JPM - Films vus - Notules -  Janvier 2010

Notules - Janvier 2010

 

Plus courtes que les critiques, les notules traitent d’un ou plusieurs films, ou de sujets d’actualité en rapport avec le cinéma. Jusqu’en septembre 2004, elles provenaient de divers forums aujourd’hui disparus. Par la suite, elles s’en affranchissent et sont rédigées directement ici.

Œuvres citées (en italiques, autre que des films) : L’étranger – La propositionThe propositionLa routeLa merditude des chosesDe helaasheid der dingenGiganticMax et les maximonstresWhere the wild things are – Dans la peau de John Malkovich – Just another love storyKærlighed på filmEstherOrphan – House of wax – Le village des damnés (1960) – AgoraBright star – The piano – La leçon de piano – Le parfum – Une petite zone de turbulences – Vive la bombe ! – La dame de trèfleLa terre de la folie – Complices – Citizen Kane – The hearts of age – Too much Johnson – City Island – Invictus – Million dollar baby – Gran Torino – Marnie – Quintet – Océans – In the airUp in the air – Up – Là-haut

Personnes citées : Luchino Visconti – Albert Camus – Marcello Mastrioanni – Anna Karina – John Hillcoat – John Ford – Felix Van Groeningen – Matt Aselton – Paul Dano – Spike Jonze – Ole Bornedal – Jaume Collet-Serra – Alejandro Amenábar – Rachel Weisz – Michel Lonsdale – Max Minghella – Anthony Minghella – Jane Campion – Francis Bouygues – Jeanne Moreau – John Keats – Ben Whishaw – Thomas Sangster – Alfred Lot – Michel Blanc – Cyril Descours – Jean-Pierre Sinapi – Jérôme Bonnell – Luc Moullet – François Truffaut – Claude Chabrol – Éric Rohmer – Emmanuelle Devos – Gilbert Melki – Émile Laugérias – Robert Altman – Orson Welles – Luchino Visconti – Jean Renoir – Federico Fellini – Roberto Rossellini – Alfred Hitchcock – Ingmar Bergman – Francis Cabrel – Marlon Brando – Martin Scorsese – Robert DeNiro – Clint Eastwood – Nelson Mandela – François Pienaar – Scott Eastwood – Grace Kelly – Rainier III de Monaco – Alfred Hitchcock – Alan Ladd jr – Alan Ladd sr – Robert Altman – Paul Newman – Vittorio Gassman – Fernando Rey – Bibi Andersson – Brigitte Fossey – Jacques Perrin – Jacques Cluzaud – Albert de Monaco – Liliane Bettencourt – Françoise Bettencourt – Jason Reitman – George Clooney – Ryan Bingham – Bingham Ray – Vera Farmiga

On a retrouvé L’étranger

Lundi 4 janvier 2010

L’un des rares films franchement ratés de Visconti fut L’étranger, d’après le roman d’Albert Camus. Raté, peut-être parce que trop fidèle à la lettre du livre. Aussi parce que, pour jouer deux Français d’Algérie, il avait choisi un Italien, Marcello Mastroianni, dans le rôle d’Arthur Meursault, et, pour incarner Marie Cardona, la Danoise Anna Karina : on ne croyait guère à ce personnage féminin...

Pourtant, Visconti avait tenu à l’authenticité, au point d’aller faire son film sur place, dans la ville d’Alger ainsi que sur la plage de Sidi-Ferruch, et où avait lieu le meurtre de l’Arabe par le narrateur. Or l’indépendance de l’Algérie avait modifié la physionomie de la ville, et le film avait besoin d’un décor « d’époque » – celle de la colonisation. Les décorateurs du film avaient donc eu pour tâche de rendre aux lieux leur aspect d’antan, et, notamment, de remettre en place les plaques des rues, qui entretemps avaient été arabisées. C’est ainsi qu’ils tombèrent sur une « rue Anatole-Algérie », laquelle n’était autre que l’ancienne rue Anatole-France, rebaptisée par des rénovateurs cultivés qui avaient fait un peu de zèle...

Le film qui résulta de ce tournage n’a eu aucun succès, il quitta très vite l’affiche, et disparut d’autant mieux que toutes les copies furent perdues. Eh oui, il existe des gens capables de PERDRE un film de Visconti. Les coups de pied aux fesses, aussi, parfois se perdent. Or on vient d’apprendre qu’une de ces copies a été retrouvée récemment. Il a été possible de la contretyper pour en tirer cinq copies supplémentaires, de sorte que le film va ressortir. Il n’aura sans doute pas davantage de succès qu’en 1967, mais on ira le voir.

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La proposition

Lundi 4 janvier 2010

Réalisé par John Hillcoat

Titre original : The proposition

Sorti en France (Festival de Cannes) le 11 mai 2005

Sorti en Australie le 24 septembre 2005 et en France le 16 décembre 2009

Ce film, qui a plus de quatre ans, ne sort qu’à présent, et dans seulement vingt salles pour toute la France, dont trois à Paris. L’Australien John Hillcoat tourne peu : celui-ci n’est que son cinquième (dont un en vidéo) en vingt ans. Il vient de se faire connaître en adaptant La route, d’après le célèbre roman, un film qu’il est inutile d’aller voir, car ce livre ne relève pas du cinéma, et sa tentative de le porter à l’écran est notoirement ratée.

