niaiserie.

Le générique ouvre sur des images du génocide arménien commis par les Turcs en 1915, puis on nous dit que la famille de gangsters qu’on va voir est une famille arménienne émigrée en France. Mais ensuite, ce détail n’est plus du tout utilisé. Il ne sert donc à rien, ce n’était qu’un enjolivement. Un alibi culturel destiné à la pub du film ? On pourrait le croire, quand on a vu Jean Reno, qui n’a certainement pas trouvé ça tout seul, se répandre sur les plateaux de télévision pour parler d’un film « sur l’exil ». Ces déclarations répétées et prétentieuses ne sont qu’une imposture, on a un banal film de truands, affecté en outre d’un scénario mal fichu où il n’est à aucun moment question d’exil.

Scénario, donc : Jean Reno est le patriarche d’une famille qui vit de trafics divers, comme le vol et la revente de voitures volées. Son fils Anton travaille sous ses ordres, avec quelques comparses. Mais un « gros coup » se prépare, comme dans tout film de gangsters qui se respecte. Il se trouve que cet Anton en a marre de cette vie et veut redevenir honnête, pour exploiter un hôtel en Camargue avec la petite infirmière dont il est amoureux. Mais, sans qu’on sache pourquoi, son père juge que la fille est « dangereuse parce qu’elle pourrait les trahir » (et pas une autre fille ?), donc son fils doit rompre. Mais fiston ne veut pas, alors le cher père, plutôt radical, essaie de faire abattre la fille par un sous-fifre : il a dû voir le film de Robert de Niro dans lequel Matt Damon, second de la CIA, faisait la même chose avec la petite amie de son fils ; plagiat manifeste, donc, d’un film à succès. Or c’est le fils qui abat le sous-fifre, avant de déclarer à son père qu’il le quittera après le « gros coup » en préparation. Normal, sa part doit se monter à cinq millions d’euros, et même un garçon tenté par le Bien vendrait son âme à Méphisto pour ce prix-là. Puis le « gros coup », dont ne ne sait toujours rien, a lieu sur un aéroport (on n’en voit guère qu’une fusillade sous l’aile d’un avion), Anton est blessé et va mourir quelques minutes plus tard, sans qu’on sache si le « gros coup » a réussi ou pas. Quelques mois plus tard, l’infirmière accouche, et le père, qui a tout de même tenté de la faire assassiner, va la voir à l’hôpital en se faisant passer pour son père à elle. Fin.

Une scène montre à quel point le scénario est incohérent : la police n’a aucune preuve contre la famille. Or, au cours d’une séquence sur les quais d’un port, le père, avec sa voiture, en plein jour et devant témoins, essaie de pousser dans la mer celle du commissaire, puis il tire sur un autre policier et le blesse ! Ce faisant, il fournit à la police une masse de motifs d’inculpation... Même Henri Verneuil, autre Arménien, au temps où il fabriquait des films qui prenaient les spectateurs pour des demeurés, n’aurait jamais filmé une scène aussi saugrenue. La scène de l’hôpital visée plus haut n’est pas plus crédible : ce gangster n’est donc pas recherché ? Oh pardon ! On nous a expliqué plus tôt que la police était très occupée avec les machines à sous de la Côte, et qu’elle n’avait plus de temps à consacrer aux affaires de grand banditisme.

Voilà où en est le cinéma français. On est un peu navré de voir des acteurs comme Vahina Giocante, Sami Bouajila et Gaspard Ulliel perdre leur temps et leur réputation dans cette galère. Pour Jean Reno, sans commentaires.

