Œuvres citées (en italiques, autres que des films) : Les demoiselles de Rochefort – Model shop – Lola – La grande évasion – Peau d’Âne – Dead Heat on a Merry-Go-Round – Un truand – Les plages d’Agnès – Paradis : espoir – Paradies: Hoffnung – L’intervallo – The artist – Le goût des autres – Hannah Arendt – Eichmann à Jérusalem – Les gamins – Sous surveillance – Running on empty – À bout de course – Butch Cassidy and the Sundance Kid – Enfance clandestine – Infancia clandestina – Orange mécanique – Kill Bill – Une vie simple – Tao jie – L’hypnotiseur – Hypnotisören – Safe haven – Raccrochez, c’est une erreur ! – Sorry, wrong number – Stoker – Old boy – Dracula – Le tour d’écrou – Downton Abbey – Prison break – Shadow of a doubt – L’ombre d’un doute – Le passé – Raghs dar ghobar – Copie conforme – Like someone in love – Une séparation – La fête du feu – Les enfants de Belleville – Blancanieves – Tu seras un homme – La cage dorée – Le pont de la rivière Kwaï – Alata – Out in the dark – The bubble – Gozashte – Room 237 – The shining – Faux raccords – Lolita – Barry Lyndon – Full metal jacket – Orange mécanique – 2001: A space odyssey – Eyes wide shut – Spartacus – Docteur Folamour – Opération Lune – Tel père, tel fils – Nobody knows – Still walking – La graine et le mulet – La vie d’Adèle – Le bleu est une couleur chaude – Les parapluies de Cherbourg – L’homme des vallées perdues – Shane – Swing time – Une place au soleil – Géant – La plus grande histoire jamais contée – Je dois tuer – Suddenly – The call – The machinist – Vertigo – Le crime était presque parfait – Je suis supporter du Standard – Préparez vos mouchoirs – Le petit lieutenant
Personnes citées : Harrison Ford – Jacques Demy – Agnès Varda – Anouk Aimée – Bernard Girard – Ulrich Seidl – Peter Greenaway – Leonardo Di Costanzo – Michel Hazanavicius – Jean-Pierre Bacri – Agnès Jaoui – François Mitterrand – Roger Hanin – Margarethe Von Trotta – Hannah Arendt – Martin Heidegger – Jean-Paul Sartre – Adolf Eichmann – Adolf Hitler – Anthony Marcano – Sandrine Kiberlain – Robert Redford – Sidney Lumet – River Phoenix – Paul Newman – Benjamín Ávila – Ann Hui – Tao jie – Roger Lee – Lasse Hallström – Alfred Hitchcock – Anatole Litvak – Chan-wook Park – Bram Stoker – Henry James – Michelle Dockery – Dan Stevens – Wentworth Miller – Alfred Hitchcock – Asghar Fahradi – Bérénice Béjo – Tahar Rahim – Ali Mosaffa – Abbas Kiarostami – Benoît Cohen – René Féret – Jules Sagot – Ruben Alves – Danièle Delorme – Hugo Gélin – Pierre Boulle – Michael Mayer – Eytan Fox – Marion Cotillard – Marlene Dietrich – Eva Braun – Rodney Ascher – Stanley Kubrick – William Karel – Hirokazu Koreeda – Abdellatif Kechiche – Éric Neuhoff – David Lynch – Julie Maroh – Gary Lockwood – George Stevens – Fred Astaire – Ginger Rogers – James Dean – Alan Ladd – Jack Palance – Brandon DeWilde – Frank Sinatra – Brad Anderson – Halle Berry – Joel Schumacher Riton Liebman – Bertrand Blier
On n’associe pas forcément le nom d’Harrison Ford, vedette hollywoodienne typique et surpayée, avec celui de Jacques Demy, réalisateur très français, qui a donné au public nos meilleures comédies musicales – les seules bonnes, en fait. J’ai rédigé un article sur la meilleure, Les demoiselles de Rochefort, et une exposition des œuvres de Demy se tient en ce moment à la Cinémathèque, du 10 avril au 4 août.
Pourtant, c’est bien dans un film de Jacques Demy que Ford a failli débuter en vedette. En 1965, juste après le triomphe du film dont je viens de parler, Demy, en compagnie de sa femme Agnès Varda et de leurs deux enfants, s’installe à Los Angeles, où il a l’intention de tourner un film, Model shop (ce film, dans lequel Anouk Aimée reprenait son personnage créé dans Lola, s’est fait, est sorti en 1969, et n’a eu aucun succès, car tourner à l’étranger est presque toujours une erreur, de sorte que Demy est revenu l’année suivante en France pour y faire Peau d’Âne). Or un producteur avait présenté Ford à Demy, qui le voulait pour le rôle principal. Après avoir été figurant en 1963 dans La grande évasion, il n’avait jusqu’alors joué, sans être cité au générique, que dans un film de 1966 resté confidentiel, Dead Heat on a Merry-Go-Round (en France, Un truand, de Bernard Girard, sorti chez nous à une date inconnue). Mais Demy n’a pas pu engager Ford, qui était alors sous contrat avec la Columbia (pour 115 dollars par semaine), car cette firme, qui produisait aussi le film de Demy, n’a pas voulu laisser Ford y jouer, et a engagé Gary Lockwood à sa place – choix dont le réalisateur a été « très affecté », comme le raconta plus tard Agnès Varda.
Cela n’a pas empêché Harrison Ford et la famille Varda-Demy de rester très amis. Et Ford a fait une apparition dans Les plages d’Agnès.
Réalisé par Ulrich Seidl
Titre original : Paradies: Hoffnung
Sorti en Allemagne (Festival de Berlin) le 8 février 2013
Sorti en France le 24 avril 2013
C’est le dernier film de la trilogie tournée par Ulrich Seidl, et j’ai le regret de dire que c’est le moins intéressant. Le premier film était passionnant quoique son sujet, la quête de l’amour physique tarifé par des dames mûres dans un pays sous-développé, était susceptible de scandaliser pas mal de gens coincés ; le suivant intéressait par la description du comportement aberrant d’une folle que Jésus obsédait. Ici, on se livre à une sorte de reportage dans un centre d’amaigrissement pour jeunes, surtout des filles : ils sont seize, il n’y a que deux ou trois garçons dont la caméra se désintéresse, et tout tourne autour de Melanie, jeune blonde à la limite de l’obésité, qui a jeté son dévolu sur le médecin chargé de superviser leur régime sportif et alimentaire – dont on ne verra quasiment rien.
Dragué par sa patiente, ce médecin lui accorde imprudemment quelques entrevues dont on ne verra rien non plus, puis, après une escapade nocturne qui a valu à Melanie, ivre, d’être à deux doigts de se faire sauter par un garçon qui voulait épater son copain en se payant une grosse fille, la pauvre Melanie se voit signifier de cesser son harcèlement par le docteur un peu gêné d’être allé plus loin qu’il le souhaitait. Et l’histoire s’arrête là.