Or La proposition est au contraire tout à fait réussie, et on peut s’étonner qu’après avoir été présenté au festival de Cannes en 2005, le film ne sorte que maintenant ! C’est une sorte de western australien, en beaucoup plus chaud – littéralement – qui se déroule à la fin du dix-neuvième siècle. Quatre brigands, les frères Burns, ont attaqué et massacré une famille, les Hopkins, et tué tout le monde après avoir violé la femme, qui était enceinte. Le capitaine Stanley, chargé de rétablir l’ordre dans la région, a réussi à en capturer deux, Charlie, le moins sanguinaire, et Mikey, le plus jeune, violeur demeuré. Samuel le dingue et Arthur le sanguinaire se sont échappés. Stanley veut surtout capturer et tuer ce dernier, extrêmement dangereux. Il fait à Charlie une proposition : je te relâche, tu retrouves Arthur et tu l’exécutes. Si tu ne l’as pas fait avant neuf jours (ce sera Noël), je fais pendre Mikey, que tu aimes tant ; dans le cas contraire, je libère Mikey et je passe l’éponge sur toi.

Charlie retrouve Arthur et Samuel, mais ne les tue pas. Déguisés en soldats et feignant de conduire un prisonnier aborigène à la prison (c’est un complice), ils investissent l’endroit, massacrent plusieurs gardes, blessent le capitaine, et Samuel commence à violer sa femme. Conscient enfin qu’il n’y a rien à espérer de ses frères, Charlie tue Samuel et tire deux balles dans le ventre d’Arthur. Il épargne le capitaine Stanley et va rejoindre Arthur, qui agonise dehors.

Le film est violent, bien sûr, mais cette violence est maîtrisée, et la mise en scène restitue parfaitement l’atmosphère de cette société primitive. On est aussi loin du western traditionnel que du western italien. Il aurait peut-être fallu quelques Australiens à la grande époque du genre. Mais John Ford n’aurait pas aimé.

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La merditude des choses

Mardi 5 janvier 2010

Réalisé par Felix Van Groeningen

Titre original : De helaasheid der dingen

Sorti en France (Festival de Cannes) le 16 mai 2009

Sorti en Belgique le 7 octobre 2009, et en France le 30 décembre 2009

En dépit de ses 108 minutes, ce film semble très long, parce que son contenu est pauvre en péripéties captivantes, qu’il est plutôt répétitif, et parce que sa construction n’a aucune logique, si bien qu’aucune progression n’existe. Le sujet ? Un jeune garçon de treize ans, Gunther, vit dans une famille de ploucs flamands, avec son père et ses oncles. Seule sa grand-mère a les pieds sur terre et lui sert de mère, la vraie, sans cesse qualifiée de « pute », n’ayant pas la cote dans ce milieu machiste. L’idéal de tous ces hommes : bière de la bière (concours de saoulographie au programme), chanter des chansons paillardes, et s’envoyer des nanas, debout, sur le parking d’une quelconque boîte de nuit.

Gunther s’en sortira par l’écriture, après avoir mis une fille enceinte, que d’ailleurs il abandonne parce qu’il n’a pas la fibre paternelle. Le film se veut porteur d’une profonde humanité, mais, assez repoussant, il émeut si peu que le but est manqué.

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Gigantic

Mercredi 6 janvier 2010

Réalisé par Matt Aselton

Sorti au Canada (Festival de Toronto) le 8 septembre 2008

Sorti en France le 6 janvier 2010

On croirait presque à un de ces films fabriqués spécialement pour être présentés au festival de Sundance, la Mecque des productions du cinéma « indépendant » et politiquement correct. Mais non, c’est en fait un petit film conçu pour donner enfin la vedette à Paul Dano, jeune acteur qui a gagné ses galons en interprétant le frère daltonien dans Little miss Sunshine, et surtout le prédicateur escroc dans There will be blood. Il est d’ailleurs producteur exécutif. Or, ici, on le croirait léthargique de bout en bout...

Dano joue donc Brian, un vendeur de matelas, âgé de 29 ans et célibataire, qui rêve depuis son enfance d’adopter un bébé chinois. Les scènes absurdes se succèdent dans des décors lugubres, ponctuées de répliques saugrenues, comme celle-ci, après une dispute d’amoureux : « Si tu as besoin d’un transfo, j’en ai un, je l’ai eu en France à 18 ans ». Du rien plaqué sur du vide.

Le film se termine par le poignardage d’un clochard qui harcelait et tabassait Brian depuis le début, sans qu’on sache jamais pour quelle raison.

Le titre ne se justifie en aucune façon. Il doit être là par antiphrase.

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Où vont les recettes ?

Mercredi 6 janvier 2010

Lorsque vous êtes un spectateur payant, c’est-à-dire que vous n’êtes ni journaliste ni titulaire d’une carte de fidélité, le prix du billet que vous payez est ainsi réparti : 5,5 % du prix va au fisc sous forme de TVA ; 10,73 %, à la TSA (taxe spéciale additionnelle, qui est reversée au Centre National du Cinéma, afin de financer les futurs films et de subventionner certains exploitants) ; 1,27 % va à la Sacem (la Société des Auteurs, Compositeurs et Éditeurs de Musique) ; et le reste, soit 82,5 %, se partage entre les exploitants de salles et les distributeurs de films.

Les premières semaines, la moitié de ce reste va au distributeur, tel que UGC, Gaumont ou MK2. Plus longtemps le film reste à l’affiche, plus la part de l’exploitant de salle augmente.

Si un film est classé comme interdit aux moins de 18 ans, la TSA monte à 16,08 % du prix du billet. C’est très rare. Et rappelons que les films X n’existent plus depuis 1996 (voir l’Entracte 18).

