JPM - Films - Notules - Avril 2007

Notules - Avril 2007

 

Plus courtes que les critiques, les notules traitent d’un ou plusieurs films, ou de sujets d’actualité en rapport avec le cinéma. Jusqu’en septembre 2004, elles provenaient de divers forums aujourd’hui disparus. Par la suite, elles s’en affranchissent et sont rédigées directement ici.

Œuvres citées (entre parenthèses, autres que des films) : Ne touchez pas la hacheLa duchesse de LangeaisScandaleusement célèbreInfamous – Capote – Truman Capote– De sang-froidNorway of lifeDen brysomme mannenLa chanson de SolveigEn la cama – Nuit d’été en ville – L’éveil de Maximo OliverosAng pagdadalaga ni Maximo OliverosDemandez la permission aux enfants !Sunshine – Trainspotting – Tremblement de terre – Alien – 2001 : Odyssée de l’espace – Anna M. – Fatal attraction – L’histoire d’Adèle H – Le vieux jardinA casa nostraLes vacances de Mr BeanMr. Bean’s holiday – The league of gentlemen’s Apocalypse – Les vacances de monsieur Hulot – Jean de La Fontaine, le défiTartuffeLove (et ses petits désastres)Love and other disasters – Diamants sur canapé – All about Eve – Le candidat – Le cauchemar de Darwin – Supersize me – Une vérité qui dérange – We feed the world – Le marché de la faim – Une jeunesse chinoiseYihe yuanSummer palace

Personnes citées : Honoré de Balzac – Jacques Rivette – Luc Besson – Bruce Willis – Truman Capote – Bennett Miller – Philip Seymour Hoffman – Douglas McGrath – Toby Jones – Perry Smith – Jens Lien – Matías Bize – Marie Trintignant – Jean-Hugues Anglade – Michel Deville – Matías Bize – Blanca Lewin – Gonzalo Valenzuela – Auraeus Solito – Lino Brocka – Fabrice Burgaud – Nicolas Sarkozy – Éric Civanyan – Samuel Hahnemann – Danny Boyle – Arthur C. Clarke – Stanley Kubrick – Michel Spinosa – Michael Douglas – Glenn Close – François Truffaut – Victor Hugo –Sang-soo Im– Luigi Comencini – Orson Welles – Cristina Comencini – Paola Comencini – Francesca Comencini – Steve Bendelack – Jacques Tati – Rowan Atkinson – Max Baldry – Césarion – César – Cléopâtre – Daniel Vigne – Molière – Jean de La Fontaine – Isaac Asimov – Jean-Baptiste Colbert – Nicolas Fouquet – Louis XIV – Alek Keshishian – Luc Besson – Santiago Cabrera – Joseph L. Mankiewicz – Bette Davis – Audrey Tautou – Jeanne Moreau – Niels Arestrup – Lou Ye – Ségolène Royal

Ne touchez pas la hache

Lundi 2 avril 2007

Réalisé par Jacques Rivette

Sorti en Allemagne (Festival de Berlin) le 15 février 2007

Sorti en France le 28 mars 2007

Dans le cadre de la série « Portons à l’écran les œuvres marquantes de notre littérature », aujourd’hui, La duchesse de Langeais, d’Honoré de Balzac.

Jacques Rivette est l’un des papes de la Nouvelle Vague, il a 79 ans, et il jouit d’une réputation flatteuse. Sa spécialité : les films très longs et très austères. Il est quasiment intouchable, et si quelqu’un en France « a la carte », c’est bien lui !

On n’en est que plus à l’aise pour écrire ici que son film est un monument d’ennui, qui finira sur France 3 ou sur Arte. Il vous donnerait presque envie de voir le dernier Luc Besson. Avec Bruce Willis, de préférence...