Le meilleur du film réside dans les conversations entre filles, qui ne parlent évidemment que de garçons et de sexe, ces dialogues étant improvisés. Le pire, évidemment, est le manque d’intérêt que cette histoire inspire.
J’ai néanmoins noté un détail de mise en scène : Seidl est-il un admirateur de Peter Greenaway ? Il s’arrange souvent pour que ses décors – réels et filmés par une caméra immobile – soient symétriques. Le genre de trait qui laisse tout le monde indifférent, inutile de le préciser !
Réalisé par Leonardo Di Costanzo
Sorti en Italie (Festival de Venise) le 4 septembre 2012
Sorti en France le 1er mai 2013
Ce film d’un débutant dans le long métrage (un téléfilm et cinq documentaires forment le reste de sa carrière) est un monument d’ennui, typiquement fait pour être présenté dans un festival et être ensuite oublié. Le scénario est vide, et seul l’immense bâtiment désaffecté, situé à Naples, a semblé motiver le réalisateur : était-il censé être une fabrique, une usine, un entrepôt, autre chose ? Comment se fait-il que cet endroit lugubre et laid dispose d’un parc qui a tout d’une jungle ? Très vite, on ne voit plus que d’un œil morne les tribulations de ce couple, un jeune homme pauvre (il vend des légumes avec son père) et une fille rétive mais qui s’apprivoise peu à peu, et que des mafieux ont demandé au garçon de surveiller pour la journée.
Le son est bon, l’image aussi, l’atmosphère créée par le décor (on a tourné dans un ancien hôpital psychiatrique, abandonné) est réussie, mais il ne se passe absolument rien. À la fin, le compagnon de la fille vient la récupérer et le garçon part retrouver son père.
Il ne manque que l’essentiel : une bonne histoire. Les intentions ne suffisent pas.
Michel Hazanavicius est un cinéaste qui, fort des cinq Oscars que The artist a remportés à Hollywood l’année dernière, peut parler avec la certitude qu’on l’entendra. Or, à onze jours de l’ouverture du festival de Cannes, il s’exprime dans « Le Monde » d’hier pour dénoncer « la dangereuse inflation » qui menace le système de financement du cinéma français.
Depuis trois décennies, tous nos ministres de la Culture nous ont servi le même refrain : le cinéma français se porte bien. Cela, sous le prétexte qu’on réalise en France entre 180 et 220 films – en oubliant de mentionner que beaucoup sont des coproductions avec l’étranger. Mais ces gens-là, seraient-ils de gauche, raisonnent en capitalistes, ils se gargarisent de la quantité quand il faudrait penser à la qualité des films que la France finance. Résultat : les Français croient fermement à ce qu’ils appellent « l’exception culturelle française », confirmant qu’ils sont bien le peuple le plus vaniteux de la Terre (ne sont-ils pas les meilleurs amants, n’ont-ils pas la meilleure cuisine, et ne possèdent-ils pas « la plus belle avenue du monde » ? Sic).
Que dit Hazanavicius ? Que, si quelques films réalisés en France s’exportent et sont reconnus internationalement (il pense bien sûr au sien, qui pourtant n’a pas été réalisé en France, mais seulement financé), en revanche, cette prétendue bonne santé « s’explique moins par la supériorité de ses talents que par la subtilité de son mode de financement ». En bon diplomate, il vise sans le nommer le Centre National du Cinéma et sa commission de l’avance sur recettes, qui subventionne les films à condition qu’ils soient d’expression française, grâce à une taxe de 11 % prélevée sur la vente des billets de tous les films qui sont projetés chez nous – même s’ils sont étrangers. Or ce système permet à des débutants n’ayant jamais appris le métier de réaliser leur premier film, qui, neuf fois sur dix, n’a aucun succès, perd donc de l’argent, et l’avance n’est pas remboursée. Je suis d’ailleurs en train de faire un pointage de ces amateurs qui, piston aidant (l’un d’eux a son père à Canal Plus et sa mère au CNC), ont pu faire leur premier film et connu un tel bide qu’ils n’ont pu en faire un second. Je mettrai le résultat en ligne quand j’aurai terminé, c’est facile à faire mais assez long.
Hazanavicius dénonce aussi, mais sans les nommer, les profiteurs de ce système pervers : les producteurs, réalisateurs, scénaristes, acteurs et techniciens se fichent bien que leur film ait ou non du succès et soit rentable, car ils se sont payés AVANT de le tourner, au moment du financement. Sans doute soucieux de ne se brouiller avec personne, il ne cite aucun nom, mais on pense au couple Bacri-Jaoui, qui, favori du CNC et de la commission d’avance sur recettes, vit depuis treize ans (quand leur film Le goût des autres a été réalisé) sur ce système : ils perçoivent par avance deux salaires d’acteurs, deux salaires de scénaristes et un salaire de réalisatrice. Puis, lorsque leur film est sorti, ils s’inscrivent au chômage et touchent pendant dix mois les indemnités calculées sur leur salaire habituel... Et tant pis si tous les films qu’ils ont sortis ensuite ont été des insuccès. Ce système lui aussi est pervers. Sous Mitterrand, on a su que Roger Hanin, son beau-frère acteur... et communiste, s’en était ému, et avait tenté d’obtenir que ce dispositif soit au moins réformé. J’ignore s’il a été entendu.
Ces questions m’intéressent depuis assez longtemps, et j’ai rédigé une dizaine d’articles qui les traitaient. Naturellement, dépourvu de notoriété, je n’avais aucune chance d’être entendu, mais veuillez noter que j’ai été plus rapide et plus constant, puisque le premier de ces artices date du... 26 décembre 2003 ! Plus de neuf ans. Il faut croire que cela se voyait déjà... Or il me semble difficile d’aimer le cinéma et d’ignorer ces faits.
Voici les liens vers ces articles, tout y est, et on peut toujours les consulter :
Réalisé par Margarethe Von Trotta
Sorti au Canada (Festival de Toronto) le 11 septembre 2012
Sorti en France le 24 avril 2013
Hannah Arendt était une philosophe allemande, qui avait été l’étudiante puis la maîtresse de Martin Heidegger – celui-là même dont Sartre s’est « inspiré » pour construire sa philosophie de l’existentialisme. Comme elle était juive, elle quitta le pays pour aller en France, où elle connut son mari, mais, après l’invasion de la France par les nazis, les Français les enfermèrent au camp d’internement de Gurs. Tous deux purent en sortir parce qu’ils avaient obtenu un visa pour les États-Unis, et ils s’installèrent à New York.
Or, en mai 1960, les services secrets israéliens capturèrent en Argentine un criminel de guerre nazi qu’ils recherchaient depuis longtemps, et qui avait pu se réfugier à Buenos Aires grâce à la célèbre « filière des rats » mise en place par le Vatican. Adolf Eichmann avait été un haut fonctionnaire du Troisième Reich, un officier SS, et naturellement, un membre du parti nazi. Il avait surtout été responsable de la logistique, c’est-à-dire de l’identification et du transport des Juifs vers les camps de la mort. Capturé, il fut donc transféré en Israël, et son procès devait se tenir à Jérusalem en avril 1961.