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Max et les maximonstres

Jeudi 7 janvier 2010

Réalisé par Spike Jonze

Titre original : Where the wild things are

Sorti aux États-Unis le 13 octobre 2009

Sorti en France le 16 décembre 2009

Max est un sale gosse d’une douzaine d’années. Parce que les copains de Claire, sa sœur aînée, ont sans le faire exprès détruit l’igloo qu’il avait construit dans la cour, il saccage la chambre de la sœur et fait à sa mère une vie de chien. Puis il fugue, monte dans une barque, et arrive dans une île peuplée de monstres de trois mètres de haut – bien que nous ne soyons pas sur Pandora –, plutôt laids, plutôt pas très malins, puisqu’ils le croient lorsqu’il leur raconte que, là d’où il vient, il est roi. Sans surprise, ils le prennent donc pour roi.

Ensuite, l’aventure n’est plus qu’agitation incohérente et péripéties brouillonnes, d’où il ressort que les monstres comprennent que l’enfant leur a menti. Il reprend sa barque et rentre à la maison, où sa mère, attendrie, lui donne de quoi manger. Fin du film.

Ce conte indigent est signé Spike Jonze, qui avait déjà fait la preuve, avec Dans la peau de John Malkovich, qu’on peut toujours compter sur lui pour filmer des histoires abracadabrantes et sans grand intérêt.

En bref : inutile de se déranger.Haut de la page

Just another love story

Vendredi 8 janvier 2010

Réalisé par Ole Bornedal

Titre original : Kærlighed på film

Sorti au Danemark le 24 août 2007

Sorti en France le 6 janvier 2010

Titre anglais injustifié : le vrai, en danois, signifie simplement « Film d’amour ».

Ce film, donc danois, commence de façon séduisante, par un quiproquo en forme de drame psychologique : la voiture de Jonas, un photographe de la police, tombe en panne sur la route, ce qui provoque un accident. La victime, Julia, est à l’hôpital dans le coma. Se sentant coupable, il veut aller prendre de ses nouvelles, mais doit se faire passer pour son petit ami afin d’avoir accès à sa chambre. Or, là, multiples complications : se trouve présente la famille au complet de la fille, qui revenait juste d’Asie, et il est pris pour le petit ami Sebastian, que personne n’a jamais vu. Au lieu de s’excuser et de se retirer, il s’enferre, et le voilà faisant quasiment partie de la famille. Pour ne rien arranger, lorsque Julia sort du coma, il s’avère qu’elle est amnésique et privée en grande partie de la vue, donc elle aussi le prend pour son petit ami, puisque tout le monde le lui dit. Or il est marié et père de famille...

La suite se perd hélas dans des complications très artificielles : alors que Julia est tombée enceinte pendant son hospitalisation, sans qu’on sache de qui, puis sortie de l’hôpital, le vrai petit ami, Sebastian, dont on croyait qu’il avait été abattu au Cambodge (il trafiquait de la drogue), réapparaît pour s’immiscer dans le faux couple Julia-Jonas... en se faisant passer pour Jonas ! Cela finit par le meurtre de Sebastian par Julia, puis Jonas est tué à son tour.

De toute évidence, l’histoire entend prouver qu’on n’échappe pas à une vie routinière et ennuyeuse en se réfugiant dans une vie reposant sur la fiction. Mais le côté très tarabiscoté du récit, qui en fait nettement trop, n’est compensé ni par la prise de vue, aux images sales et sinistres, ni par la musique. Les acteurs, tous inconnus en France, sont assez bons, en revanche.

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Esther

Lundi 11 janvier 2010

Réalisé par Jaume Collet-Serra

Titre original : Orphan

Sorti aux États-Unis le 21 juillet 2009

Sorti en France le 30 décembre 2009

Encore un Titre À La Con, pour la version distribuée en France du moins, et qui se borne à reprendre le nom (ici, supposé) du personnage principal. C’est d’autant plus bête que le titre original, qui signifie orpheline, est beaucoup plus proche du sujet.

C’est aussi le type de film qui me pose un problème quand je veux l’évaluer : le mettre dans la catégorie Inutile de se déranger, ou À voir ? Si l’on s’en tient à la valeur de ce qu’on a vu, aucun doute, le film est une daube infâme, ce qu’on regrette d’autant plus que le réalisateur, en 2005, avait sorti un autre film d’horreur plutôt réussi plastiquement, House of wax – l’histoire d’un musée de cire dont les mannequins étaient en réalité de véritables cadavres, recouverts de cire par un duo d’assassins. Ici, rien de si original, on exploite pour la centième fois le thème de l’enfant diabolique qui va tenter d’exterminer une famille entière. Quelques zozos ont d’ailleurs trouvé le moyen de rapprocher Esther de ce chef-d’œuvre qu’était Le village des damnés (chef-d’œuvre dans sa version de 1960, je ne parle pas du remake), mais il n’y a aucun rapport entre les deux histoires.

Pourquoi, dans ce cas, hésiter sur la catégorie où ranger le film ? Parce qu’il autorise une réflexion sur le cinéma ! Plus particulièrement, sur ce point intéressant : comment, à partir d’un scénario classique et pas plus mauvais qu’un autre, la mise en scène peut-elle aboutir à fabriquer un très mauvais film ? Et l’on retombe ainsi sur ce qui a été dénoncé ici à plusieurs reprises, l’utilisation grossière des procédés les plus éculés tendant à faire sursauter le spectateur, du genre irruption brusque et inattendue d’un objet quelconque dans le champ de la caméra, accompagné d’un vigoureux coup de cymbales ! Cette fois, même un cri d’enfant en train de jouer, poussé au volume maximal sur la bande son, devient un élément de film d’horreur. Tant de finesse laisse songeur...

Petite remarque en passant : l’un des quatre producteurs de ce film est Leonardo Dicaprio. Depuis qu’il a rencontré Scorsese, le cher Leo a perdu son flair.

