Œuvres citées (en italiques, autres que des films) : Les crimes de Snowtown – Snowtown – Animal kingdom – L’empire des Rastelli – Il gioiellino – Mission : Impossible - Protocole fantôme – Mission: impossible - Ghost protocol – Ratatouille – Intouchables – L’ordre et la morale – The artist – Blackboard jungle – American history X – Les acacias – Las acacias – Des vents contraires – Happy new year – New year’s eve – Happy days – Les oiseaux – Cyrano de Bergerac – Les grandes familles – Le testament d’Orphée – Take shelter – Be the first on your block – Un homme prudent – J. Edgar – Carnage – Douze hommes en colère – Thé et sympathie – Qui a peur de Virginia Woolf – Le dieu du carnage – Rosemary’s baby – Le locataire – Chinatown – Le projet Nim – Project Nim – Duch, le maître des forges de l’enfer – Ô ma mémoire : la poésie, ma nécessité – Indignez-vous – Malveillance – Mientras duermes – Trust – Turn me on – Få meg på, for faen – Ma première fois – L’amour dure trois ans – L’oiseau – Lemming – The descendants – Et si on vivait tous ensemble ? – Café de Flore – C.R.A.Z.Y. – Victoria - Les jeunes années d’une reine
Personnes citées : Justin Kurzel – Andrea Molaioli – Brad bird – Tom Cruise – Léa Seydoux – Marie Colmant – Sidney Poitier – Pablo Giorgelli – Jalil Lespert – Jean-Louis Trintignant – Maurice Ronet – Jeanne Moreau – Marlon Brando – Gérard Depardieu – Charles Laughton – Garry Marshall – Françoise Christophe – Paule Emanuele – Suzanne Pleshette – Raymond Rouleau – Jean Cocteau – Jeff Nichols – Clint Eastwood – Charles Lindbergh junior – John Dillinger – Martin Luther King – Caryl Chessmann – John Kennedy – Robert Kennedy – Abraham Zapruder – Roman Polanski – Yasmina Reza – Mia Farrow – Faye Dunaway – Rithy Panh – Kaing Guek Eav – Duch – Stéphane Hessel – Jaume Balagueró – Luis Tosar – Tomas Alfredson – John Le Carré – David Schwimmer – André Gide – Georges Brassens – Max Ophüls – Stanley Kubrick – Jean de La Fontaine – Marie-Castille Mention-Schaar – Frédéric Beigbeder – Gaspard Proust – Louise Bourgoin – Christophe Bourseiller – Jules-Édouard Moustic – Joeystarr – Thomas Jouannet – Yves Caumon – Alexander Payne – George Clooney – Kaui Hart Hemmings – Stéphane Robelin
Réalisé par Justin Kurzel
Titre original : Snowtown
Sorti en France (Festival de Cannes) le 16 mai 2011
Sorti en Australie le 19 mai 2011
Sorti en France le 28 décembre 2011
On a comparé un peu vite ce film à celui, bien meilleur, Animal kingdom, d’un autre Australien. Le plus remarquable ici est l’extrême bêtise du « héros » de cette histoire, Jamie, un jeune homme qui se laisse fasciner par l’amant de sa mère, John, lequel, d’apparence très débonnaire mais homophobe acharné, en outre persuadé que tous les gays ne rêvent que de violer des enfants et DONC ne méritent pas de vivre, se lance dans le massacre de tous ceux qu’il soupçonne dans le voisinage. Témoin de ces horreurs qui le font vomir littéralement, Jamie, qui n’a seulement pas protesté quand son propre frère Troy l’a violé, devient peu à peu complice, par faiblesse, et sa seule velléité d’appeler la police achoppe sur sa pusillanimité ; il raccroche alors sans rien dire, à peine a-t-il obtenu le numéro. Résultat : finalement arrêté avec les autres complices, il écope de vingt-six ans de cabane – incompressibles, comme on dit.
La principale vertu de ce récit est de nous montrer toute cette histoire par ses yeux, mais on n’entre pas pour autant dans son esprit, et donc le film semble bien long. Il l’est, d’ailleurs.
En réalité, le film, qui ne passe à Paris que dans trois salles, bénéficie surtout du bouche-à-oreille, lequel a vite répandu que les scènes d’horreur étaient surabondantes et « insoutenables », selon le cliché bien connu, ce qui est complètement faux. Néanmoins, quelques âmes sensibles quittent la salle, mais surtout parce que, réaction bien connue, elles craignent de les voir arriver, ces fameuses scènes. Or elles sont ratées !
Et, une fois de plus, un film « basé sur des faits réels », la mode aidant.
Réalisé par Andrea Molaioli
Titre original : Il gioiellino
Sorti en Italie le 4 mars 2011
Sorti en France le 28 décembre 2011
Le titre original, qui signifie joyau en italien, désigne Leda, l’entreprise d’abord florissante qu’Amanzio Rastelli a construite peu à peu, à partir d’une modeste charcuterie, bientôt adjointe à une laiterie, qui s’est mise à fabriquer toutes sortes de produits alimentaires et a rendu riche toute la famille. Mais les fameuses et un peu mythiques « lois du marché » imposent aujourd’hui, pour ne pas être avalé par la concurrence, de s’étendre et de grossir sans cesse, comme la grenouille de la fable ; si bien que le patron et son directeur financier, l’honnête et bourru Ernesto Botta, sont constamment obligés de courir après de nouveaux capitaux, jamais prêté sans contrepartie. Par exemple, pour investir dans Leda, une des relations du patron lui impose de racheter... une firme déclinante et ringarde qui fait dans le tourisme de masse !