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Scandaleusement célèbre

Mercredi 4 avril 2007

Réalisé par Douglas McGrath

Titre original : Infamous

Sorti en Italie (Festival de Venise) le 31 août 2006

Sorti en France le 4 avril 2007

Le jeu de mots du titre, Infamous, bien que réussi (in + famous = infamous), ne se justifie guère, puisque rien n’est vraiment scandaleux dans ce film. Cette histoire a déjà été portée à l’écran l’année dernière sous le titre Capote, rebaptisé en français « Truman Capote » afin d’éviter les plaisanteries faciles. Les événements relatés sont donc les mêmes, mais le point de vue et le style sont différents. Le film de Bennett Miller avec Philip Seymour Hoffman était brillant et cruel, celui de Douglas McGrath avec Toby Jones est plus émouvant. Le premier rappelait que l’écrivain avait proprement laissé tomber les deux assassins dont il racontait l’histoire dans son livre De sang-froid (et n’était réapparu qu’au procès), le second s’intéresse presque entièrement à l’histoire d’amour entre Capote et Perry, l’un des deux meurtriers, fâcheusement incarné par l’interprète du dernier James Bond ! Il n’est pas mauvais, mais mieux aurait valu prendre un inconnu moins marqué.

Les deux films sont aussi bons, cependant ils ne décrivent pas l’écrivain de la même façon, et ne visent peut-être pas le même public. Le plus récent est aussi un beau réquisitoire contre la peine de mort, qu’il n’élude pas : le premier pendu agonise pendant une vingtaine de minutes !

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Norway of life

Jeudi 5 avril 2007

Réalisé par Jens Lien

Titre original : Den brysomme mannen

Sorti en France (Festival de Cannes) le 20 mai 2006

Sorti en Norvège le 26 mai 2006

Sorti en France le 28 mars 2007

Ce jeu de mots à hurler de rire (Norway pour la Norvège, plus « way of life »), et dont les distributeurs français doivent être fiers, recouvre en fait un titre norvégien moins drôle qui signifie « L’homme gênant » – comprenez « L’intrus ». Cet homme, c’est Andreas, venu de nulle part, qu’une voiture recueille en plein désert et conduit en ville. On semble l’attendre, car on lui offre un poste à la comptabilité d’une grande firme. Le patron est cordial, les collègues masculins, chaleureux, les collègues féminines, prêtes à vivre en couple avec lui. Andreas s’installe avec la première qui lui a fait des avances. Tout va au mieux dans le meilleur des mondes possibles, au point que, lorsque Andreas se tranche bêtement le doigt avec le massicot du bureau, le doigt repousse au bout de quelques heures ! Mais tout de même, que les gens du cru semblent bizarres, à ne rien vouloir changer de leur mode de vie, comme des syndicalistes français...

On s’en doute, Andreas ne va pas faire de vieux os dans un tel univers. Une série d’incidents bizarres et qu’il veut éclaicir va donner prétexte à le renvoyer d’où il venait. En douceur : le patron le vire avec des phrases charmantes : « Ton remplaçant ne te vaut pas, ça a été sympa de travailler avec toi, etc. ».

Comme toujours, les films norvégiens tournent le dos au réalisme. C’est très sophistiqué, mais assez triste et guère exaltant. À l’instar de La chanson de Solveig, que justement l’on entend à deux reprises.

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En la cama

Jeudi 5 avril 2007

Réalisé par Matías Bize

Sorti en Suisse (Festival de Locarno) le 3 août 2005

Sorti en Espagne le 25 octobre 2005

Sorti en France le 28 mars 2007

De ce film chilien, le titre, qui signifie « Au lit », traduit avec sobriété aussi bien la forme que le fond. La forme, car les deux seuls personnages de l’histoire quittent rarement le lit de cette chambre de motel où ils sont venus terminer la nuit après une rencontre dont on ne saura pas grand-chose ; le fond, car tous les aspects d’une classique brève rencontre sont explorés.

Au début, le spectateur n’en sait pas davantage que les protagonistes sur leur partenaire, pas même leurs prénoms, qu’ils ne se sont pas dits, ou qu’ils ont oubliés. On aura la confirmation que la fille s’appelle bien Daniela, mais le garçon est-il vraiment prénommé Bruno ? Aucune importance, mais, peu à peu, on saura sur eux tout ce qui compte ; tout, et surtout ce qu’ils se sont appliqué à cacher, car chacun, loi de la dramatisation oblige, dissimule un lourd secret. Lui, version coupable, elle, version victime.