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Agora

Mardi 12 janvier 2010

Réalisé par Alejandro Amenábar

Sorti aux États-Unis le 21 juillet 2009

Sorti en France le 6 janvier 2010

Après Jaume Collet-Serra hier, encore un réalisateur hispanophone qui se noie dans la sauce hollywoodienne. Pourtant, le sujet était assez beau, et le scénario recelait une audace rarement vue au cinéma : les chrétiens y sont présentés comme des fanatiques ne reculant pas devant les atrocités, puisque l’héroïne de cette histoire, la philosophe et astronome Hypathie, qui la première eut l’intuition que la course des astres suivait une trajectoire elliptique et non circulaire, est lapidée par eux.

Hélas, le film pèse des tonnes, et ses interprètes, hormis la vedette féminine Rachel Weisz (notre Michel Lonsdale a un petit rôle mais disparaît assez vite), ne sont pas brillants. Seules deux courtes scènes, réduites à quelques images, subsisteront dans les mémoires et justifient de voir le film : le plan où un jeune esclave (joué par Max Minghella, le fils du défunt réalisateur Anthony Minghella), amoureux sans espoir d’Hypathie, caresse doucement son pied pendant qu’elle dort ; et cette vue des pilleurs de la Bibliothèque d’Alexandrie, vus de très haut et en accéléré, ce qui les fait apparaître comme des cafards.

Pour le reste, abondance de décors numériques, et surtout, une effroyable musique sirupeuse, qui jamais ne s’arrête.

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Bright star

Jeudi 14 janvier 2010

Réalisé par Jane Campion

Sorti en France (Festival de Cannes) le 15 mai 2009

Sorti en France le 6 janvier 2010

Jane Campion « a la carte », c’est certain. Aussi, beaucoup se sont-ils étonnés qu’elle n’ait reçu aucune récompense lors du Festival de Cannes. Peut-être est-ce, tout simplement, parce que son film, tout beau qu’il est plastiquement, apparaît aussi plutôt statique, voire un peu rasoir. Mais il offre au moins cet avantage qu’on peut, lors de sa projection, aller aux toilettes, ou dormir cinq ou dix minutes sans perdre le fil au réveil : on n’aura manqué aucune péripétie !

De cette réalisatrice, je n’avais vu que le très lourd The piano (en français, La leçon de piano), l’un des films produits par Francis Bouygues lorsqu’il avait voulu se lancer dans le cinéma, sans y connaître quoi que ce soit. On connaît l’histoire : rencontrant Jeanne Moreau dans une réception, il lui demanda ce qu’elle faisait dans la vie ! Pauvre Jeanne, qui ne se prend pas pour la première starlette venue...

Bref, Jane Campion a produit une fois de plus un film ennuyeux, mais il est réalisé avec un soin extrême, beau à voir, et pour cela, il lui sera beaucoup pardonné. Mais si la poésie romantique vous laisse de glace, fuyez, car la moitié du dialogue n’est constituée que d’extraits des poèmes de Keats, le personnage central de ce drame.

Les acteurs aussi sont bons. La vedette est Ben Whishaw, qui jouait le rôle principal dans Le parfum. Il y a également Thomas Sangster, encore voué aux rôles d’enfants (il fêtait son dix-neuvième anniversaire le lendemain de la sortie du film à Cannes).

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Une petite zone de turbulences

Vendredi 15 janvier 2010

Réalisé par Alfred Lot

Sorti en France (Festival de la Réunion) le 3 novembre 2009

Sorti en France et en Belgique le 13 janvier 2010

Bonne comédie, adaptée par Michel Blanc à partir d’un roman anglais. Avec toutefois une formidable restriction, la scène de Grand Guignol au cours de laquelle le triste héros s’opère lui-même de ce qu’il pense être un mélanome, au moyen d’une paire de ciseaux. Non seulement on n’y croit pas (n’importe qui aurait consulté un second médecin après le diagnostic rassurant du premier), mais cette irruption du drame dans la comédie n’est pas du tout dans le ton.

Cyril Descours dans le rôle du fils attire l’attention. On l’avait vu, deux ans auparavant, dans Vive la bombe !, téléfilm de Jean-Pierre Sinapi, et il y était remarquable.

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La dame de trèfle

Lundi 18 janvier 2010

Réalisé par Jérôme Bonnell

Sorti en France (Festival de Sarlat) le 10 novembre 2009

Sorti en France et en Belgique le 13 janvier 2010

Comment décourager les spectateurs d’aller voir le film que vous réalisez ? C’est très simple !

Choisissez d’abord un sujet trivial (un jeune voyou, qui a commis un vol, tue acidentellement un complice qui lui réclame sa part, tente de mouiller l’amant de sa sœur, et le tue aussi), des personnages rebutants et des décors sordides.

Écrivez le dialogue le plus plat et le plus grossier possible.

Faites jouer le tout par des acteurs masculins pas rasés et des filles sans attrait et mal vêtues. Filmez entièrement de nuit, caméra à l’épaule et tout en gros plans.

Et c’est dans la poche ! Votre film fera au moins une semaine en exclusivité avant de finir dans un placard à balais, n’ayant pas couvert le quart de son financement. Qu’importe, puisque vous avez été rétribué par anticipation grâce au système bien français de l’avance sur recettes. Surtout si votre père travaille à Canal Plus et votre mère au Centre National du Cinéma, comme c’est le cas pour le réalisateur de ce film.

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La terre de la folie

Mardi 19 janvier 2010

Réalisé par Luc Moullet

Sorti en France (Festival de Cannes) le 20 mai 2009

Sorti en France le 13 janvier 2010

Luc Moullet, contemporain de la Nouvelle Vague, n’est jamais rentré dans le rang comme Truffaut ou Chabrol. Aussi a-t-il fait beaucoup moins de films, que le « grand » public ignore royalement. Il a aujourd’hui 73 ans, et l’on peut parier que, s’il décède, on parlera moins de lui que d’Éric Rohmer – qui a du reste joué dans un de ses courts métrages.