Hannah Arendt fut envoyée à Jérusalem par le journal « The New Yorker » afin de couvrir le procès, mais les articles qu’elle en rapporta firent scandale, car elle soutenait qu’elle croyait Eichmann quand il affirmait qu’il n’avait rien contre les Juifs. Il n’avait, disait-il, fait qu’obéir aux ordres, et les désirs du Führer primaient tout ! Hannah ne remarquait en lui qu’un homme médiocre, simple fonctionnaire docile et qui ne voyait aucune implication morale dans son travail. Elle estima que ces crimes reposaient sur l’incapacité des nazis à penser, et sur leur manque d’imagination, qui les auraient empêchés de se mettre à la place de leurs victimes – ce qu’elle appela « la banalité du mal », concept qui la rendit célèbre... et lui valut une impopularité insensée. Mais surtout, elle avait écrit (et elle refusa de modifier son livre Eichmann à Jérusalem) que la société juive en Allemagne et en Pologne étant très organisée, ses chefs avaient collaboré avec les nazis, et que si les Juifs n’avaient pas eu cette hiérarchie religieuse, il en serait résulté beaucoup moins de morts, car les nazis n’auraient pas « bénéficié » de cette organisation !
Inutile de dire qu’on l’accusa de tout, notamment de justifier les atrocités nazies, bien qu’elle n’ait cessé de répéter que « comprendre n’est pas pardonner » (elle a d’ailleurs approuvé la condamnation à mort par pendaison d’Eichmann). En somme, on lui faisait grief de penser en philosophe plutôt qu’en juive....
Le film est une sorte d’exploit, car il consiste, via un certain nombre de conversations, de controverses, voire de disputes, à transmettre la pensée d’une philosophe parfois jugée arrogante, mais qui, tout en n’ayant jamais eu prise sur les évènements importants, ne transigeait pas. Inutile de dire que, seul à dire quelque chose, il domine toutes les autres sorties de films actuellement.
Réalisé par Anthony Marciano
Sorti en France et en Belgique le 17 avril 2013
Ce n’est pas extraordinairement fin, et certaines scènes ont fait froncer le sourcil aux gens coincés, mais tout de même, ce film est beaucoup moins vulgaire et un peu plus inventif que ceux de Judd Apatow, cinéaste très droitier que la critique porte aux nues et dont le cinéaste et son scénariste ont dit s’être inspirés.
L’histoire repose sur le fait que le quinquagénaire Gilbert, ayant vendu sa société, s’ennuie à la maison, et que sa femme Suzanne, très irritante car elle pense davantage aux malheureux Africains qui souffrent tant qu’à son propre mari, lui tape sur les nerfs. Alors, quand leur fille ramène son petit ami chez eux, il conseille au garçon d’éviter à tout prix le mariage. Ils deviennent très amis, et se mettent à faire ensemble les quatre cents coups. Non, Gilbert n’est pas retombé en enfance, il veut simplement faire, en compagnie d’un copain qui est dans les bonnes dispositions, tout ce dont il s’est privé jusque là.
Les gags abondent, et certains sont réussis, surtout la séquence où, à l’UNESCO, Thomas s’est substitué au traducteur français d’une conférence et « double » le discours belliqueux d’un délégué iranien. Lequel, dès lors, est applaudi pour tout ce qu’il n’a pas dit.
Une réserve, mais d’importance : trop de musique ! Et du genre le moins adapté (style de boîte de nuit, y compris sur les scènes qui se veulent un peu dramatiques). J’ai noté dans ces moments-là que, si on coupait le son, le film fonctionnerait tout aussi bien.
Et puis, ne pourrait-on offrir à Sandrine Kiberlain une séance chez un coiffeur ? Elle va de mal en pis.
Pas certain que j’aille voir le film de Redford qui sort aujourd’hui, Sous surveillance, et qui raconte qu’en 1969, pour protester contre la guerre du Vietnam, un groupe de militants commet des attentats, et que, comme toujours au cinéma, l’un d’eux est « poursuivi par son passé » – sic. Il se trouve que ce sujet a été traité en 1988 par un vrai réalisateur, Sidney Lumet, dans Running on empty (en français, À bout de course). La vedette en était River Phoenix, qui jouait le fils, âgé de 17 ans, d’un couple ayant posé une bombe dans une fabrique de napalm, bombe ayant rendu aveugle le gardien de l’usine. Depuis, fuyant le FBI, ces deux repentis traînaient derrière eux leur deux enfants et déménageaient sans cesse, à chaque alerte.
Je viens d’écrire une abomination : en qualifiant Lumet de « vrai réalisateur », je sous-entends que Robert Redford est un mauvais réalisateur. Eh bien, mille regrets, mais c’est parfaitement exact. Redford est une vedette de cinéma qui n’a jamais accepté de n’être que cela, et a voulu jouer un rôle important dans la création. En foi de quoi, il a créé un festival de cinéma bien-pensant, Sundance (du nom de ce film dont il a été la vedette avec Paul Newman, Butch Cassidy and the Sundance Kid), où sortent et sont généralement primés les films qui « font penser ». Comme directeur de ce festival, il est d’ailleurs assez contesté, car il s’en occupe très peu et laisse le travail aux autres.
Réalisé par Benjamín Ávila
Titre original : Infancia clandestina
Sorti en Espagne (Festival de San Sebastián) le 20 septembre 2011
Sorti en France le 8 mai 2013
Y aurait-il une épidémie de films, actuellement, sur la dictature militaire en Argentine en 1979 ? Ou ne nous montre-t-on que ce type de films ?
Comme dans Running on empty dont je parlais hier, et dans le film de Redford que je ne verrai sans doute pas, des révolutionnaires – une famille « péroniste de gauche » (sic) –, membres de l’organisation Monteneros, se sont opposés au gouvernement de leur pays, et ont dû fuir Buenos Aires et les militaires au pouvoir. Mais ils y reviennent sous une fausse identité. De sorte que leur fils Juan, tout comme River Phoenix dans le film de Lumet, doit se faire appeler Ernesto et prétendre venir d’une province dont il ignore tout, y compris l’accent local !
Évidemment, ils sont traqués, prennent des précautions très contraignantes – sortir le moins possible, ne pas contacter le reste de leur famille, cacher Juan dans une pièce secrète aménagée derrière... des caisses de chocolat aux cacahuètes ! Et ainsi de suite.
Mais Juan-Ernesto tombe amoureux d’une jolie camarade de classe, et envisage de fuir avec elle. Hélas, les militaires ont repéré la famille. Oncle et père sont tués, Juan est capturé, interrogé, ne dit rien, et on finit par le déposer devant la porte de sa grand-mère, qui ne vivait pas avec eux. L’histoire ne va pas plus loin.