Lorsque le film se termine, on ne sait pas s’ils se reverront. C’est peu probable, car elle va se marier avec un autre, et lui part pour la Belgique afin de passer un doctorat ; pourtant, on le sait à présent, ils sont « faits l’un pour l’autre », comme on dit bêtement.

Tous comptes faits, ce film est bien meilleur que Nuit d’été en ville, autre huis-clos avec Marie Trintignant et Jean-Hugues Anglade, qu’avait réalisé Michel Deville en 1990, et qui traitait d’un sujet analogue. Le réalisateur, ici, s’appelle Matías Bize, et les acteurs, Blanca Lewin et Gonzalo Valenzuela. Ils sont parfaits.

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L’éveil de Maximo Oliveros

Lundi 9 avril 2007

Réalisé par Auraeus Solito

Titre original : Ang pagdadalaga ni Maximo Oliveros

Sorti aux Philippines (Philippine Independent Film Festival) le 13 juillet 2005

Sorti en France le 4 avril 2007

Le titre français est pudique : il ne s’agit pas, dans celui d’origine (le tagalog), de l’éveil de Maximo, mais de sa puberté !

Après un film chilien, un film philippin. On n’avait vu aucun film de ce pays depuis la mort accidentelle de Lino Brocka, survenue en 1991. Tout comme son aîné disparu, Auraeus Solito, dont c’est le premier film, traite de sujets sociaux et ne quitte pas le petit peuple de Manille. Sujet : la pédophilie, mais à rebours, puisque ici, c’est le garçon de douze ans qui est amoureux d’un homme adulte et le drague avec autant d’obstination que de ferveur. Situation bien plus courante qu’on le dit...

Maxi est donc fou d’amour pour Victor, policier de son quartier, âgé d’environ vingt-cinq ans. Tout le monde, alors, va lui tomber dessus, pensez-vous ? Pas du tout. S’il y a quelques grincements, ce n’est ni sur la question d’âge, ni sur celle du sexe, c’est parce que le bien-aimé, qui est policier, entend exercer pleinement son métier ! Or l’enfant, orphelin de mère, vit en toute harmonie avec son père et ses deux frères, qui sont toujours à la limite de l’illégalité ; en clair, ils vivent du produit de leurs vols. Un jour, l’un des frères aînés tue un étudiant, et Victor, qui a des soupçons, tente d’arracher la vérité à Maxi. Représailles, les deux frères tabassent le policier, puis le père le menace de mort. Mais un nouveau patron est nommé au commissariat, et apparemment, c’est un ancien truand, qui a un compte à régler avec le père de Maxi, puisqu’il le flingue sous les yeux de Victor... et de Maxi, qui a tout vu. Du coup, Maxi n’aime plus Victor. Jusque là très efféminé, il se remet en garçon, tenue stricte, adieu aux fleurs dans les cheveux, démarche virile, puis il passe devant son ex-ami sans lui jeter un regard, après avoir à peine hésité. Victor n’a plus qu’à pleurer son amour perdu.

Cette histoire très chaste, un peu bancale et filmée en vidéo, a pour principal intérêt de ne porter aucun jugement sur l’homosexualité de Maxi, pourtant aussi visible que le mensonge ruisselant sur le visage d’un candidat au trône présidentiel français. Et c’est tout juste si les machos qui entourent l’enfant lui lancent quelques vannes pas très fines mais d’intention innocente, du type « J’ai une petite sœur (Maxi, donc) très jolie ». D’ailleurs, le gosse n’en a cure, il est aimé et câliné par sa famille. Et Victor, de quel côté penche-t-il ? Maxi, prêchant le faux pour savoir le vrai, tente vainement de lui faire dire s’il n’aimerait pas avoir UNE petite amie, Victor se contente de répondre qu’il voudrait avoir QUELQU’UN de « joli, doux, aimant et simple ». Comme Maxi, donc. Mais ces désirs inexprimés n’aboutissent pas.

Maintenant, imaginez cette histoire transposée en Europe ! Mais non, ne rêvons pas, on enverrait le réalisateur devant le juge Burgaud.

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Demandez la permission aux enfants !