À bout, les deux hommes finissent par faire entrer la firme en Bourse, ce qui ne suffit pas, puis commettent des actions illégales, truquant leurs comptes, jusqu’au moment où le suicide d’un de leurs cadres provoque une enquête judiciaire, laquelle les envoie en prison. Mais on n’est pas inquiet pour eux : dans un pays où un richissime exhibitionniste un peu escroc a réussi à devenir trois fois de suite chef du gouvernement, on se doute bien que les choses s’arrangeront...
Le film est avant tout pégagogique, très clair, et, à ce titre, parfaitement réalisé. Par exemple, le temps qui s’écoule est montré à l’image par le changement du matériel : les téléphones mobiles remplacent les téléphones à fil, les écrans cathodiques cèdent la place aux écrans plats, et la lire disparaît au profit de l’euro, tout cela montré sans aucune insistance.
Je n’aurais que deux regrets : que le début semble s’orienter vers une histoire sexuelle, qui tourne court, entre Botta et la nièce du président, une fille bardée de diplômes, pas follement intègre, et dont les dents rayent le parquet ; et que la séquence de fin soit un peu naïve : lorsqu’une entreprise veut faire disparaître les traces de ses magouilles, point n’est besoin de faire casser à coups de marteau les ordinateurs de ses bureaux ! Retirer le disque dur ne prend que quelques secondes, avant de le balancer dans la première chaudière venue. Messieurs les cinéastes, vous avez encore à côtoyer la réalité.
Réalisé par Brad Bird
Titre original : Mission: impossible - Ghost protocol
Sorti en Italie le 4 mars 2011
Sorti en France le 14 décembre 2011
La mission du réalisateur, surtout connu pour son Ratatouille, n’avait rien d’impossible, puisqu’il l’a, non seulement acceptée, mais parfaitement réussie, et que son film ne s’est pas détruit automatiquement ! Objectif : distraire les spectateurs avec des scènes spectaculaires et si possible amusantes. Or il est servi, le spectateur.
Ce qui est impossible, c’est de résumer le scénario, qui est au demeurant parfaitement incompréhensible, mais l’intérêt n’est pas là, et mieux vaut se remémorer cette escalade, par Tom Cruise, du plus haut gratte-ciel du monde, sis à Dubaï, et pour lequel il ne dispose que... d’une paire de gants collants. Mais comme ce serait trop facile, l’un des deux gants s’avère très vite hors d’usage !
Il y a aussi une tueuse impitoyable, jouée sans surprise par une Française (on ne répètera jamais assez combien on nous adore, à Hollywood), jouée par Léa Seydoux, qui est bien jolie. Mais elle finit par tomber du gratte-ciel. Bien fait.
Et ce n’est pas tous les jours qu’on voit exploser le Kremlin.
Sur France Inter aujourd’hui, Marie Colmant rapporte le fait qu’Intouchables, pas encore sorti en DVD dans le commerce, est déjà sur Internet. Exact, je l’ai vu ! Détail : quand on visionne le film, on constate qu’est incrustée sur l’image la mention disant que cette copie est réservée aux membres de l’Académie des Césars, trois mille personnes, appartenant toutes aux métiers du cinéma, et qui votent pour décerner ces récompenses surestimées. Ce qui semble prouver que Marie Colmant a téléchargé le film !
Belle découverte ! Il se trouve que j’ai parlé ici de ce type de piratage par screener – qui a commencé aux États-Unis voilà bien longtemps –, de ses causes et de ses conséquences. Que cela arrive en France n’est pas surprenant.
(Il en est de même pour L’ordre et la morale, comme vous pouvez le vérifier ci-dessous,et pour The artist)
Conclusion : les gens de cinéma pleurnichent sans cesse qu’on pirate leurs chefs-d’œuvre, mais eux-mêmes participent à ce piratage. Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais.
Réalisé par Pablo Giorgelli
Titre original : Las acacias
Sorti en France (Festival de Cannes) le 13 mai 2011
Sortie en France le 4 janvier 2012
Sur la recommandation d’une copine comédienne qui l’avait vu en avant-première et en était sortie enthousiasmée, j’ai vu ce film, et je me trouve un peu perplexe. Certes, il est loin d’être inintéressant, mais s’il plaît tant aux critiques, je pense que c’est parce que son « pitch », comme ils disent, tient en une ligne, ce qui facilite leur travail. Et il est certain qu’aucun d’eux ne sera tenté de résumer Mission : impossible - Protocole fantôme, car à l’impossible nul ne saurait être tenu !
Ici, une mère célibataire venue du Paraguay veut se rendre à Buenos Aires, à 1500 kilomètres, avec son bébé, dans sa famille qui lui a trouvé du travail. Elle voyage dans le camion que conduit un homme qu’elle ne connaît pas, le voyage dure deux ou trois jours, il ne leur arrive strictement rien en chemin, sa famille l’accueille avec affection, et le chauffeur lui demande de la revoir. Point final. Tout est sur l’affiche, c’est dire. L’essentiel de l’action se résume au fait que les deux personnages, la mère méfiante au début face à ce compagnon taciturne, le chauffeur agacé par les pleurs du bébé, font chacun peu à peu la moitié du chemin qui les sépare. Mais le réalisateur, qui dirige très bien ses deux acteurs (peut-on diriger un bébé ?), donne aux évènements un coup de pouce un peu voyant : l’enfant pleure beaucoup au début, puis de moins en moins, et enfin plus du tout ! C’est un peu artificiel et guère crédible.