Le réalisateur fait là son premier long métrage, et n’a pas encore appris la simplicité. Ainsi, les deux scènes de violence physique sont figurées par des dessins, comme dans la séquence du meurtre de la Femme aux chats, dans Orange mécanique ; mais elles sont plutôt inspirées de Kill Bill, et beaucoup trop longues. En outre, avant le générique de début, le prologue est musiqué avec un thème tire-larmes de quelques notes au piano, obstinément répété des centaines de fois sur un fond de violoncelle, comme dans les films prétentieux fabriqués en France ; or le son est beaucoup trop élevé, et le public en ressent une très nette gêne (près de moi, une spectatrice se bouchait les oreilles !). Et puis, il abuse du gros plan, comme toujours pris à la caméra portée, sans aucune nécessité puisque la majeure partie des scènes sont assez statiques.
Alors oui, on comprend que le réalisateur a utilisé ses souvenirs personnels pour tenter de montrer la dictature et le monde des adultes à travers les yeux d’un enfant, ce qui a été fait très souvent. Mais cela ne marche pas bien, même si, une fois de plus, on nous prévient que cette histoire est « basée sur des faits réels ». Pour se concilier le spectateur ? Cela commence à devenir très agaçant.
En somme, le genre de película qu’on n’a pas envie de revoir. Dommage, l’enfant joue bien et la prise de son est soignée, réserve faite de la musique.
Réalisé par Ann Hui
Titre original : Tao jie
Sorti en Italie (Festival de Venise) le 5 septembre 2011
Sorti en France le 8 mai 2013
Un film simple. Et un beau film. Pour une fois, une de ces histoires « basées sur des faits réels » ne cherche pas à nous donner une leçon d’humanisme, et se contente, à petites touches, de raconter l’histoire d’une vieille domestique, au service de la même famille depuis soixante ans.
Roger, quadragénaire célibataire, est un producteur hongkongais de cinéma, à son aise pécuniairement, mais pas toujours très regardant sur l’éthique, puisqu’on le verra magouiller au moins deux fois : l’une, pour obtenir d’un financier une extension du budget d’un film ; l’autre, pour obtenir que déguerpisse, d’un appartement familial qu’il veut récupérer, un locataire qui s’accroche.
Roger a une gouvernante dévouée, Ah Tao, servante de ses parents depuis quatre décennies. Mais la vieille femme, dont la santé fléchit, veut entrer dans une maison de retraite, or celle qu’il a trouvée non loin de chez lui ne brille ni par la qualité de ses chambres, ni par celle de sa nourriture. Il entreprend alors de s’occuper d’elle comme elle s’est occupée de lui. Mais elle meurt en son absence, alors qu’il était allé, pour une semaine, en Chine continentale.
Le titre original est le nom de la véritable gouvernante (décédée) du scénariste, Roger Lee, qui est réellement producteur de cinéma. Plusieurs célébrités du cinéma de Hong-Kong font une apparition dans le film.
Réalisé par Lasse Hallström
Titre original : Hypnotisören
Sorti en Suède et en Espagne (Festival de San Sebastián) le 28 septembre 2012
Sorti en France le 8 mai 2013
Lasse Hallström est un estimable réalisateur suédois qui n’a pas la réputation qu’il mérite, peut-être parce qu’il a travaillé trop longtemps aux États-Unis, où les talents des étrangers sont en général stérilisés. Ici, il revient en Suède après vingt-cinq ans, pour y filmer un drame glaçant (et sans jeu de mots) tiré d’un roman à succès de même origine. Mais il a, depuis, fait un autre film... aux États-Unis, Safe haven, pas encore sorti en France.
Les deux personnages principaux de L’hypnotiseur sont un inspecteur de police qui enquête sur une série de crimes, et, bien sûr, un hypnotiseur : un homme a été massacré dans un gymnase, et sa famille, chez elle, l’a été ensuite. Seul survit le fils, Josef, qui doit avoir seize ou dix-sept ans, et qui, gravement blessé, est dans le coma. Or, unique témoin, il importe qu’on puisse le faire témoigner, mais seul cet hypnotiseur est capable de le faire parler. Il s’avèrera que c’est Josef qui a tué sa famille, puis s’est poignardé volontairement. On apprend peu à peu qu’il avait été adopté, et que sa mère biologique l’a poussé à ces crimes.
Seule la cohérence de la mise en scène et l’interprétation réussissent à camoufler les énormes invraisemblances dont le scénario est truffé. Tout d’abord, le principe même du film : l’hypnotiseur parvient à faire PARLER un blessé plongé dans le coma ! On demande à voir. Et puis, Josef dit qu’il aime ses parents biologiques, mais il ne les a jamais rencontrés et ne sait pas qui ils sont. De plus, sa mère biologique, infirmière folle, réussit à l’inciter au meurtre de toute sa famille d’adoption puis à se poignarder ensuite lui-même, rien qu’en lui écrivant une lettre ! Enfin, croyant enlever son fils, elle enlève un autre garçon qui se trouve être le fils de l’hypnotiseur... Bravo donc au réalisateur, mais pas au scénariste !
La fin est spectaculaire : la criminelle et le garçon qu’elle a enlevé sont dans un autobus qui, roulant sur un lac gelé, crève la glace et commence à s’engloutir. Le garçon est sauvé in extremis, et la méchante meurt noyée dans l’eau glacée. Hitchcock aurait pu tourner ce genre de scène. Mais il n’aurait pas accepté de couper trois quarts d’heure de son film, comme dans le cas présent, au risque d’obscurcir le déroulement de son histoire et de la rendre inacceptable. Néanmoins, cela reste distrayant.
Réalisé par Anatole Litvak
Titre original : Sorry, wrong number
Sorti aux États-Unis le 1er septembre 1948
Sorti en France le 30 septembre 1949
Ressorti en France le 8 mai 2013
Henry Stevenson a épousé pour son argent Leona Cotterell, riche héritière d’un empereur des produits pharmaceutiques. Mauvais calcul, car son beau-père, qui le méprise, l’a confiné dans des emplois où il n’a rien à faire, et, réduit au rôle de compagnon de sa femme, il n’a guère que « trois repas par jour et un peu d’argent de poche » pour seules ressources. Pour se procurer l’argent qui lui permettrait de refaire sa vie, il se lance dans un trafic consistant à voler les produits chimiques très coûteux que l’entreprise familiale utilise. Mais il se met dans un mauvais parti, et cela tourne mal.
Bien entendu, la pièce radiophonique (de trente minutes seulement) qui racontait cette histoire le faisait d’une tout autre manière : Leona, devenue invalide – c’était psychosomatique, selon son médecin – veut appeler son mari à son bureau, car il est en retard, mais les mystères de la communication font qu’elle tombe sur une conversation entre deux hommes qui projettent un assassinat pour le soir même à 23 heures 15, où une femme devait être tuée, un faux cambriolage camouflant le crime. La compagnie du téléphone ne peut pas lui donner le numéro sur lequel elle était tombée, et la police de New York a mieux à faire que de partir à la recherche de deux criminels potentiels non identifiés. Leona va donc passer le reste de sa soirée à téléphoner, à une amie, à son médecin, etc., et ces conversations sont illustrées par de multiples retours en arrière que commente la voix chaque fois différente de l’interlocuteur.