C’est que Moullet est tout à fait fou, et il le prouve avec ce pseudo-documentaire, primé au festival du film grolandais, où, en une succession de témoignages, il expose sa découverte : une région des Alpes du Sud (autrefois les Basses-Alpes, mais le politiquement correct a exigé qu’on la rebaptise), inscrite dans un pentagone qu’il délimite pour nous sur une carte Michelin, se distingue par le nombre impressionnant de crimes qui l’ont prise pour décor, crimes principalement dus à la folie, dit-il. Au passage, notons que l’affaire Dominici s’est bien déroulée dans la région. L’un des plus pittoresques concerne d’ailleurs sa propre famille : Célestin, un berger de vingt ans, illettré mais pieux, avait laissé paître sa chèvre dans le pré du maire ; le garde-champêtre ayant déplacé la chèvre pour la conduire dans le pré communal voisin, Célestin en rendit responsable le maire, et, en cinq minutes, tua à coups de pioche la femme du maire, puis le garde-champêtre, puis le maire lui-même !

Le film abonde en réflexions dont on se demande si elles relèvent de l’esprit pince-sans-rire du cinéaste... ou de son dérangement mental. Ainsi, d’un des innombrables assassins de son récit, il déclare que cet homme « n’était pas dangereux, car il ne pouvait tuer que les membres de sa propre famille ». On adhère pleinement à cette sage vision, cher Luc !

Le film s’achève par une controverse entre le cinéaste et une femme de la région, qui estime absurde le principe de son film et l’attribue plutôt à sa propre folie. Le générique de fin sur fond noir se déroule pendant que la dispute continue sur la bande son, laquelle s’achève... par un coup de fusil.

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Complices

Mercredi 20 janvier 2010

Réalisé par Frédéric Mermoud

Sorti en Suisse (Festival de Locarno) le 9 août 2009

Sorti en France le 20 janvier 2010

À Lyon, le cadavre de Vincent, 19 ans, est retrouvé dans le Rhône. Le garçon a été étranglé. Un tandem de policiers enquête, incarné par Emmanuelle Devos et Gilbert Melki.

De nombreux retours en arrière nous apprennent que Vincent se prostituait, principalement pour des clients masculins, qu’il a rencontré Rebecca, que les deux jeunes gens se sont aimés, puis que Vincent a entraîné Rebecca dans son petit commerce. Mais, ayant voulu fait chanter un client violent, il s’est fait tabasser par celui-ci, et Rebecca a tué le client. Peu après, Vincent a été étranglé par un ami, Thomas, amoureux de lui et jaloux.

L’épilogue est un peu difficile à gober : les deux policiers, qui ont tout découvert, maquillent les témoignages afin de coller le meurtre du client sur le dos de Vincent et sauver ainsi la mise à Rebecca, qui est enceinte. Ben voyons, la police française fait ça tous les jours, pour aider les jeunes...

Outre que le spectateur devine assez vite qui a tué Vincent et pourquoi – les regards brûlants que lui jette Thomas sont suffisamment éloquents –, le scénario n’est pas très solide. Ainsi, le personnage d’Émile Laugérias, qui joue le frère du policier, ne sert absolument à rien, sinon à montrer que le policier interprété par Gilbert Melki a aussi quelques ennuis avec sa famille, poncif qui traîne dans tous les films policiers. Et puis, il est rapidement évident que cette histoire sert surtout de prétexte à de nombreuses scènes de nus, surtout masculins, et centrées sur Cyril Descours, qui certes le vaut bien, puisque son charme personnel est le principal intérêt de cette histoire, mais c’est trop voyant. Et même Melki est vu sans aucune raison sous la douche !

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Pléthore de premiers films

Mercredi 20 janvier 2010

Si vous égrenez ces modestes notules et lisez l’en-tête de chacun, vous constaterez assez vite que la plupart des noms de réalisateurs vous sont inconnus. Pas étonnant, les deux-tiers des films français qui sortent sont des premiers films, conséquence du fait qu’en France surtout, il est assez facile de faire un premier film, vu le mode de financement qui prévaut chez nous, mais qu’en cas d’insuccès (fréquent chez des réalisateurs qui n’ont pas eu le loisir d’apprendre leur métier), on en fait rarement un deuxième ! À cette facilité s’ajoute l’obsession de notre époque, pour tout ce qui est jeune et nouveau... C’est pourquoi la situation n’est pas très différente aux États-Unis : on a entendu Robert Altman, dans une conférence, affirmer que n’importe lequel des spectateurs qui l’écoutaient avait davantage de chance de trouver des capitaux pour faire un film que lui, Altman, réalisateur pourtant illustre !

Vous êtes peut-être abonné à une chaîne de télévision du câble, et êtes ainsi à même de visionner de vieux films. Lisez le générique, et vous y trouverez fréquemment, dans la liste de l’équipe technique, des noms devenus célèbres ensuite. C’est qu’autrefois, on ne devenait pas immédiatement metteur en scène, il fallait suivre un apprentissage assez long, au sein d’une équipe travaillant sous la férule d’un réalisateur chevronné ; on ne vous confiait une réalisation qu’après des années passées à connaître le métier. C’était raisonnable : comment peut-on croire qu’un débutant est d’emblée un artiste confirmé, capable de mener à bien une tâche aussi lourde et complexe que la réalisation d’un film ? Je l’ai déjà écrit ailleurs, mettre en scène un film, c’est un travail de général en chef ; un débutant ne peut pas assumer une charge de cette envergure. Même Orson Welles, et c’est un détail peu connu, n’a pas débuté avec Citizen Kane en 1941, il avait fait deux courts métrages auparavant, The hearts of age, court métrage de huit minutes, en 1934, et Too much Johnson, court métrage de quarante minutes, en 1938. Luchino Visconti avait été assistant sur quatre films, dont deux pour Jean Renoir, entre 1935 et 1945. Fellini avait été l’assistant de trois films de Rossellini, avant de débuter en 1950. Hitchcock a été assistant sur cinq films. Même Bergman a été assistant, deux ans avant de passer à la mise en scène en 1946. Et ainsi de suite.