J’ajoute qu’on n’a rien contre les plans séquences où les personnages ne disent rien et ne font rien, bien au contraire. C’est très reposant, et cela permet même de dormir un peu. Mais pourquoi ce titre, qui n’a pas le moindre rapport avec l’histoire ?
Réalisé par Jalil Lespert
Sorti au Canada (Cinemania Film Festival) le 9 novembre 2011
Sortie en France et en Suisse Romande le 14 décembre 2011
Une constante, voire une règle, au cinéma ? Un écrivain ne doit jamais être montré en train d’écrire ! C’est le cas de Paul Anderen, qu’on voit déménager, peindre les murs d’une chambre, se disputer avec sa femme, son frère, la police et les institutrices de ses enfants, faire le moniteur d’auto-école, jouer au football sur une plage, etc., mais écrire, en aucun cas.
Si Paul écrit, sa femme est médecin dans un hôpital, et, surmenée, elle le prie de s’occuper un peu plus des enfants, mais il refuse car il veut partir trois jours afin de terminer son roman. Lassée, elle le quitte, lui abandonnant leurs enfants, et il ne parvient pas à la retrouver ensuite. Ici, grosse faiblesse de scénario : un médecin hospitalier ne disparaît pas ainsi, et le mari pourrait s’adresser à l’hôpital même, mais ni le personnage, ni le réalisateur ni les scénaristes ne semblent y avoir songé ! Il « ne sait pas où la chercher ». Ce à quoi on reconnaît qu’il s’agit bien d’un film français... À la fin, on apprendra que la disparue a été assassinée par un individu dont on ne saura rien.
En fait, c’est un film sur les désaccords conjugaux. Outre Paul, il y a aussi ce déménageur arabe qui, après un séjour en prison, a dû se séparer de sa femme et s’est vu interdire d’approcher son fils ; également, ce voyageur de commerce qui, après un accident, a perdu son travail puis son épouse ; et enfin, le père défunt de Paul, responsable d’une vie d’enfer infligée à sa femme, ce qui a fait que Paul s’est éloigné et a refusé d’assister à ses obsèques. Mais cette avalanche de situations pas très originales semble artificielle, et ne suscite aucun intérêt particulier. On a vu tout cela cent fois.
Acteur honorable, Jalil Lespert devrait abandonner la réalisation. Après tout, d’autres comédiens en ont fait autant après un ou deux essais : Jean-Louis Trintignant, Maurice Ronet, Jeanne Moreau, Marlon Brando, Gérard Depardieu, sans oublier le seul qui ait fait un chef-d’œuvre, Charles Laughton !
Réalisé par Garry Marshall
Titre original : New year’s eve
Sorti aux États-Unis le 5 décembre 2011
Sortie en France et en Suisse Romande le 21 décembre 2011
Encore un faux titre anglais. Il est vrai que les Français ne connaissent pas le mot eve, qui signifie veille, on doit donc leur mâcher le travail... Soit dit en passant, le film devrait s’appeler « Placement de produit », tant il est bourré de publicités. Pas étonnant, Times Square, à New York, est l’un des endroits au monde les plus pollués par des enseignes lumineuses, géantes, clignotantes, animées, et tout et tout. En haut du podium pour la plus voyante, Toshiba ; et pour la plus discrètement envahissante, Nivea. Mais si.
Garry Marshall, l’auteur de Happy days, avait sorti l’an passé un film de même nature sur la Saint-Valentin, qui m’avait semblé un peu plus élaboré, tout en étant très familial. Mais peu importe, celui-ci est de toute évidence un film de circonstance, qui fonctionne de la même façon : beaucoup d’humour, un peu d’attendrissement, et de la convention à en hurler d’agacement. On se contente de regarder les acteurs faire leur numéro, et ils le font plutôt bien, comme toujours. En fait, il n’y a rien à signaler. Attendons un film sur Thanksgiving.
Après 82 films, la comédienne Françoise Christophe est morte dimanche après-midi, dans un hôpital de Paris, à l’âge de 88 ans ; nouvelle annoncée par sa sœur, Paule Emanuele, également comédienne. Je précise que cette dernière a fait surtout du doublage de voix : dans Les oiseaux en version française, elle faisait la voix de l’institutrice, que jouait Suzanne Pleshette (morte il y a trois ans).
En 1956, sous la direction de Raymond Rouleau, Françoise Christophe avait joué Roxane dans Cyrano de Bergerac au Théâtre Sarah-Bernhardt, devenu depuis Théâtre de la Ville, place du Châtelet, et elle avait repris le rôle à la télévision trois ans plus tard. Au cinéma, je l’avais vue dans Les grandes familles, mais elle jouait aussi dans Le testament d’Orphée, de Cocteau, la même année.
Réalisé par Jeff Nichols
Sorti aux États-Unis (Festival de Sundance) le 24 janvier 2011
Sortie en France le 4 janvier 2012
Serait-ce une variante, sur le mode dramatique, d’un épisode de Happy Days (le n° 16 de la saison 1, Be the first on your block en V.O., Un homme prudent en version française), dans lequel Howard Cunnigham se laissait vendre, par un aigrefin, un abri antiatomique à construire dans son jardin ?
Curtis LaForche fait des cauchemars dans lesquels il voit une tornade s’abattant sur la région et détruisant tout, or il y croit. Pour mettre sa famille à l’abri, il entreprend de construire un refuge souterrain près de chez lui. Mais nul ne partage ses craintes, et comme il a « emprunté » à son entreprise le matériel nécessaire aux travaux, il se met mettre à la porte. Pas de chance, sa fille, muette, a besoin d’une opération, et il perd le bénéfice de sa mutuelle. Mais voilà qu’une véritable tempête s’annonce : c’est objectif, puisque sa femme la voit, alors que, jusque là, on pouvait croire à des hallucinations. La famille passe donc la nuit sous terre, mais, lorsqu’ils sortent après bien des hésitations de la part de l’homme, c’est pour constater qu’il y a eu très peu de dégâts, donc rien de la tornade annoncée.