Mais on devine le coup de théâtre : la femme qui devait être assassinée, c’était elle ! Et elle est effectivement tuée par les complices de son mari.
La pièce et le film ont eu beaucoup de succès, que justifie ce bon film, réalisé très classiquement et joué par de bons acteurs, même si le scénario a été affadi pour gommer l’histoire initiale du trafic de drogue.
Réalisé par Chan-wook Park
Sorti aux États-Unis (Festival de Sundance) le 20 janvier 2013
Ressorti en France le 1er mai 2013
Chan-wook Park, cinéaste coréen très connu pour Old boy, confirme la fascination des Asiatiques (sauf des Japonais) pour l’horreur racontée de manière suave. À ce détail près que, cette fois, le film est raté, à cause d’un mauvais scénario, et ne peut être vu que pour ses qualités techniques : couleurs, décors, musique, mouvements de caméra. On vérifie une fois de plus qu’un réalisateur qui s’en va travailler à Hollywood, et d’une façon générale hors de son pays, perd une grande partie de ses qualités propres.
Un mot du titre : si cette famille se nomme Stoker, c’est une allusion non déguisée à Bram Stoker, l’écrivain irlandais auteur de Dracula. L’histoire : un architecte, Richard Stoker, meurt le jour du dix-huitième anniversaire de sa fille India. On apprendra très tardivement qu’il a été tué par son propre frère, Charles, un malade mental qu’il est allé chercher au Crawford Institute, un asile d’aliénés installé dans une propriété de sa famille. Ce frère est censé guéri, mais Richard lui interdit de se présenter dans la maison familiale ; en compensation, il lui offre sa voiture, les clés d’un appartement à New York et une grosse somme d’argent. « Je t’aime, Charlie, lui dit-il, mais il faut que je t’aime un peu moins ». À quoi Charlie répond « Je t’aime, Richard, mais il faut que je t’aime un peu moins », et... il lui fracasse le crâne avec une grosse pierre !
La mort de Richard passe pour un accident de voiture (?), et, naturellement, Charles se présente à la famille, en oncle affectionné quoique mal connu et qui revient d’un long voyage. Il commence alors à courtiser à la fois sa belle-sœur Evelyn (pauvre Nicole Kidman, réduite une fois de plus à jouer les utilités !) et sa nièce India. S’ensuivront une série de meurtres, celui de la tante Ginnie, celui d’un lycéen qui voulait violer India, une tentative d’étrangler Evelyn, et, pour finir, le meurtre du shérif soupçonneux par... India elle-même. Moralité : le meurtre est dans les gènes de la famille. Ben voyons.
C’est évidemment ridicule, et lourdement souligné par la tentative d’enjoliver ces scènes (geysers de sang arrosant des fleurs). On pouvait trouver un autre biais plus subtil pour traiter de l’influence d’un homme malfaisant sur son entourage, cela a déjà été fait, voyez plutôt Le tour d’écrou (téléfilm anglais d’après le chef-d’œuvre d’Henry James, avec deux des interprètes de Downton Abbey, Michelle Dockery et Dan Stevens). Mais le scénario est l’œuvre d’un amateur débutant, un mauvais acteur, Wentworth Miller, vedette de la série Prison break. Le réalisateur, qui tourne habituellement ses propres scénarios et ne parle pas l’anglais (!), a eu tort de se laisser tenter par le travail d’un autre, surtout inexpérimenté...
Notons qu’on retrouve dans ce film une idée qui a été piquée à Hitchcock : la jeune fille fascinée par un oncle qui se trouve être un criminel : c’est le thème de Shadow of a doubt (en français, L’ombre d’un doute), et on est allé jusqu’à conserver le prénom de l’oncle, Charlie ! La seule réussite réside en ce trait, également emprunté à Hitchcock, faire de ce criminel un homme apparemment sympathique, suivant en cela le principe du maître : plus le méchant est intéressant, plus le film l’est aussi. Hélas, ici, cela ne fonctionne pas.
Demain sort en salles le dernier film du grand réalisateur iranien Asghar Fahradi, Le passé. Pourquoi un vendredi ? Parce qu’il fallait attendre que le film soit présenté au festival de Cannes. C’est un peu idiot de la part des communicants, puisque le film a déjà été montré aux critiques professionnels et que les journaux en ont rendu compte – favorablement.
Contrairement à ses cinq premiers films (nous n’avons pas vu le premier, Raghs dar ghobar), ce dernier film a été réalisé en France, et en français, avec deux interprètes français, Bérénice Béjo et Tahar Rahim (et Ali Mosaffa, qui est iranien). Or on ressent un peu de crainte : pourvu que Farhadi ne suive pas la même voie qu’Abbas Kiarostami, naguère plus grand réalisateur iranien, qui, dès lors qu’il a voulu travailler en dehors de son pays, a fait deux mauvais films, Copie conforme en Italie et Like someone in love au Japon.
Sans surprise, la télévision a mis hier soir Fahradi à l’honneur, puisque la chaîne Ciné+ Club a passé trois de ses films, Une séparation, suivi de La fête du feu et Les enfants de Belleville. Hélas, sur ces chaînes filiales de Canal Plus, les sous-titres sont régulièrement défectueux : lorsque la ligne est trop longue, elle est amputée de la fin ; et certains sous-titres ne restent pas assez longtemps à l’écran (parfois une fraction de seconde) pour être lus. Sur Ciné+ Classic, un tiers des sous-titres sont ainsi sabotés. Personne, au siège de ces chaînes « du cinéma », comme dit leur pub, ne regarde comment on diffuse les films ?
Réalisé par Benoît Cohen
Sorti aux États-Unis (Festival de Sundance) le 20 janvier 2013
Ressorti en France le 15 mai 2013
Un film charmant, mais un titre un peu à côté : il ne s’agit pas de faire, du petit Léo, âgé de dix ans, « un homme ». Tout au plus, de le garder en l’absence de son père et de le sortir de son mutisme maussade, grâce à un baby-sitter, entendez un précepteur, a priori totalement incompétent et un peu largué. Léo lit beaucoup et il écrit de mauvais poèmes, Théo ne lit pas et ignore tout du théâtre, par exemple (confrontation rigolote avec des comédiens débutants, vers la fin), mais il a de la fantaisie et un solide optimisme. Très vite, Théo dégèle Léo, et ils deviennent les meilleurs amis du monde. Mais Léo et Théo sont allés un peu trop loin, avec une escapade imprévue en Normandie.