Jeudi 12 avril 2007

Réalisé par Éric Civanyan

Sorti en Allemagne (European Film Market) le 10 février 2007

Sorti en France le 4 avril 2007

Que doivent faire les parents dont les rejetons pourrissent méthodiquement la vie ? Quel saint peuvent-ils invoquer ? Seront-ils contraints de les mettre en présence d’un porteur du gène de la pédophilie – découverte récente du professeur Nicolas Sarkozy ? Le remède est bien aléatoire, compte tenu, non seulement de la relative rareté des individus positifs, mais aussi de la difficulté du dépistage. Faute de mieux, le film préconise plutôt le traitement du mal par le mal, méthode prisée par les disciples de Samuel Hahnemann, ce qui le classe d’emblée au rang des grands films scientifiques, section homéopathie.

C’est ainsi que les trois couples imaginés par les scénaristes se résolvent à imiter leurs héritiers, dignes de la série télévisée Malcolm in the middle : aller manger à la cantine de leur école pour y mettre les pieds sur la table et se battre à grands coups de cuillères de purée ; écouter en pleine nuit des chansons idiotes, au volume maximal ; glander devant la télé en bouffant des sucreries ; jouer à des jeux vidéo en négligeant tout le reste ; faire le mur la nuit pour aller « en » boîte ; parler un langage ordurier en toute circonstance ; considérer le téléphone comme un prolongement naturel de l’oreille externe ; alterner maussaderie et insolence ; et, naturellement, se plaindre de tout, en tout temps et en tout lieu.

Hélas, rien ne marche pour les malheureux parents. À ce stade, le scénario dérape, et ils collent leurs gosses dans ce qu’on n’ose plus appeler une « maison de correction », d’où les salopiots s’évadent au bout d’un quart d’heure... pour aller consulter la psy de leurs parents, qui les remet dans le droit chemin en trois phrases moralisatrices. Et voilà le film par terre !

La fin montre que rien n’est résolu. Mais à quoi d’autre s’attendre ? Le film a le derrière entre deux chaises, par manque d’audace. Oublions.

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Sunshine

Vendredi 13 avril 2007

Réalisé par Danny Boyle

Sorti en Allemagne (Bochum Fantasy Filmfest Nights) le 23 mars 2007

Sorti en France le 11 avril 2007

Disqualifié pour bêtise. Danny Boyle, venu de la télévision, s’est fait connaître avec Trainspotting, en 1996, et il était déjà évident qu’on avait là un très mauvais réalisateur. Or cela ne s’est pas arrangé depuis !

Au départ, une histoire d’anticipation qui en vaut une autre, en dépit d’un postulat antiscientifique : le Soleil s’éteint, les Terriens vont le « réanimer » en lui expédiant une bombe nucléaire. Sic. On voit mal quelle puissance explosive pourrait avoir un tel effet, mais passons. Or la mission scientifique se passe mal, et il s’avère bientôt que les sept ou huit techniciens envoyés vers l’astre solaire ne pourront pas revenir. Certains, victimes de divers incidents, y laissent d’ailleurs la vie bien avant le plongeon final.

L’embêtant est que, pour traduire les divers incidents et conflits qui vont traverser l’histoire, le réalisateur table sur les effets les plus grossiers du cinéma-spectacle, comme la pyrotechnie (explosions et incendies), les bris de verre, et surtout le vacarme agressif : on n’avait pas entendu autant de fracas dans une salle de cinéma depuis Tremblement de terre et son procédé « sensurround », en 1974 !...

 Très vite, c’est rebutant, or le scénariste aggrave la situation, et tire l’histoire vers le surnaturel, en voulant démarquer Alien. Mais à ce stade, le spectateur a décroché depuis longtemps. Et les multiples références à 2001 : Odyssée de l’espace ne font que souligner la distance entre le chef-d’œuvre de Clarke et Kubrick et leurs piètres émules.

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Anna M.

Mardi 17 avril 2007

Réalisé par Michel Spinosa

Sorti en Allemagne (Festival de Berlin) le 14 février 2007

Sorti en France le 11 avril 2007

Une employée de la Bibliothèque Nationale croit qu’un médecin de l’Hôtel-Dieu est amoureux d’elle. Il n’en est rien, mais elle le harcèle. Après divers incidents qui montrent qu’elle est totalement folle, sa mère la fait interner. Lorsqu’on la croit guérie, elle sort et veut recommencer, mais sa victime a déménagé en province. Quelques mois plus tard, elle le retrouve... et ne fait rien.