En bref : inutile de se déranger.Haut de la page

L’enquête - The international

Mercredi 18 mars 2009

Réalisé par Tom Tykwer

Titre original : The international

Sorti en Allemagne (Festival de Berlin) le 5 février 2009

Sorti en France le 11 mars 2009

Titre original, The international. Un enquêteur évidemment états-unien et intègre a dans son collimateur une banque, IBBC, installée au Luxembourg (tiens-tiens !), et dont la spécialité est le blanchiment d’argent sale, argent lié au trafic d’armes que dirigent, non pas d’horribles trafiquants comme dans Lord of war, mais les gouvernements eux-mêmes, y compris celui des États-Unis. Il y aura des tas de gens tués, notamment à Milan, où un homme politique sert de cible dans un complot qui rappelle fort la mort de Kennedy à Dallas, avec balle perdue, tireurs multiples, et l’un d’eux abattu immédiatement après l’attentat ; une fusillade très longue dans le musée Guggenheim de New York, qui le laisse quasiment à l’état de ruines fumantes (à quand la même chose au Centre Pompidou, histoire de nous en débarrasser ?) ; et une ultime exécution d’un traître sur les toits d’Istanbul. Autant dire que le spectateur voyage.

Comme toujours dans ce genre de films, c’est plein de bonnes intentions. En supplément, il faut que le public s’identifie au héros, et pour cela, ledit héros DOIT être un beau garçon viril – accessoirement, une jolie fille. Ici, quelle chance, on a les deux, Clive Owen et Naomi Watts. Si l’on mettait en scène un type aussi quelconque que Denis Robert, vous pensez bien que personne n’irait le voir. Et le héros va jusqu’au bout, quoi qu’il lui en coûte ! On ne va pas montrer un gars trop naïf que les banques écrasent sous les procès, qui collectionne les condamnations qu’évidemment il ne peut pas payer, qui substitue à ses livres-enquêtes des romans ou des bandes dessinées que le public n’achète pas car l’auteur n’a aucun don pour ce genre de littérature, et qui, lassé, ruiné, finit par renoncer complètement pour avoir la paix. Ça, ce n’est pas vendeur, coco !

Le film est bien photographié, la caméra est bien placée, les villes (Berlin, Luxembourg, Milan, New York, Istanbul) sont belles, et vous ne vous ferez pas une entorse au cerveau. Et puis, ce type de films va sûrement faire tomber le capitalisme.

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La journée de la jupe

Jeudi 19 mars 2009

Réalisé par Jean-Paul Lilienfeld

Sorti en France (sur Arte) le 19 mars 2009

Sorti en France (en salles) le 25 mars 2009

Si on avait voulu écarter les spectateurs, on n’aurait pas mieux fait que de choisir ce titre idiot. Le film, réalisé pour le cinéma, a été vu en avant-première à la télévision, sur Arte. Ce procédé n’a pas nui à Ressources humaines, mais il pourrait nuire à La journée de la jupe, film modeste, tourné avec peu de moyens et dans la discrétion la plus totale, puisque aucun journal n’en a parlé pendant le tournage. Pourtant, il marquait le retour d’Isabelle Adjani au cinéma.

La belle Isabelle joue donc le rôle d’un professeur de collège, qui exerce dans un établissement « difficile », comme on dit. Elle passe, auprès de ses crétins d’élèves, pour raciste, parce qu’elle ne tolère pas les manifestations de machisme de certains, qui n’ont à la bouche que le mot de respect (on connaît l’expression « total respect », qui ne désigne que celui qu’on doit avoir envers ceux qui l’emploient), ce qui prouve évidemment qu’elle est hostile à l’islam ! Or ses élèves ignorent que Sonia Bergerac, en fait, est arabe, mais refuse d’en faire état pour se les concilier.

Un jour, elle découvre qu’un de ces voyous s’est permis d’apporter en classe un pistolet – pas un revolver, comme l’écrivent certains ignares, tel Éric Neuhoff. Elle confisque l’arme, geste qui va être le début d’une prise d’otages. Mais, paradoxalement, ici, c’est le professeur qui prend toute sa classe en otage ! Il y aura un quiproquo (la police croit qu’elle est l’otage et le porte-parole, comme dans JCVD) et des retournements de situation, l’arme passant entre les mains d’une fille de la classe, puis revenant à Sonia, laquelle, finalement, est abattue par la police.