Finalement, le père, un redoutable casseur d’ambiance, et sa mère, névrosée qui a peur de tout et ne quitte jamais sa chambre, vont redevenir des êtres humains normaux. Mais Léo les a précédés depuis longtemps !
Le metteur en scène fait jouer son propre fils et sa compagne, mais comme ils sont parfaits, je ne parlerai pas, pour une fois, de népotisme à la manière de René Féret. Originalité : le jeune acteur, Jules Sagot, qui joue le baby-sitter, a réellement été celui de l’enfant, bien auparavant ! Et il a écrit la première mouture du scénario. Curiosité : Internet Movie Database l’ignore, aussi bien comme acteur que comme scénariste.
C’est la première fois, depuis que je possède une carte UGC (elle est née le 29 mars 2000), que je paye ma place pour entrer dans une salle de cinéma. En treize ans, je n’avais jamais déboursé un centime. Or, bien qu’elles se trouvent sur la liste de celles qui l’acceptent et où l’on ne paye rien, à Paris, les salles Saint-André-des-Arts – mauvaise surprise ou sale blague – ne vous admettent pas gratuitement : il faut payer 5 euros.
Abus de confiance, donc, et je vous invite à voir le film ailleurs !
Réalisé par Ruben Alves
Sorti en France (Festival de l’Alpe d’Huez) le 17 janvier 2013
Ressorti en France et en Belgique le 24 avril 2013
Si vous étiez un entrepreneur portugais de travaux publics travaillant à Paris, et que votre plus important client vous proposait un gros chantier tout en vous associant à ses affaires ; si vous étiez concierge dans un immeuble de luxe à Passy et que les résidents, contents de vos services depuis trente ans, vous proposaient d’agrandir votre loge ; verriez-vous dans tout cela une catastrophe ? Oui, si, au même moment, vous héritiez au Portugal de l’immense maison et de l’entreprise familiale, à condition d’aller y vivre !
Cette aimable comédie de mœurs est dûe à un réalisateur lui-même portugais, surtout acteur de télévision en France, et qui fait ici son premier long-métrage, produit par Danièle Delorme et co-écrit par son petit-fils, Hugo Gélin. En vertu d’une règle non écrite de l’écriture du scénario, on devine dès le début que les Ribeiro, malgré tous ces obstacles, vont accepter de retourner dans leur pays, et l’on s’en réjouit pour eux.
Cette règle dont certainement vous n’avez jamais entendu parler est celle-ci : lorsque le début d’une histoire envisage un important changement de situation, il n’est pas envigeable que ce changement ne survienne pas, quelles que soient les difficultés. Sans cela, le public se sent frustré. Souvenez-vous de cet film à succès, Le pont de la rivière Kwai : dans le livre de Pierre Boulle dont il est tiré, le pont construit par les soldats britanniques prisonniers des Japonais, et que les alliés avaient le projet de dynamiter, ne sautait pas. Or le public n’aurait jamais accepté d’être privé d’une scène à grand spectacle. Dans le film, par conséquent, le pont saute bel et bien, et les spectateurs, qui n’attendaient que cela, sont satisfaits ! Ici, c’est un processus identique (oui, je sais que ce rapprochement est saugrenu, mais au moins, vous ne lirez pas la même chose dans tous vos journaux).
La réalisation décrit le milieu portugais de Paris avec sympathie, ce qui est bien le moins ; et l’histoire, cousue de fil blanc, dénuée de tout conflit sérieux, ne donne pas, du moins, dans le manichéisme qui sévit trop souvent au cinéma.
Réalisé par Michael Mayer
Titre international : Out in the dark
Sorti au Canada (Festival de Toronto) le 7 septembre 2013
Sorti en France le 22 mai 2013
Le scénario semble répondre au désir d’accumuler les catastrophes sur deux amoureux qui ne demandent rien d’autre que de vivre ensemble, et il force un peu la dose : Nimer est un jeune Palestinien qui vit dans sa famille à Jérusalem, et qui, étudiant la psychologie, va une fois par semaine suivre des cours à Tel-Aviv. Roy est un jeune avocat israélien qui travaille dans le cabinet de son père, à Tel-Aviv également. Ils se rencontrent, découvrent qu’ils s’aiment, mais tout le monde va s’en mêler.
D’abord, la police secrète israélienne découvre leur liaison, et supprime le permis autorisant Nimer à venir à Tel-Aviv, chantage à la clé : on le lui rendra s’il fournit des renseignements sur le camp d’en face – or Nimer a un frère aîné, Nabil, une brute, qui cache des armes afin de commettre des attentats contre les Israéliens. Nimer ne dénonce personne, ne peut plus venir à Tel-Aviv, et, pour tout compliquer, son frère et sa mère, très homophobes, découvrent sa liaison, avec un Israélien pour ne rien arranger ! Nimer est chassé par sa famille, passe clandestinement à Tel-Aviv, et son frère est arrêté sans qu’il l’ait dénoncé. Quant à Roy, la police secrète fait également pression sur lui afin de savoir où se cache Nimer. Mais Roy a rendu service à un mafieux, et obtient que Nimer, embarqué sur un bateau, gagne le large : ils se retrouveront en France, terre de liberté.
Il faut avouer qu’on comprend mal pourquoi la police israélienne s’obstine à traquer Nimer, qui n’est pas dangereux, et ne peut lui être d’aucune utilité, puisque son frère a été capturé. C’est l’inconvénient de vouloir trop en faire.
Toutes les scènes sont nocturnes, et les deux acteurs, sympathiques, font que le public s’identifie à leurs personnages. Mais c’est loin d’être un grand film, à cause de ses excès et de ses approximations. Je ne suis allé le voir que pour pouvoir le comparer à The bubble, film d’Eytan Fox sorti en 2005, qui montrait aussi les amours contrariées d’un Palestinien et d’un Israélien, et dont on peut penser que le réalisateur-scénariste (débutant) de Alata s’est beaucoup inspiré pour le début de son histoire. Mais là, l’histoire se terminait très mal, et le scénariste avait encore davantage chargé la barque.
Réalisé par Asghar Fahradi
Titre iranien : Gozashte
Sorti en France le 17 mai 2013
Une histoire de famille recomposée, à la limite de la décomposition. Pour son premier film français après cinq films en Iran, son pays, Fahradi conserve ses méthodes : écrire un scénario qui donne un rôle essentiel aux femmes, qui procède par additions de couches successives de révélations, chacune amenant un mini-renversement de situation et relançant l’intérêt (ce qui permet de tenir le public en haleine pendant deux heures et dix minutes), et filmer avec minutie les éléments nécessaires au récit, dans un cadre contrôlé avec rigueur (et saluons le cadreur, qui n’a pas la tremblote et réussit des images impeccables, ce qui est rarement le cas chez les autres réalisateurs). Façon de dire, conjonction rarissime, que Fahradi est aussi bon réalisateur que scénariste,
Alors, bien sûr, après tant de louanges depuis Une séparation, qui a d’ailleurs permis de sortir en France trois autres films l’ayant précédé – mais on aimerait bien voir le tout premier, resté inédit chez nous, Raghs dar ghobar, réalisé en 2003 –, certains commencent à montrer de l’agacement, et murmurent que cette méthode tourne au procédé. Le reproche n’est pas entièrement gratuit, mais on ne peut faire grief à un auteur de creuser son propre sillon, l’essentiel étant, comme d’autres l’ont dit bien auparavant, de plaire au public.