La folie extrême d’une femme qui veut s’approprier un homme indifférent a été traitée dans un fim d’horreur, Fatal attraction, avec Michael Douglas et Glenn Close, et surtout par Truffaut, dans L’histoire d’Adèle H, où il était question de la fille de Victor Hugo. Dans ce dernier cas, c’était beaucoup mieux, car Truffaut n’avait pas cherché à multiplier les péripéties, et s’était contenté de filmer la dégradation mentale de son personnage en suivant sa logique à elle. Ici, on est vite lassé par l’accumulation des péripéties et des personnages fabriqués pour les besoins du récit – d’ailleurs assez artificiel : si le commissaire de police avait cru le témoignage du médecin, au lieu de mettre en doute, de façon invraisemblable, la parole d’un praticien honorable (dans la vie réelle, entre bourgeois, on se fait davantage confiance), il n’y aurait pas de film !

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Le vieux jardin

Mercredi 18 avril 2007

Réalisé par Sang-soo Im

Titre original : Orae-doen jeongwon

Sorti en Espagne (Festival de San Sebastián) le 24 septembre 2006

Sorti en France le 11 avril 2007

À Séoul, un militant socialiste, opposant au gouvernement, a été condamné à une longue peine de prison. Il sort au bout de dix-huit ans, et son amour de jeunesse, une femme professeur, est morte entre-temps, laissant une fille. Il la retrouve, mais tout a changé.

Le film, construit sur de nombreux retours en arrière, est à la fois militant et nostalgique. Faute d’être coréen, le spectateur ne comprend pas tout, et l’attrait des interprètes ne suffit pas à compenser l’aspect conventionnel du récit. Le meilleur est dans les scènes de violence entre étudiants et policiers. Mais enfin, cela reste en retrait des autres films coréens qu’on a pu voir les années précédentes. Et la musique sollicite un peu trop l’émotion.

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A casa nostra

Jeudi 19 avril 2007

Réalisé par Francesca Comencini

Sorti en Italie (Festival de Rome) le 20 octobre 2006

Sorti en France le 18 avril 2007

Le grand Luigi Comencini, décédé il y a quelques jours, a eu trois filles, comme Orson Welles ou le roi Lear : Cristina, Paola et Francesca, toutes dans le cinéma. La première est scénariste, la deuxième, productrice, et la troisième, réalisatrice. C’est celle-ci qui réalise ce film – son onzième.

Il faut avouer que l’intrigue paraît au début assez embrouillée. Elle mêle, à Milan (peu montrée, et pas de façon très attrayante), quelques personnages dont surnagent une femme policier, un artiste au métier mal défini, un ancien meurtrier, quelques prostituées, un homme d’affaires évidemment véreux, bref, toute la galerie habituelle des films noirs. Mais le spectateur voit mal à quoi tend tout cela, faute d’intentions affirmées. On est peu ému et à peine intéressé.

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Les vacances de Mr Bean

Vendredi 20 avril 2007

Réalisé par Steve Bendelack

Titre original : Mr. Bean’s holiday

Sorti à Singapour le 22 mars 2007

Sorti en France le 18 avril 2007

Les vacances de Mr Bean

Film franco-britannique, dû à Steve Bendelack, réalisateur de télévision, dont le premier film de cinéma, The league of gentlemen’s Apocalypse (2005) n’est pas sorti en France. Le titre est ouvertement calqué sur Les vacances de monsieur Hulot, de Jacques Tati, et en utilise certains éléments, par exemple le fait que le personnage principal ne s’exprime que par borborygmes – ce qui est vite pesant, comme tous les systèmes.

Le film est visuellement inventif, et beaucoup de gags sont de qualité. Le chiendent nous est infligé par l’interprète Rowan Atkinson : s’il est doué pour la pantomime (il se sert fort bien de son corps), ses grimaces perpétuelles sont hideuses, fatigantes et rarement en situation.