Là-dessus, un psychiatre envoie tout le monde changer d’air sur une plage, et... une vraie tornade arrive. Fin du film.
Outre que la plupart des séquences sont traitées avec une lenteur pénible, vous avez compris que ce film relève de la masturbation intellectuelle : on joue à nous suggérer que l’homme est victime de ses propres fantasmes (ses cauchemars sont traités comme des scènes d’horreur, avec les procédés grossiers habituels) et qu’il entraîne ses proches dans le malheur, mais ce retournement de situation final renvoie le spectateur dans le brouillard, si j’ose dire. C’est un jeu auquel les mauvais réalisateurs adorent se livrer, pour combler le vide de leur inspiration. De plus, le public est frustré : il se fiche bien des fantasmes d’un probable déséquilibré, ce qu’il veut, c’est voir la tornade. Or il ne la voit pas ! À la place, on lui fourgue de la pseudo-métaphysique.
Réalisé par Clint Eastwood
Sorti aux États-Unis le 3 novembre 2011
Sortie en France le 11 janvier 2012
Tout vient à point à qui sait attendre, puisque, dans une notule du 18 juillet 2009 sur Public enemies, je souhaitais que le cinéma fasse enfin un film sur Hoover. Je ne savais pas que Clint Eastwood me lisait ! Mais est-ce parce qu’il est de droite qu’il se montre si peu offensif envers « le plus grand ripou d’Amérique » ? Non qu’il cache ou minimise ses magouilles, mais enfin, il concentre son film sur les faits divers saillants, comme l’affaire du bébé Lindbergh, et passe totalement sous silence, par exemple, sa bienveillance envers la mafia, et son homophobie – alors qu’il ne cache pas l’homosexualité du personnage, même si elle est encore contestée, ni sa mesquinerie, qui le fit renvoyer du FBI l’agent qui avait abattu le gangster Dillinger, parce que, lors d’une audition devant le Congrès, on lui avait fait remarquer que lui, Hoover, n’avait jamais arrêté en personne le moindre criminel !
Hoover, en fait, incarnait le Mal qu’il prétendait combattre, et il a fait à son pays davantage de mal que de bien, contrairement à ses intentions affichées en permanence. Et tous les moyens lui étaient bons, y compris la lettre anonyme pour tenter d’empêcher Martin Luther King d’accepter son Prix Nobel de la Paix ! Je citerai aussi ce que le film ne dit pas : Hoover ayant fait campagne pour que la loi classe l’enlèvement au nombre des crimes fédéraux, on est allé jusqu’à l’extrême, qualifier de kidnapping le simple fait d’obliger quelqu’un, sous la menace d’une arme, à monter dans une voiture ! Ce qui a coûté la vie à Caryl Chessmann, en 1960. Il n’avait jamais tué personne, s’était amendé en prison, avait passé douze ans dans le fameux couloir de la mort, et y avait écrit quatre livres. Mais rien n’y a fait, il a fini dans la chambre à gaz, dans la prison de San Quentin.
J’ai relevé un épisode invraisemblable, au sujet de l’attentat contre John Kennedy : un de ses agents du FBI lui téléphone de Dallas pour lui dire qu’on vient d’abattre le président, précisant que « personne n’est encore au courant », ce qui permet à Hoover d’annoncer lui-même la nouvelle à Robert Kennedy, frère du président et ministre de la Justice. C’est parfaitement idiot ! L’attentat a eu lieu dans la rue, en présence de milliers de témoins, il a été filmé d’assez près par Abraham Zapruder, les radios et télévisions étaient là, et l’information s’est évidemment répandue sans aucun délai, partout dans le pays. Comment peut-on prétendre que nul n’était au courant et que le ministre de la Justice l’ignorait ?
Le film est raconté avec de multiples flashbacks, qui ont l’inconvénient de gommer la progression de la carrière du personnage. Je ne suis pas persuadé que ce parti-pris était le meilleur.
Réalisé par Roman Polanski
Sorti en Italie (Festival de Venise) le 1er septembre 2011
Sortie en France le 7 décembre 2011
Des pièces de théâtre adaptées au cinéma, on en connaît beaucoup, et de bien meilleures : Douze hommes en colère, Thé et sympathie, surtout Qui a peur de Virginia Woolf, qui a quelques similitudes avec celle adaptée ici, Le dieu du carnage, de Yasmina Reza, jouée au Théâtre Antoine il y a quatre ans. Cette pièce, en fait, est artificielle et pas très bonne : deux couples se disputent parce que le gosse de l’un a cassé deux dents à celui de l’autre. Puis la dispute gagne à l’intérieur de chaque couple. Et cela se termine sans aucune conclusion.
Je dois à la vérité de dire que, non seulement on s’ennuie assez vite en dépit du fait que le film ne dure que quatre-vingts minutes, mais aussi, que tout est prévisible. Je vous certifie que, trois quarts d’heure à l’avance, je SAVAIS que l’épouse, agacée de voir son mari téléphoner sans cesse et grossièrement avec son Blackberry, allait le lui arracher et le saboter (elle le plonge dans un vase de fleurs rempli d’eau).