Puis cette tendance a quelque peu évolué. Il est devenu plus courant de faire son apprentissage à la télévision, de plus en plus gourmande d’images, et qui désormais, avec la multiplication des chaînes, dépasse probablement le cinéma sous l’angle de l’emploi des techniciens.

On imagine bien que si un réalisateur débutant rate son premier film, les banques sont assez peu enclines à en financer un deuxième, et on ne peut guère le leur reprocher. Si l’apprenti-réalisateur a de la chance ou des relations, il pourra continuer à la télévision ou dans la publicité. Mais là, il existe une concurrence féroce.

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City Island

Jeudi 21 janvier 2010

Réalisé par Raymond de Felitta

Sorti en Allemagne (European Film Market) le 6 février 2009

Sorti en France le 20 janvier 2010

Pas vraiment le film indispensable (les cons disent « incontournable »), mais qui peut être vu pour l’originalité de son point de départ et pour la dinguerie de la plupart des personnages. Vince Rizzo est gardien de prison à New York, et il s’aperçoit, en lisant le dossier d’un des détenus, qu’il s’agit de son fils : il a abandonné la mère enceinte quand il avait dix-neuf ans. Le fils en question, Tony, est un petit délinquant, il vole des voitures. Vince obtient que la garde du prisonnier lui soit confiée, et il l’emmène chez lui sous le prétexte d’un travail d’intérêt particulier (il paraît que ça existe), construire une salle de bains dans une cabane au fond du jardin, comme chanterait Francis Cabrel.

Il faut dire que la famille de Vince est un peu spéciale : le fils de quinze ans est obsédé par les filles obèses, et la fille, qui s’est fait renvoyer de son université pour avoir fumé de la marijuana, travaille en cachette comme strip-teaseuse. Quant à Vince lui-même, qui prend secrètement des cours de comédie avec un professeur qui déteste Marlon Brando, il raconte à sa femme Joyce qu’il va à des parties de poker – activité évidemment plus honorable !

À la fin, Vince est recruté pour jouer dans un film de Scorsese avec DeNiro, et la grande scène d’explications familiales a lieu la nuit en pleine rue. Tout se termine dans l’euphorie, et le public est bien content.

Le scénario est vraiment élastique, car rien n’y est plausible. On peut relever ce détail qui montre que tout cela a été écrit avec les pieds : la femme de Vince découvre dans les affaires de son mari la carte de visite d’une de ses partenaires du cours de comédie, avec un numéro de téléphone. Jalouse, elle appelle le numéro, et le portable de la fille sonne. Or le numéro, qu’on a pu voir, était celui d’un téléphone fixe !...

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Le piratage au secours des grands studios

Jeudi 21 janvier 2010

Ce titre est paradoxal, mais il recouvre une réalité assez peu connue. Les personnes qui téléchargent (illégalement) des films sur Internet connaissent le terme screener, mais beaucoup se méprennent sur son véritable sens. Non, il ne s’agit pas toujours de copies filmées clandestinement au caméscope dans les salles de cinéma. En fait, à l’origine, les screeners étaient fabriqués... par les studios eux-mêmes ! Pas pour alimenter le piratage, évidemment. Il s’agissait plutôt de copies, sur cassettes VHS autrefois, sur DVD ensuite, destinées aux critiques, aux syndicats et aux membres de l’Académie des Oscars, afin qu’ils voient les films en avant-première en vue de voter pour eux. Ce processus, contrairement aux apparences, coûte infiniment moins cher que d’organiser des projections dans des salles qu’il faut réserver, projections nécessairement multiples puisque tout le monde n’est pas libre en même temps. Le nombre de screeners distribués était important, aussi était-il impossible d’éviter les copies clandestines. Et c’est ainsi qu’un film se retrouvait sur Internet avant même sa sortie officielle !

Inévitablement, cette situation a déplu aux studios. Si bien qu’il a été décidé, en haut lieu, de raréfier la distribution des screeners, et cette décision a été annoncée le 30 septembre 2003 par Jack Valenti en personne, défenseur acharné des droits d’auteur, à l’époque président de la Motion Picture Association of America (MPAA) – poste qu’il a quitté en 2004 –, et qui est mort en 2007. C’est d’ailleurs lui qui a créé en 1968 le système de classement des films en quatre catégories (partiellement adopté par la France quand elle institua les fameux « films X »), et qui lutta comme un possédé contre les premiers magnétoscopes, qui devaient, disait-il, tuer le cinéma ! Cette annonce de Valenti était soutenue par les sept « majors » d’Hollywood (les grands studios), ainsi que par DreamWorks et NewLine, deux compagnies théoriquement indépendantes, mais on croit savoir que Valenti était en réalité poussé par Barry Meyer, PDG de la Warner.