Pour le reste, le thème général est encore la fragilité des familles, les mensonges et les erreurs, et le fait déjà relevé ici que, dans les films de Fahradi, au fond, personne n’est coupable. Il y a aussi ce parti-pris de ne jamais donner de fin à son histoire, et, en l’occurrence, le plan final, qui évite l’épilogue traditionnel, est d’une originalité rarement vue. Quoique... c’est drôle, il y a exactement la même conclusion dans Blancanieves ! Ce doit être dans l’air...
Notons qu’on tremble à l’idée que le rôle féminin principal, dans lequel Bérénice Béjo est excellente, aurait pu être tenu par l’envahissante Marion Cotillard, aussi adéquate que Marlene Dietrich l’aurait été en Eva Braun !
Le film est raconté ICI.
Réalisé par Rodney Ascher
Sorti aux États-Unis (Festival de Sundance) le 23 janvier 2012
Sortie prévue en France le 17 mai 2013
C’est tout à fait par hasard que je suis tombé sur ce film, dont l’affiche m’avait intrigué : elle représente la moquette du célèbre Hôtel Overlook, dans The shining, moquette que j’ai eu l’honneur de fouler, comme je l’ai rapporté dans ma notule sur l’exposition Kubrick à la Cinémathèque française en 2011.
Ce Room 237 est une curiosité, car il fait une exégèse très particulière dudit film, par une poignée de ses admirateurs, et que les ayants-droit de Kubrick rejettent. En effet, loin de l’analyser à la manière des critiques portant l’estampille officielle, ils émettent quelques théories – non démontrées – sur les intentions du réalisateur, qui ne s’est jamais exprimé sur le sujet puisqu’il ne donnait pratiquement pas d’interviews. Également, ils relèvent les multiples erreurs de réalisation, ce qu’on appelle « faux raccords », dont sont truffés les films de Kubrick, et dont l’émission en ligne Faux raccords, sur le site d’Allociné, a donné quelques aperçus en deux épisodes, les 42 et 43, qui décortiquent The shining, précisément, mais aussi Lolita, Barry Lyndon, Full metal jacket, Orange mécanique, 2001, Eyes wide shut, Spartacus et Docteur Folamour.
Sur les intentions du réalisateur, les hypothèses que le film avance sont tirées par les cheveux : le désir de parler de la Shoah, et surtout une certaine légende sur la pseudo-réalisation par Kubrick d’un faux alunissage d’Apollo13 en juillet 1969, légende qui a été abondamment démentie, et tournée en dérision par William Karel dans son film Opération Lune. Il faut dire que les intervenants sont de curieux zozos ! Le premier raconte que, « dès le générique de début, cette vue étonnante prise d’hélicoptère, j’étais terrifié, [...] je me souviens d’avoir été assis au bord de mon siège, essayant de ne pas tomber, je me souviens d’avoir agrippé la boucle de ma ceinture de ma main gauche, [...] comme pour me retenir de tomber du siège, et contrôler ma terreur ». Le générique en question filme simplement une voiture qui roule sur une route de montagne, et ne montre aucun personnage, aucune action. Cette petite fleur sensitive dit qu’il était reporter de l’ABC News à Rome. Ils sont d’un fragile, ces journalistes...
Sur les faux raccords, c’est plus sérieux, car les erreurs dans The shining sont indéniables. Il y a d’abord ces accessoires du décor qui varient ou disparaissent entre deux plans à l’intérieur d’une même scène. Il y a la topographie absurde de l’Hôtel Overlook, dont il est impossible de reconstituer le plan sans tomber sur des impossiblités, et le film insiste beaucoup sur le bureau du directeur, vu au début du film, et qui comporte une fenêtre ouvrant sur un jardin avec des arbres ; mais, d’après les déplacements des personnages, on comprend que cette pièce, située plutôt au centre du rez-de chaussée, ne pouvait donner sur l’extérieur ! Il y a aussi les explorations que fait Danny sur son tricycle, parcourant les couloirs du même rez-de-chaussée ; or, vers la fin de ses promenades, il se retrouve devant la porte de la chambre 237, la chambre du crime, qui est dans les étages ! Comment est-il parvenu jusqu’ici avec son tricycle ? Je sais bien qu’à tout cela, les adorateurs de Kubrick – dont je ne suis pas – objectent que, PUISQUE le réalisateur contrôlait tout, il avait DONC fait exprès de commettre ces multiples et très voyantes erreurs. Curieux raisonnement... Et si, tout simplement, il s’est trompé de temps en temps ?
Difficile d’illustrer tout cela dans cette notule, car il faudrait insérer les séquences animées du film, mais il y a au moins un exemple statique de faux raccord, la scène où Danny joue avec ses petites voitures sur la moquette du couloir. Or, d’un plan à l’autre et sans qu’il ait bougé ni beaucoup déplacé ses jouets, il n’est plus dans la même orientation par rapport aux motifs du tapis. Regardez bien ci-dessous, c’est flagrant.
Pourquoi ces erreurs ? Il y a deux opinions différentes : soit Kubrick s’est trompé ou n’y a pas pris garde, mais ce serait étonnant, disent ceux qui connaissent sa maniaquerie et son souci obsessionnel du détail exact ; soit il a fait exprès, pour laisser des signes cachés à propos de ses intentions profondes, ou, plus banalement, pour exciter la curiosité du spectateur, lequel ne peut manquer de se poser des questions (c’est la version des admirateurs les plus acharnés de Kubrick), et Dieu sait s’il y a surabondance d’élucubrations en ce domaine.
Le film a demandé beaucoup de travail sur le montage des séquences destinées à illustrer les diverses théories, totalement opposées comme on le devine. Il ne convaincra pas grand-monde, probablement, mais il est très divertissant, dans la naïveté même de ses participants.
N’ayant vu qu’un seul film de ceux présentés en compétition à Cannes, Le passé, et l’ayant trouvé capital, c’est celui que j’aurais désiré voir couronné par la Palme d’Or du festival. Mais non, le jury s’est contenté d’attribuer le prix d’interprétation féminine à Bérénice Béjo, qui certes le valait bien, comme on dit dans la pub, mais enfin, cela ressemblait trop à un accessit. Le cinéaste, lui, n’a rien eu, et c’est un camouflet envers le meilleur réalisateur-scénariste qui se soit révélé ces dernières années – opinion que le public confirme.