On vérifie que, décidément, Polanski est attiré par tout ce qui est trouble et malsain, notamment les déjections humaines. Ici, l’une des deux femmes vomit abondamment et souille le salon, les livres d’art de son hôtesse et le pantalon de son mari ; plus tard, elle a encore une crise de nausées. Déjà, dans Rosemary’s baby du même réalisateur, Mia Farrow vomissait dans l’évier de la cuisine. Dans Le locataire, c’était de la merde qu’un voisin déposait sur un paillasson. Et dans la vie, ce n’est pas mieux : lorsqu’il réalisait Chinatown à Los Angeles (c’était avant son viol d’une gamine de 13 ans qu’il avait saoulée et droguée pour mieux la sodomiser), l’actrice Faye Dunaway, sur le plateau, avait fait savoir qu’elle avait soif ; il lui avait alors tendu un gobelet dans lequel... il avait pissé ! Ayant trempé ses lèvres et compris quelle boisson on lui offrait, elle lui avait balancé le contenu au visage. Je n’invente rien, cette anecdote est très connue.
Réalisé par James Marsh
Titre original : Project Nim
Sorti aux États-Unis (Festival de Sundance) le 20 janvier 2011
Sortie en France le 11 janvier 2012
On ne s’étonnera pas que ce film ait été primé au Festival de Sundance, où tout ce qui est bien-pensant est accueilli sans réserves. Il faut dire que ce documentaire reconstitué date de 2011, alors que le chimpanzé qui en est le héros est mort en mai 2000, à l’âge de 26 ans – ce qui n’empêche pas qu’on nous présente le tout, quasiment, comme un reportage.
Or le générique de fin, dont la presse ne souffle mot mais que j’ai pris la peine d’étudier de près, montre que l’équipe du film comprenait un primate choregrapher (si-si !), un animatronic chimpanzee (les animatroniques sont des maquettes animées en grandeur nature), un chief puppeteer (responsable des marionnettes), un puppeteer dresser (habilleur de marionnettes), une sculpteuse, cinq acteurs interprétant certains personnages (réels) de cette histoire, un concepteur de costumes, une directrice de « casting », un technicien d’images numériques additionnelles, deux assistants-costumiers, une spécialiste de la coiffure et du maquillage, un décorateur et ses trois constructeurs, un location scout (ce n’est pas un type qui loue des scouts, c’est un chercheur de lieux de tournage), un chef coloriste, un superviseur de film numérique, sept techniciens et un monteur de film numérique, une responsable des graphiques additionnels, un monteur des bruitages, un artiste de la voix et du mouvement (sic), et des animaux fournis par la William Berloni Theatrical Animals, Inc., avec deux dresseurs.
C’est dire si l’authenticité de tout ce qu’on voit sur l’écran est garantie !
Redevenons sérieux. Nim est un chimpanzé, né en captivité dans un centre de recherche sur les primates, en 1973. Enlevé à sa mère sur l’initiative d’un professeur de l’Université de Colombia, il est confié à une famille humaine, à laquelle on a demandé de l’élever comme un enfant humain. But de cet apprenti-sorcier qui se repentira, mais un peu tard, d’avoir eu cette idée lumineuse : tenter de prouver que le primate sera capable d’apprendre à communiquer par le langage. Pas par la parole, ce dont les chimpanzés sont physiquement incapables, mais par le langage des signes dont usent les sourds-muets. Et, en effet, sur quatre ans, Nim apprend une centaine de signes (celui qu’il préfère : jouer), et grandit chez les humains... sans avoir jamais vu un seul chimpanzé ! Observé par des étudiants, il aurait même été capable de combiner ces signes en vingt mille combinaisons diverses, mais on n’est pas forcé d’y croire, vu l’enthousiasme et la naïveté des protagonistes convaincus d’avance. Jugez-en : se prenant lui-même pour un humain, il classe sa propre photo parmi un groupe de photos d’humains, et son entourage s’extasie : ô joie, Nim « n’a pas conscience d’être un singe ». Oubliant que, justement, il n’a jamais vu de singe !
Hélas, deux obstacles et une énorme bourde ruinèrent tout. La bourde, c’est d’avoir confié Nim à une famille de crétins vaguement hippies ne connaissant rien aux chimpanzés : on lui fait fumer de la marijuana et boire de l’alcool, la « mère » l’allaite au sein, etc. D’une part, à cinq ans, Nim devint dangereux : les chimpanzés ne connaissent pas leur force physique et ont tendance à mordre cruellement sous n’importe quelle impulsion (j’en ai fait l’expérience avec un macaque, beaucoup plus petit). D’autre part, les crédits alloués à l’expérience furent coupés. L’animal quitta sa famille d’adoption pour aller dans un laboratoire où l’on testait des vaccins, et y rencontra les premiers singes de sa vie, qui lui étaient totalement étrangers. Songez que, jusqu’alors, il savait aller aux toilettes, et dormait dans un lit !
Bref, on avait fait le malheur du pauvre animal. Heureusement, des âmes compatissantes le prirent en pitié, le rachetèrent et le confièrent aux gérants d’un parc où les animaux étaient bien traités. Il eut même droit à une femelle et devint père, mais ne battit pas le record de longévité de Cheetah.
Réalisé par Jaume Balagueró
Titre original : Mientras duermes
Sorti aux États-Unis ((Fantastic Fest) le 23 septembre 2011
Sortie en France le 28 décembre 2011
Le titre original signifie en espagnol « pendant que tu dors » ; et, en effet, Cesar commet la nuit la plupart de ses méfaits. En lui-même, sans amis, sans amour, il se dit malheureux, et, au début du film, on le voit, debout sur le parapet d’une terrasse, semblant prêt à sauter dans le vide ; mais s’il sautait, il n’y aurait pas de film !