Si le dialogue est très bon et pourrait être repris au théâtre, si la vedette est excellente, et si enfin on peut voir un film français qui a quelque chose à dire, face à un cinéma national d’une abyssale platitude (si j’ose cette expression hardie), et le dit avec force, on doit avouer que la scène finale fiche le film par terre : les élèves, y compris les plus antipathiques et les plus hostiles, assistent aux obsèques de la malheureuse et jettent une fleur sur sa tombe. On n’y croit pas un demi-seconde. Et puis, ce cliché qui a traîné dans tous les feuilletons, aussi bien à Hollywood que chez nous, ce policier du RAID, incarné par Bruno Podalydès, qui a des ennuis avec sa femme : comment peut-on encore inclure dans un scénario un truc aussi plat et usé ?

En bref : à voir.Haut de la page

The chaser

Vendredi 20 mars 2009

Réalisé par Hong-jin Na

Titre original : Chugyeogja

Sorti en Corée du Sud le 14 février 2008

Sorti en France le 18 mars 2009

Premier film de Hong-jin Na, coréen, 34 ans, également scénariste. Si beaucoup de critiques ont salivé à l’excès devant ce film comme ils l’avaient fait devant le très moyen The host (parce qu’il n’est pas français ?), « Le Canard enchaîné », lui, le classe dans sa rubrique « Qu’on peut ne pas voir », parce que le rédacteur y a vu des « scènes gore d’un lourdingue achevé ». Non, il a mal vu, toutes les scènes sanglantes ont lieu hors champ, la caméra n’en filme rien. En fait, ce film tend à changer de catégorie chez moi au fur et à mesure qu’il avance, passant de « À voir » à la catégorie immédiatement inférieure ! Pour deux raisons.

D’abord, le scénario sollicite un peu trop l’indulgence du spectateur : un policier devenu proxénète mène l’enquête, car ses prostituées disparaissent une à une. Il trouve assez vite le responsable, un jeune tueur en série, mais par un hasard insensé, à la suite d’un accident de la circulation. Malheureusement, la police officielle s’en mêle. Elle ramasse tout le monde, le laisse tabasser l’assassin et lui permet de partir sans retenir contre lui ses nouvelles activités professionnelles. Ils ne sont pas curieux, dans la police, à Séoul... Plus tard, un ponte de la police fait libérer l’assassin (qui a tout de même avoué douze assassinats avec dépeçage des victimes !), le déclarant innocent, sous le prétexte que quelqu’un, qui n’est d’ailleurs plus de la maison, l’a frappé dans les locaux du commissariat ! Essayez de transposer la situation en France, et parlez-en aux journaux, par exemple à « Libération ». À qui veut-on faire que la police coréenne est aussi bête que dans ce film ? Enfin, l’assassin a laissé chez lui une fille à laquelle il a défoncé le crâne avec un marteau et un ciseau ; or elle s’en tire et s’échappe, puis va se réfugier dans une boutique. Le temps que la boutiquière appelle la police, l’assassin arrive précisément à cet endroit, toujours par le plus grand des hasards, et tue la fille et la boutiquière, avant d’être surpris par la police, arrivée opportunément à ce moment. Mais il s’échappe à son tour – encore l’incompétence des policiers coréens vus par le cinéma –, et sera retrouvé chez lui par le proxénète. Ils se battent à coups de clubs de golf et autres objets, et cette fois, l’ancien policier a le dessus. Ouf !

L’autre inconvénient de ce film, c’est qu’il est beaucoup trop long, deux heures et cinq minutes, et que la lassitude vient vite face à cette avalanche de péripéties rien moins que probables. Alors oui, le film est très bien réalisé, il déploie une énergie qui mérite un coup de chapeau plutôt qu’un coup de marteau, mais le réalisateur devrait engager un scénariste expérimenté.