On passera sans s’y attarder sur l’invraisemblance des péripéties, car il ne s’agit pas d’un film réaliste ; inutile donc de chercher la petite bête. Mais le film a failli sombrer pour une erreur de scénario : en effet, très vite, Bean se voit adjoindre un compagnon, un petit garçon russe de dix ou onze ans, joué par Max Baldry, épatant comme le sont toujours les acteurs enfants britanniques (il parle vraiment le russe et a joué Césarion, fils de César et de Cléopâtre, dans les deux derniers épisodes de Rome), personnage à ce point réussi qu’il tend à effacer la vedette officielle. Or cet enfant est mis à l’écart au bout d’une demi-heure, et son absence se fait d’autant plus sentir que Bean, alors, s’égare dans des péripéties d’intérêt bien moindre. Il revient pour les séquences de fin au Festival de Cannes, heureusement... mais elles sont plutôt ratées, il faut le dire.

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Jean de La Fontaine, le défi

Lundi 23 avril 2007

Réalisé par Daniel Vigne

Sorti en France le 18 avril 2007

« Et cela fait paraître de coupables pensées », où donc le Molière du film est-il allé pêcher cet alexandrin de treize syllabes, dont on est censé comprendre qu’il est extrait de Tartuffe ? Le vers 862, au début de l’Acte III, dit « Et cela fait venir de coupables pensées ». Que sont donc des pensées qui « paraissent » ? Mais on sera indulgent pour le dialoguiste, car, pour une fois, aucun personnage ne s’adresse au roi en lui disant « Majesté » – bourde qui figure dans la totalité des films où paraît, justement, un monarque.

Cela mis à part, ce n’est pas le premier projet séduisant qui aboutit à un échec. Sur La Fontaine, on a peu écrit et pas du tout filmé. Il faut avouer que l’existence de cet homme de lettres prête peu à l’imagination : tout comme un certain nombre d’écrivains, il n’a guère vécu que pour son art et n’a connu que peu d’évènements. Au vingtième siècle, Isaac Asimov fut un exemple illustre de ce type d’artistes. Dès lors, la tentation est grande de scénariser, c’est-à-dire de créer des événements n’ayant jamais eu lieu, mais propres à rendre intéressant le héros. Or, ici, on tombe dans l’excès jusqu’au ridicule, en montrant Colbert acharné à persécuter La Fontaine, devenu résistant anti-royaliste, sous le prétexte que le fabuliste était un ami de Nicolas Fouquet, bête noire de Colbert et de Louis XIV ! La vérité est que la Fontaine, comme sa célèbre mouche du coche, ne représentait pas grand-chose pour le roi et son tout-puissant ministre. Il n’a donc été ni favorisé ni persécuté. Et toute cette histoire n’est que pure fantaisie.

Oui, mais, comme je le remarque souvent dans ces pages, à ce compte, il n’y aurait plus de film...

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Love (et ses petits désastres)

Mercredi 25 avril 2007

Réalisé par Alek Keshishian

Titre original : Love and other disasters

Sorti au Canada (Festival de Toronto) le 9 septembre 2006

Sorti en France le 25 avril 2007

Luc Besson n’a pas collaboré au scénario, bien que co-producteur du film, et cela se sent, car c’est très intelligent et sophistiqué : on pense à ces comédies d’Hollywood, comme Diamants sur canapé, plusieurs fois cité dans le film. Il est impossible de résumer la cascade de quiproquos qui viennent embrouiller ces histoires d’amour entre personnages déjà hors normes, puisqu’ils travaillent tous dans le monde artistique, la mode notamment.

On prend son plaisir à un dialogue pétillant, qui n’épargne pas les modèles en place. Ainsi, le beau Santiago Cabrera, dans la peau d’un photographe que tout le monde a cru gay, exécute en une phrase le fameux All about Eve, film archi-célèbre de Mankiewicz, et dont je croyais être le seul à estimer idiot le scénario (Bette Davis en victime, vedette du théâtre se faisant supplanter par une fille de vingt ans plus jeune, un peu comme si Audrey Tautou piquait ses rôles à Jeanne Moreau).

À la fin, l’histoire qu’on vient de suivre est convertie en un scénario dû à l’un des personnages, puis Hollywood en fait un film « beaucoup mieux éclairé » que dans la vie, avec des vedettes qui flanquent tout par terre. Et tout le monde est mécontent. C’est la vie !