Donc, à -- Barcelone, Cesar est un concierge d’hôtel très instable : il change constamment d’employeur, bien qu’on le montre comme efficace et discret. Première incohérence. Mais son dernier patron lui reproche ses retards. Pour compenser, Cesar s’ingénie à pourrir l’existence des résidents, ce qui donne lieu à quelques scènes diversement réussies, la meilleure étant celle où, feignant de réconforter une vieille dame pourtant assez joyeuse de nature, il lui fait en réalité prendre conscience, par quelques phrases faussement compatissantes, qu’en réalité elle est trop vieille et que personne ne s’intéresse à elle : à la fin de la scène, la malheureuse est à ramasser à la cuillère. Mais toutes les autres inventions de Cesar achoppent sur l’invraisemblance de ce qui est montré : peut-on vraiment copuler nuitamment avec une femme convoitée, après avoir drogué sa nourriture pour qu’elle ne se réveille pas ? Peut-on faire en sorte, rien qu’en déposant une pomme pourrie dans un placard, que des milliers de cafards envahissent illico l’appartement ? Peut-on passer ses nuits sous le lit d’une femme, à l’occasion pas seule, sans que quiconque prenne conscience de sa présence ? Peut-on céder si facilement au chantage d’une petite fille qui a surpris vos méfaits ? Peut-on égorger un homme dans une baignoire sans que la police trouve votre ADN quelque part ?
Tout cela tend vers la chute de l’histoire : Cesar a mis enceinte la fille qui lui plaisait, elle quitte l’hôtel et met son enfant au monde, et il lui envoie alors une lettre dans laquelle il lui révèle que le père n’est pas, comme elle le croyait, son amant défunt (l’homme égorgé), mais lui-même ! Conclusion perverse, mais qui ne tient pas debout.
Comme souvent, mise en scène relativement correcte, ne suffisant pas à sauver un scénario raté. Mais l’acteur Luis Tosar est bon. Il l’a prouvé, mais... ailleurs !
Réalisé par Rithy Panh
Sorti en France (Festival de Cannes) le 15 mai 2011
Sortie en France le 18 janvier 2012
Le film a d’abord été diffusé à la télévision, sur France 3, le lundi 9 janvier.
Documentaire sur les atrocités commises par les Khmers rouges, au Cambodge, entre 1975 et 1979 : un quart de la population, soit 1,8 million de personnes, y a laissé la vie. Sur un simple soupçon, une dénonciation, voire l’appartenance à la classe intellectuelle, honnie et dévalorisée par le Parti Communiste, les malheureux étaient emprisonnés dans 196 centres de détention et d’interrogatoire (comprenez : de torture), un rapport était établi, et un lointain responsable n’ayant jamais vu les accusés désignait lesquels seraient exécutés. Les familles n’étaient pas informées de la condamnation, et les corps, jamais rendus. En somme, les victimes disparaissaient, littéralement, « écrasées et réduites en poussière » !
Kaing Guek Eav, dit Duch, a dirigé durant quatre ans l’un de ces centres, la prison M13, puis il a obtenu une promotion à la tête du tristement célèbre S21, machine bureaucratique à éliminer les opposants – qui a déjà fait l’objet d’un film. Ce genre de décision était pris par l’Angkar (« l’Organisation », comme dans les films d’espionnage), un comité tout-puissant et sans visage qui décidait de tout.
Premier à être jugé par les Chambres extraordinaires instituées au sein des tribunaux cambodgiens, en 2009, il a été reconnu responsable de 12 280 assassinats, et condamné à trente-cinq ans d’emprisonnement. À la fin de son procès, il avait demandé sa remise en liberté, estimant, c’est classique, qu’il n’avait fait qu’obéir aux ordres du Parti. Il a fait appel de sa condamnation.
Le film le montre seul, expliquant son parcours, épluchant des documents à l’appui de ses activités. Quelques images d’archives et quelques témoignages, dont celui de bourreaux d’un rang inférieur expliquant les tortures qu’ils infligeaient, viennent illustrer ce long entretien avec un intervieweur qu’on n’entend ni ne voit jamais.
Un détail : sur la table de sa cellule, un livre de Stéphane Hessel, publié en 2006, Ô ma mémoire : la poésie, ma nécessité, dans lequel le futur auteur de Indignez-vous commentait 88 poèmes. Ces tortionnaires, au fond, sont des humanistes incompris.
Réalisé par David Schwimmer
Sorti au Canada (Festival de Toronto) le 10 septembre 2010
Sortie en France le 18 janvier 2012
Acte un : à 14 ans, Annie dialogue en direct (via un site de chat) avec un garçon, Charlie, qui prétend en avoir seize et être lycéen comme elle. Ils se plaisent. Puis Charlie avoue avoir plutôt vingt ans et être en deuxième année d’université. Puis il avoue en avoir vingt-cinq et être diplômé. Et lorsque enfin ils se rencontrent, Charlie s’avère âgé de trente-cinq ans. Bien que passablement « choquée », comme on dit bêtement, elle accepte de le suivre dans un hôtel et de coucher avec lui. Bien plus tard, son père apprendra que la fille n’était pas aussi innocente qu’il le pensait : le garçon lui avait envoyé une photo de son sexe, et elle avait répondu par des obscénités.