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Une famille brésilienne

Lundi 23 mars 2009

Réalisé par Walter Salles et Daniela Thomas

Titre original : Linha de passe

Sorti en France (Festival de Cannes) le 17 mai 2008

Sorti au Brésil le 5 septembre 2008

 

Véritable titre, Linha de passe, qui est difficile à traduire. Aucun problème pour linha, qui signifie ligne ou frontière, mais passe est ambigu, car ce mot peut concerner aussi bien le football, comme en français, que les transports, et il désigne alors un billet valable sans restriction, telle chez nous la carte orange. Pour ne rien simplifier, c’est enfin le nom d’une table ronde de la télévision brésilienne consacrée au football (commentateurs : José Trajano, Juca Kfouri, Paulo Vinicius Coelho, João Palomino, Fernando Calazans et Marcio Guedes – et vous en trouverez, des sites sur le cinéma qui vous donnent toutes ces précisions !). Bref, on n’est guère avancé, mais l’ambigüité est sans doute voulue...

En tout cas, c’est un film de Walter Salles et Daniela Thomas, tourné à Sao Paulo, la plus grosse ville du Brésil, avec des acteurs inconnus chez nous, à l’exception de l’enfant qui jouait déjà dans Central do Brazil, Vinícius de Oliveira, qui a beaucoup grandi et joue le frère footballeur. Cleuza, quinquagénaire, élève seule ses quatre fils, de quatre pères différents et dont aucun n’est présent. Comme elle dit, elle leur sert à la fois de père et de mère, et la situation ne va pas s’améliorer, puisqu’elle en attend un cinquième. Les fils sont très divers : un pompiste obsédé par Jésus, un amateur de football qui pourrait être sélectionné mais n’a pas les moyens de graisser les pattes qu’il faut, un voleur à la tire, et un enfant qui ne rêve que de conduire des bus (il en vole un à la fin du film) et de retrouver son père, une préoccupation que les autres n’ont pas.

Walter Salles est plutôt dédaigné par nos aimables critiques professionnels. J’avais beaucoup aimé Central do Brasil et Avril brisé, un peu moins son Diarios de motocicleta sur le contestable Ernesto Guevara, et guère son remake de film d’horreur japonais, Dark water. Mais Linha de passe est un retour aux sources et ne quitte pas le Brésil, tant mieux. Cela dit, le film est moyen, il évite certes la plupart des poncifs, mais aligne les épisodes sans rapport les uns avec les autres, et n’a aucune conclusion. On doit donc le voir plutôt comme une sorte de reportage sur le Brésil d’aujourd’hui, qui n’est pas dans le meilleur état possible.

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Une nuit à New York

Mercredi 25 mars 2009

Réalisé par Peter Sollett

Titre original : Nick and Norah’s infinite playlist

Sorti au Canada (Festival de Toronto) le 6 septembre 2008

Sorti en France le 18 mars 2008

Le titre original indique qu’il va être question de musique, ou du moins, de ce que les djeunz appellent ainsi.

On va voir ce film parce qu’on a aimé le précédent de Peter Lovett, Raising Victor Vargas (bêtement rebaptisé Long way home), en 2002. Mais celui-ci est un ou deux tons au-dessous, et n’a aucune ambition sociale comme le précédent. On y va peut-être aussi parce que l’interprète principal, Michal Cera, a une bonne bouille et qu’il va être une grande vedette : à vingt ans, le jeune prodige a déjà quarante films ou téléfilms derrière lui, sans que le public connaisse son nom. Ça viendra.

Bref, Nick joue dans un groupe amateur uniquement composé de gays, sauf lui : « Être hétéro, c’est l’horreur », dit-il, parce que la belle Tris l’a jeté. Mais un soir, le seul soir du film – qui se joue en une nuit entière –, une autre fille, Norah, venue sans mec, la supplie de feindre d’être son accompagnateur et l’embrasse en public pour rendre jalouse ses bonnes copines, dont précisément Tris ! Ça marche, Tris est jalouse. C’est le point de départ d’une assez folle cavalcade dans tout New York, principalement à bord du tacot de Nick, « la seule Yugo du pays », que tout le monde prend pour un taxi parce qu’elle est peinte en jaune !

À la fin, évidemment, Norah et Nick ont trouvé l’amour.

C’est assez insignifiant, mais sympathique, et l’on ne s’ennuie pas.

En bref : à voir à la rigueur.Haut de la page

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Dernière mise à jour de cette page le jeudi 1er janvier 1970.