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Le candidat

Vendredi 27 avril 2007

Réalisé par Niels Arestrup

Sorti en Allemagne (European Film Market) le 9 février 2007

Sorti en France le 11 avril 2007

Entre les deux tours d’une élection présidentielle, un candidat se prépare au débat télévisé qui doit l’opposer à son adversaire. Tout cela se passe dans un château dont on sort très peu, entre les membres bénévoles ou rétribués d’une équipe de « communicants » : pas une seule réunion publique, aucun voyage en province, rien. Et le candidat ignore que son gourou – joué par le réalisateur – n’a aucune envie de le voir élu !

Si la date de sortie du film est due au hasard, il est malencontreux, car la réalité dépasse de loin la fiction qu’on nous montre ici. Et le spectateur se demande où veut en venir le réalisateur Niels Arestrup. Ce qu’il nous montre est si anodin et si déconnecté de la réalité qu’on en reste pantois. La vraie campagne électorale qui se déroule en ce moment est infiniment plus riche en révélations et en coups tordus...

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Les films militants

Samedi 28 avril 2007

Pourquoi les meilleures causes sont-elles si souvent défendues par de mauvais arguments ? À intervalle régulier, des films prétendent réveiller nos consciences endormies, mais ils le font trop fréquemment par des arguments biaisés (expression polie pour éviter d’écrire « des mensonges éhontés »). Circonstance aggravante, la presse répercute automatiquement les assertions qu’on nous assène, et ne vérifie rien. Rappelez-vous Le cauchemar de Darwin, ou Supersize me, ou Une vérité qui dérange. Aujourd’hui, c’est We feed the world, alias Le marché de la faim. La publicité martèle le slogan du film : « Chaque jour à Vienne, la quantité de pain inutilisée, et vouée à la destruction, pourrait nourrir la seconde plus grande ville d’Autriche, Graz... ». S’est-on donné le mal de vérifier cette énormité ? Population de Vienne : 1 700 000 habitants ; population de Graz : 287 000 habitants. Rapport : 5,9. Les restes de pain de six habitants SUFFISANT à en nourrir un septième ? Concluez vous-même...

Comme on dit, plus c’est gros, mieux ça passe. Et, comme d’habitude, dans un mois, dans un an, on découvrira que le beau slogan était un bobard. Trop tard, le film aura fait le plein de spectateurs convaincus d’avance.

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Une jeunesse chinoise

Lundi 30 avril 2007

Réalisé par Lou Ye

Titre original : Yihe yuan

Sorti en France (Festival de Cannes) le 18 mai 2006

Sorti en France le 18 avril 2007

Titre international et traduction exacte du titre chinois : Summer palace, Dieu seul sait pourquoi. Pour une fois, le titre français est plus approprié.

La presse semble avoir beaucoup apprécié ce film. La raison simpliste en est que le réalisateur, Lou Ye, s’est fait interdire de travailler pour une durée de cinq ans, par les autorités de son pays, qui n’ont pas apprécié que l’épisode de la place Tien-An-Men et de sa répression sanglante figure au nombre des péripéties de cette interminable chronique.

Mais fallait-il être naïf pour croire que ces grands démocrates, auxquels leur conception de la justice expéditive a valu un grand coup de chapeau de la part de madame Royal, en visite sur la Grande Muraille de Chine, laissent passer l’incartade !

– Et le film, bougre d’andouille, parle-nous plutôt du film, entends-je glapir dans mon oreillette.

Je veux bien, mais quel film ? Cette histoire de deux étudiants qui, à intervalles réguliers, s’envoient sinistrement en l’air sur un fond musical au piano ou au violoncelle, filmée en gros plans pris en caméra portée, et dont la totalité des plans est grisâtre et d’une laideur qui dépasse les normes, est d’un ennui si épais qu’il doit, lui, et contrairement à la Grande Muraille citée plus haut, être visible depuis la Lune (ladite Muraille ne l’est pas).

Une jeunesse chinoise ne fait que confirmer l’évidence : le véritable cinéma chinois est fait à Taïwan, pas à Pékin.

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Sites associés :    Yves-André Samère a son bloc-notes films racontés

Dernière mise à jour de cette page le jeudi 1er janvier 1970.