Acte deux : branle-bas de combat, la coucherie est révélée. Comme c’est un crime fédéral d’avoir des relations sexuelles avec une mineure d’un autre État, le FBI s’en mêle. Problème : Annie s’obstine à dire qu’elle n’a pas été violée, que Charlie est un type très bien, que donc elle était consentante. Et elle prie ses parents de ne pas lui rappeler sans cesse qu’elle est « une victime », ce que justement elle nie. Or son père est quasiment détruit par l’évènement.
Acte trois : le FBI découvre dans trois autres affaires antérieures que l’ADN de l’homme, toujours non identifié, y figurait déjà. Annie prend conscience que son amant de passage ne l’aimait pas, a collectionné les aventures, et se sent cette fois dans la peau d’une fille violée. Le père, en larmes, rumine sa culpabilité. Fin du film, mais le générique est accolé à une scène où le violeur, qui n’a pas été arrêté, se révèle comme un homme d’apparence honorable, marié, professeur de collège, et qui semble s’intéresser à... un très joli garçon !
Ce film, de toute évidence, souffre d’un scénario bancal, qui laisse sceptique sur les intentions de ses auteurs et leur capacité à les concrétiser.
Pour le plaisir, signalons une bourde de nos amis les sous-titreurs : le père offre un ordinateur à sa fille, c’est un MacBook, et il a « un disque dur de 4 gigaoctets » ! Si c’était vrai, ce serait une capacité ridicule. Le traducteur a confondu avec la mémoire vive. Pourtant, ces gens-là travaillent sur ordinateur.
Réalisé par Jannicke Systad Jacobsen
Titre original : Få meg på, for faen
Sorti aux États-Unis (Festival de Tribeca) le 20 avril 2011
Sortie en France le 18 janvier 2012
Le titre anglais signifie « Excite-moi », et le titre norvégien est aussi grossier que l’argument du récit, aussi ne vais-je pas le traduire : reportez-vous au « Canard enchaîné » du 18 janvier pour en savoir davantage, ou faites appel au service de traduction de Google. Toute l’histoire tourne autour d’Alma, 15 ans et qui vit avec sa mère dans un petit village. Littéralement obsédée par le sexe, elle a fait une fixation sur un camarade de lycée, Arthur, plutôt beau garçon et sympathique. Mais elle commet la bourde de raconter à ses copines qu’Arthur lui a montré (et a pointé vers elle) cet organe qui fait que les garçons ne sont pas des filles, et que La Fontaine qualifie de « Ce qui servit au premier homme / À conserver le genre humain ».
Aussitôt, tout le monde met l’idiote en quarantaine. Et lorsqu’elle essaie de rattraper Arthur, il lui rétorque qu’elle ne l’intéresse pas et qu’il a une petite amie dans un autre village. Alma fugue, est récupérée par sa mère, et Arthur, qui a eu chaud, vient lui avouer qu’il n’a aucune petite amie et qu’il est amoureux d’elle. Mais cette fois, c’est elle qui joue les dédaigneuses et l’envoie bouler.
Arthur n’a plus qu’une solution : fabriquer un calicot géant, qu’il colle sur le façade de leur école, et où il avoue qu’il a bien fait ce dont elle l’a accusé ! Dans la dernière scène, Arthur a été invité à déjeuner chez Alma et sa mère, mais celle-ci refuse qu’il passe la nuit sur place.
Le marivaudage à la mode norvégienne, c’est spécial.
Réalisé par Marie-Castille Mention-Schaar
Sortie en France et en Belgique le 18 janvier 2012
Zachary Scar a vingt ans et, renvoyé de plusieurs établissements scolaires car les études « ne sont pas faites pour lui » (sic), il a déjà vingt ans en terminale ! Le cancre parfait... Soit dit en passant, tout au long du récit, on parle de son lycée, une boîte de grand luxe installée dans un château, comme d’un « collège » ; la réalisatrice devrait se renseigner. Au passage, elle camperait de façon un peu plus réaliste les professeurs qu’elle met en scène...
Bref, Zachary passe son temps à draguer des filles, à jouer au poker, à prendre des photos, à rouler à moto, à boire et fumer, et à faire le mannequin de mode. Méprisé par son père mais subventionné en douce par sa mère, il habite avec sa sœur et lui paye son loyer ; en échange, elle lui fait la morale, en vain. Or, dès sa première rencontre avec Sophie, une camarade de classe, celle-ci le déteste. On devine immédiatement qu’ils vont tomber amoureux, ce qui ne manque pas. Mais Sophie meurt d’un accident de cheval (elle aussi a une famille aisée), et Zachary est très triste.
La réalisatrice veut visiblement montrer que les manières grossières des jeunes dissimulent un romantisme et des idéaux que les adultes ont perdu. Une immense révélation. Une seule scène d’amour avec beaucoup de gros plans de peau, sur de la musique comme il y en a dans tous les films français.
Le film est sans surprise, mais comme il est relativement court, on n’a pas le temps de voir venir l’ennui. Sera parfait, un soir sur France 3.
Réalisé par Frédéric Beigbeder
Sorti en France (Festival de Pau) le 10 décembre 2011
Sortie en France et en Belgique le 18 janvier 2012
Une surprise : en général, les écrivains ne savent pas faire de cinéma (la liste est accablante, je vous l’épargne), les rigolos de la télé ne savent pas faire de cinéma (la liste est consternante, voir plus haut), or Beigbeder est l’un et l’autre. Malgré cela, et avec l’aide de trois scénaristes tout de même, il a réussi à monter, d’après un de ses romans, un film comique plutôt convenable, nourri de nombreux détails de sa vie, et joué par quelques-uns de ses innombrables copains.