Or la décision de supprimer la distribution des screeners nuisait surtout aux producteurs indépendants, ainsi qu’aux filiales théoriquement indépendantes – tout est relatif – des grands studios eux-mêmes, filiales qui comptaient sur les screeners pour faire la promotion de leurs films durant la course aux Oscars. Tout ce beau monde clama dès lors que les grands studios entendaient ainsi mettre des bâtons dans les roues aux indépendants pour se réapproprier toutes les chances d’obtenir des récompenses, génératrices de millions de dollars de recettes.

La lutte contre le piratage servit ainsi de prétexte aux grands studios pour diminuer les chances de la concurrence incarnée par les producteurs indépendants. Cette thèse du complot, évidemment combattue par ces grands studios, est pourtant confortée par le fait que les petits films indépendants, certes très peu piratés, avaient une fâcheuse tendance à remporter des prix qui échappaient aux majors !

La polémique par voie de presse dura quelque temps, jusqu’à ce qu’un compromis provisoire fût trouvé : on n’enverrait plus de DVD, mais uniquement des cassettes, et aux seuls membres de l’Académie des Oscars – comme à l’origine. Aujourd’hui, les screeners n’ont pas disparu, mais les DVD sortent beaucoup plus tôt qu’auparavant, donc sont piratés d’autant plus tôt (et par un nombre plus important de pirates, puisque leur prix a beaucoup baissé) : en France, le délai est officiellement de quatre mois, et peut être réduit à trois mois si le film a fait un bide en salles. Aux États-Unis, c’est trois mois dans tous les cas.

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Invictus

Vendredi 22 janvier 2010

Réalisé par Clint Eastwood

Sorti aux États-Unis le 13 décembre 2009

Sorti en France le 13 janvier 2010

Un bon film, pas un grand film. On a un peu l’impression qu’il s’agit d’une commande, même si Clint Eastwood s’était déjà intéressé au sport avec Million dollar baby.

Ici, c’est le rugby, et c’est en Afrique du Sud au début de la présidence de Nelson Mandela, en 1994. Le nouveau président, désireux de recoller les morceaux d’un pays fracassé par des décennies d’apartheid, forme institutionnelle de racisme, voulut pratiquer le pardon sur toute l’étendue du pays et par tous les moyens. L’un de ces moyens consista à mettre en avant l’équipe nationale de rugby, les Springboks, qui souffrait jusqu’alors d’un double désavantage : elle était haïe par les Noirs puisque tous les joueurs étaient blancs, et... elle était nulle !

Le film raconte par conséquent comment le nouveau président, épaulé par le capitaine de l’équipe François Pienaar, parvient à faire progressivement monter l’équipe des Springboks au premier rang du rugby mondial, en vue de disputer la Coupe du Monde en 1995.

Le principal grief qu’on puisse adresser à Invictus, c’est qu’il est sans surprise : tout ce qu’on attend arrive, en particulier les scènes de réconcialition de la fin (les membres blancs et noirs des services de sécurité, les policiers blancs du service d’ordre avec le petit garçon noir qu’ils ont d’abord voulu chasser, la mère de famille blanche avec sa bonne noire, etc.).

En dehors du match de la fin, un peu longuet mais très bien filmé (le but final est dû à un joueur interprété par Scott Eastwood, le fils de Clint, déjà vu dans Gran Torino l’année dernière), une seule séquence comporte un peu d’émotion, la visite de l’équipe de rugby à la prison où Mandela avait passé tant d’années. C’est court, mais suffisamment intense pour valoir que le film soit vu.

En bref : à voir.Haut de la page

Grace Kelly en semi-retraite

Mardi 26 janvier 2010

Lorsque Grace Kelly épousa le prince Rainier III de Monaco, le grand public crut vraiment qu’elle avait coupé tout lien qui l’attachait encore au monde du cinéma. Tout au plus courut le bruit qu’elle accepterait de jouer dans un film d’Hitchcock, Marnie, mais qu’elle dut refuser parce qu’elle devait y jouer le rôle d’une voleuse, de surcroît frigide.

Pour Marnie, c’était exact ; pour l’abandon des liens avec le cinéma, c’était archi-faux, car elle resta membre du conseil d’administration des studios Fox jusqu’à sa mort. Elle y fut même responsable de la démission du producteur Alan Ladd (le fils du célèbre acteur), lequel, connu comme un mécène avisé, produisait des films de qualité à petit budget, tels ceux de Robert Altman. Or Altman, en 1979, venait de tourner Quintet, produit donc par Alan Ladd, avec Paul Newman, Vittorio Gassman, Fernando Rey, Bibi Andersson et Brigitte Fossey, film qui malheureusement n’eut aucun succès.

Aussi la princesse d’opérette se crut autorisée, lors de la réunion annuelle du conseil d’administration de la Fox, à interpeller Ladd : « Pourquoi avez-vous laissé Altman faire un aussi mauvais film avec un aussi grand acteur que Paul Newman ? ». Ladd lui rétorqua « Et si vous alliez vous faire foutre ? », se leva et partit. Il donna sa démission. La Fox perdit ainsi un excellent producteur.

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Ivul

Mercredi 27 janvier 2010

Réalisé par Andrew Kötting

Sorti en Suisse (Festival de Locarno) le 11 août 2009

Sorti en France le 20 janvier 2010

Film curieusement coproduit par la Suisse et... les Pyrénées-Atlantiques. Il est sorti il y a une semaine dans quatre cinémas seulement en France, dont deux à Paris, et déjà, l’une de ces salles ne le programme plus qu’une fois par semaine. Dans l’autre salle, aujourd’hui, à la première séance de l’après-midi, j’étais le seul spectateur.

Il faut dire que le film est complètement raté : Alex Ivul, descendant suisse d’émigrés russes, garçon de dix-sept ans, surpris dans un début d’inceste avec sa sœur aînée, est mis à la porte par son père. Il grimpe alors dans un arbre et refuse désormais de mettre un pied sur le sol. Dès lors, c’est le larron perché !