L’autre surprise, c’est que Gaspard Proust, qui l’incarne, n’est pas mauvais. Mais la véritable vedette du film est la délicieuse Louise Bourgoin, qui n’avait pas eu jusqu’ici de rôle digne d’elle. C’est fait, elle est épatante en tous points.
Et puis, voir Christophe Bourseiller en curé, ou Jules-Édouard Moustic, en gourou, « marier » Joeystarr avec Thomas Jouannet, c’est assez réjouissant.
Réalisé par Yves Caumon
Sorti en Italie (Festival de Venise) le 7 septembre 2011
Sortie en France et en Belgique le 25 janvier 2012
Troisième long métrage d’un réalisateur de province peu connu, pas du genre tapageur, et qui sait filmer.
L’oiseau du titre est aussi symbolique que l’était le lemming de... Lemming, en 2005. L’animal est resté coincé derrière une cloison de l’appartement d’Anne (on se demande comment il n’est pas mort de faim et de soif !), elle le délivre et l’admet dans sa vie, par ailleurs complètement solitaire, car, assez disgraciée, elle refuse tous les rapports humains un peu poussés, après, semble-t-il, l’échec d’une vie à deux. À la fin, l’animal meurt par accident, elle l’incinère et va disperser ses cendres dans la Garonne. Petite lueur d’espoir après cela, elle va retrouver un garçon qui l’avait courtisée et qu’elle avait éconduit, mais le film s’arrête avant qu’arrive quoi ce soit.
Le film est lent, ce qui n’est pas un défaut. Mais enfin, la minutie de la description d’une personne meurtrie et qui ne désire pas sortir de cet état ne suffit peut-être pas à faire un film qui passionne. Heureusement, il ne s’étire pas en longueur, et Sandrine Kiberlain est tout à fait le personnage.
Réalisé par Alexander Payne
Sorti aux États-Unis (Festival de Telluride) le 2 septembre 2011
Sortie en France le 25 janvier 2012
Le personnage de George Clooney commence par affirmer que l’archipel d’Hawai est plutôt une sorte d’enfer, mais la suite montre le contraire, tant la beauté des paysages est évidente ; pour les centres-villes, moins...
Matt King est, avec ses innombrables cousins, le descendant d’une famille princière locale, héritière d’une immense fortune, essentiellement des terres encore vierges de toute construction. Avocat d’affaires, il est chargé de gérer le tout, mais une loi va obliger la famille à démanteler cet héritage avant sept ans, pour le vendre à un acheteur que Matt, responsable de la fiducie, doit choisir. Il a quasiment choisi un homme qui ne défigurera pas trop les paysages, et ses co-héritiers y sont favorables, mais il découvre que l’homme d’affaires qui doit s’occuper de ces transactions pour le compte de l’acheteur a été l’amant de sa femme, laquelle se trouve actuellement dans un coma dépassé à la suite d’un accident nautique. Pour ne rien arranger, père trop occupé, il a laissé ses deux filles de dix-sept et dix ans pousser n’importe comment.
Il a donc trois missions à remplir : « s’expliquer » avec l’amant de sa femme ; annoncer à ses filles rétives que leur mère va être débranchée des machines qui la maintiennent en vie inutilement ; et... refuser l’acheteur prévu pour ne pas favoriser le vilain séducteur ! Ce qu’il fera, mais non sans mal.
Le film est extrêmement romanesque, et il est en effet adapté d’un roman écrit par une actrice, Kaui Hart Hemmings. Le résultat est un peu long, mais pas déplaisant car les paysages sont splendides, et George Clooney est toujours aussi bon.
Réalisé par Stéphane Robelin
Sorti en Suisse (Festival de Locarno) le 13 août 2011
Sortie en France le 18 janvier 2012
Un festival de cabotinage, et l’on admet mal que certains acteurs estimables comme Claude Rich et Pierre Richard acceptent de jouer dans cette chose (pour Guy Bedos, le cabotinage, ça le connaît). Ici, tout le monde a 75 ans, même si Geraldine Chaplin en paraît le double – mais c’est son cas depuis cinquante ans –, sauf Daniel Brühl, mais le jeune Allemand n’a pas grand-chose à faire, si l’on excepte une scène d’amour fugitive, aussi racoleuse qu’inutile : il fallait un minimum de sexe dans ce film sinistre.
Le réalisateur a écrit les deux seuls longs métrages qu’il a commis (il a débuté en... 1994), et il ne connaît pas le français, puisqu’il fait dire à Geraldine Chaplin « Je ne suis pas prête de... ».
Réalisé par Jean-Marc Vallée
Sorti en Italie (Festival de Venise) le 2 septembre 2011
Sortie en France le 25 janvier 2012
Le titre n’a aucun rapport avec les deux histoires entremêlées qui sont racontées ici, l’une qui commmence à Paris en 1969, l’autre située au Québec en 2011. Il faut avouer que cette seconde histoire, celle d’un disc jockey de Montréal pris entre deux femmes, n’a strictement aucun intérêt, seule l’histoire de cette mère d’un enfant trisomique jouée par Vanessa Paradis, plutôt convaincante comme actrice, parvient à émouvoir un peu : le personnage refuse de voir son enfant confié à une institution, entend l’élever seule (le père s’est carapaté dès qu’il a su) et l’envoyer dans une école pour les enfants nés normaux.
Le réalisateur avait connu une grande réussite avec son C.R.A.Z.Y., en 2005. Il avait un peu raté son film suivant, Victoria - Les jeunes années d’une reine. Mais là, le résultat est catastrophique, parce que totalement artificiel.
Sites associés : Yves-André Samère a son bloc-notes films racontés
Dernière mise à jour de cette page le jeudi 1er janvier 1970.