Plus tard, on le verra vivre dans une caravane qu’il a suspendue aux arbres de la forêt, alors que sa mère devient alcoolique, que son père tombe malade, et que sa sœur, partie vivre en Russie où elle s’est fiancée, est revenue pour s’occuper de la famille. Elle le rejoint dans sa caravane, l’inceste va se concrétiser, mais un familier du père allume un feu qui incendie la caravane. La sœur en réchappe, Alex refuse de sortir. Néanmoins, on le voit, plus tard, bien vivant, au sommet d’un château en ruines. Fin du film.

Cet argument, qui est celui d’une fable particulièrement obscure, aurait du moins nécessité un traitement approprié, or il n’en est rien. La musique est saugrenue, le bruitage étrange, et les gros plans sur le visage du père malade abondent, alors qu’on perd de vue Alex au moment où on aimerait savoir ce qu’il devient. Les deux génériques, fumeusement liés à cette histoire pour tenter de justifier son caractère dingo, sont composés d’images de l’immigration russe, en noir et blanc, au format 1,37 alors que le film est au format 1,78 : ils sont donc étirés en largeur, puisque la post-production paresseuse a négligé de faire l’adaptation technique. Jean-Luc Bideau, égaré dans cette galère, devait avoir des arriérés d’impôts à payer.

Mais rassurez-vous, le réalisateur se rattrape aux branches (!) en prétendant qu’« une civilisation se développe lorsque les anciens plantent des arbres en sachant qu’ils ne se reposeront jamais à leur ombre », ce qui n’est pas prétentieux pour un kopek, bien entendu.

En bref : inutile de se déranger.Haut de la page

Océans

Jeudi 28 janvier 2010

Réalisé par Jacques Perrin et Jacques Cluzaud

Sorti au Japon (Festival de Tokyo) le 17 octobre 2009

Sorti en France le 27 janvier 2010

Beau film, pas trop ouvertement militant, dont les images magnifiques suffisent, sans prêchi-prêcha inutile, à constituer un plaidoyer en faveur de la nature : puisque tout cela est si beau, il faut le conserver.

Le film commence par l’interminable liste des investisseurs – au moins vingt-cinq – qui ont contribué à sa réalisation en versant leur obole, et où ne manquent ni le prince de Monaco, ni un prince arabe dont le nom m’échappe, ni Veolia Environnement, ni Total, ni même Liliane Bettencourt, qui n’est donc pas idiote, contrairement à ce que veut prouver sa fille qui voit lui échapper une partie de son héritage à venir.

Le plus piquant est que le film est sorti en premier au festival de Tokyo, capitale d’un pays où l’amour de la nature se manifeste de la façon suivante : on capture des requins en pleine mer, on les ampute de leurs ailerons pour en faire de la soupe, puis on rejette vivaants les pauvres animaux, tels quels, dans la mer, où ils n’ont plus qu’à aller agoniser au fond de l’eau (puisqu’ils ne peuvent plus nager), dans les souffrances que vous pouvez imaginer. Charmant pays, charmants habitants.

En bref : à voir.Haut de la page

In the air

Vendredi 29 janvier 2010

Réalisé par Jason Reitman

Titre original : Up in the air

Sorti aux États-Unis (Festival de Telluride) le 5 septembre 2009

Sorti en France le 27 janvier 2010

Pour la distribution en France, le titre a été amputé de son premier mot. Les Français n’aiment pas le mot up ? Déjà, le film Up de Pixar a été rebaptisé Là-haut. Ou est-ce parce qu’un court métrage portant le même titre est sorti aussi – mais pas en France – en 2009 ?

Autre chose, le personnage incarné par George Clooney se nomme Bryan Bingham. Or il existe un musicien du nom de Ryan Bingham, un compositeur de country et de folk, et l’un des co-fondateurs de la compagnie cinématographique October à Hollywood était Bingham Ray. Ce télescopage de noms est-il un hasard ?

Le film commence plutôt bien : Bingham passe 322 jours par an dans les avions, car il va de ville en ville jouer les « dégraisseurs », puisque c’est lui que les patrons trouillards ayant à licencier leurs employés font appel pour leur annoncer la nouvelle et leur passer un peu de pommade. Certes, parfois, un suicide survient, mais comme il n’est pas censé suivre l’existence de ses victimes, tout va bien.

Évidemment, Bryan est célibataire et connaît à peine ses sœurs. Quant à sa vie sentimentale, elle se réduit à quelques aventures dans les hôtels où il ne fait que passer. Mais voilà qu’une de ces aventures, avec une femme fort belle (remarquable Vera Farmiga) et qui semble partager ses conceptions de la vie, prend une tournure inattendue : au lieu de se contenter de ces rencontres au hasard de leurs déplacements respectifs et quand ils en ont envie tous les deux, il s’attache et veut la retrouver. Il se pointe ainsi chez elle et découvre qu’elle est mariée et mère de famille. Il retourne à sa vie errante, ses illusions en moins.

Un passage à vide affecte cette histoire, lors du mariage de la sœur de Bryan, et alors que le film prend l’allure d’un plaidoyer en faveur du mariage et de la vie de famille. Dès lors, le spectateur commence à bâiller. Mais, par chance, ça tourne mal pour le héros, donc le film retombe sur ses pieds.

Très belles vues aériennes des grandes villes du pays, au début de chaque épisode de l’histoire.

En bref : à voir.Haut de la page

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Sites associés :    Yves-André Samère a son bloc-notes 122 films racontés

Dernière mise à jour de cette page le mardi 8 septembre 2020.