Il y eut bien ce prix du jury Hirokazu Koreeda pour son Tel père, tel fils, et c’est tant mieux, car ce cinéaste japonais a bien du talent, il l’avait prouvé avec Nobody knows et confirmé avec Still walking, encore meilleur. C’est le chroniqueur des vies de famille désastreuses, il dirige très bien ses acteurs, notamment les enfants, et c’est un excellent dialoguiste.
Mais la principale récompense est allée à un film de ce cinéaste que je trouve calamiteux mais « qui a la carte », Abdellatif Kechiche, réalisateur de L’esquive, dont j’avais dit tout le mal que je pensais pour son film La graine et le mulet, en 2007. Allez lire ma critique, je n’y changerais pas un mot, surtout après tout ce qu’on a pu apprendre de La vie d’Adèle, qui vient donc de triompher à Cannes.
À vrai dire, il y a au moins eu une voix discordante, celle d’Éric Neuhoff. En général, tout en estimant que ce critique figaresque a de l’esprit, je suis rarement d’accord avec lui, mais pour une fois, je ne changerais rien à ce qu’il a écrit dans son journal, qui peut se lire ICI, et qui reprend certains des griefs que j’avais émis en 2007. La conclusion étant que Kechiche est un redoutable emmerdeur qui bourre ses films de scènes inutiles destinées à plaire aux bobos (ici, trois heures avec deux lesbiennes, ce qu’on a trouvé tout à fait neuf et audacieux, alors que David Lynch l’avait fait bien avant lui, quoique en moins long).
Pour ne rien arranger, Kechiche s’est conduit avec ses techniciens comme un esclavagiste méprisant (l’équipe n’est même pas mentionnée au générique de fin), et l’article qui le dénonce est révélateur. Lisez-le aussi. Quant à l’auteur de la bande dessinée Le bleu est une couleur chaude qui a servi au scénario, Julie Maroh, voyez ce qu’elle écrit sur son blog : « Je tiens à remercier tous ceux qui se sont montrés étonnés, choqués, écœurés que Kechiche n’ait pas eu un mot pour moi à la réception de cette Palme. Je ne doute pas qu’il avait de bonnes raisons de ne pas le faire, tout comme il en avait certainement de ne pas me rendre visible sur le tapis rouge à Cannes alors que j’avais traversé la France pour me joindre à eux, de ne pas me recevoir – même une heure – sur le tournage du film, de n’avoir délégué personne pour me tenir informée du déroulement de la prod’ entre juin 2012 et avril 2013, ou pour n’avoir jamais répondu à mes messages depuis 2011 ».
Je ne verrai pas son film, dont on nous assure en outre qu’avec ses trois heures, il ne constitue que la première partie. Je déteste m’ennuyer au cinéma, c’est ainsi, et le vide ne m’attire pas.
Réalisé par Jacques Demy
Sorti aux États-Unis le 11 février 1969
Sorti en France le 14 mai 1969
Ressorti le 15 mai 2013
À Los Angeles, ville atrocement laide mais qu’il dit être le seul à aimer, George Matthews, qui avait fait des études d’architecture à Berkeley mais a quitté son emploi finalement décevant, se trouve, en outre, sur le point d’être envoyé défendre le « monde libre » au Vietnam. De plus, il est velléitaire, probablement paresseux, incapable de s’engager sentimentalement avec sa petite amie en cours, couvert de dettes, et ses copains, aussi fauchés que lui, ne peuvent pas l’aider, donc on va lui saisir sa chère voiture de sport, achetée par caprice.
De guerre lasse, il sacrifie ses derniers dollars pour entrer dans un model shop, boutique où est employée une femme qu’il a suivie sans savoir qui elle était, et dont le travail consiste à se laisser photographier par des amateurs. Cette femme est une Française prénommée Cécile, mais qui a pris le pseudo de Lola quand elle chantait, sept ans plus tôt, dans une boîte de nuit à Nantes. On a reconnu Lola, premier film de Jacques Demy. George fait des photos de Cécile, et en tombe amoureux. Dès lors, il n’a de cesse de la revoir, passe une nuit avec elle, mais ce sera la fin, car, abandonnée par son mari et se trouvant sans ressources, elle n’a économisé que pour retourner en France où son fils de quatorze ans l’attend.
Ce film, que Jacques Demy a réalisé pour tenter de se faire une place à Hollywood après son double triomphe en France (Les parapluies de Cherbourg et Les demoiselles de Rochefort), a été un insuccès total, et Demy est vite revenu en France pour y tourner Peau d’Âne, qui l’a remis en selle. On a partiellement attribué l’échec de Model shop au fait qu’il n’avait pas pu engager Harrison Ford, mais cette explication convainc peu, car Gary Lockwood, plus connu à l’époque (il avait fait 2001: A space odyssey l’année précédente), est irréprochable dans le rôle principal.
Réalisé par George Stevens
Titre original : Shane
Sorti aux États-Unis le 23 avril 1953
Sorti en France le 1er octobre 1953
Ressorti en France le 27 mars 2013
George Stevens est un très bon réalisateur, un peu oublié aujourd’hui, et c’est grand dommage : il avait tout de même fait Swing time en 1936 (avec Fred Astaire et Ginger Rogers), Une place au soleil en 1951, et Géant, le dernier film de James Dean, en 1956 – et, malheureusement, La plus grande histoire jamais contée, celle de Jésus, en 1965, un pensum de trois heures et quarante-cinq minutes. Son style était d’un grand classicisme, ses images admirablement composées, et le public l’appréciait autant que les critiques.
Ce film qui vient de ressortir et dont le titre français ne veut rien dire (que sont donc ces « vallées perdues » ?) utilise un thème de western, filmé plusieurs fois, celui de l’affrontement entre éleveurs et cultivateurs. Présentement, ce sont les éleveurs qui veulent chasser les cultivateurs pour s’approprier leurs terres et leurs ressources en eau. Ces derniers sont symbolisés par une famille très unie, Joe Starrett, sa femme Marian, et leur jeune fils Joey. Shane, joué par Alan Ladd, un acteur très aimé à l’époque du tournage, est un errant, virtuose du pistolet, mais qui ne veut plus s’en servir pour tuer. Il arrive par hasard dans la famille Starrett et se fait engager comme aide. Mais tous les cultivateurs de la région sont en butte au harcèlement d’un grossium nommé Ryker, qui a sa méthode pour éliminer les gêneurs : les provoquer jusqu’à ce qu’ils se révoltent, sortent une arme et donnent ainsi un prétexte pour les abattre en légitime défense ! Or ce Ryker fait venir dans le village un tueur professionnel, Jack Wilson, joué par Jack Palance, qui a parfaitement assimilé le procédé et abat un pauvre type.
Starrett veut aller provoquer Wilson, mais, persuadé qu’il se fera tuer, Shane l’en empêche en l’assommant, puis va lui-même provoquer Wilson et l’abattre. Cela fait, il quitte le pays.
Le témoin des évènements est le petit garçon joué par Brandon DeWilde, âgé d’onze ans, bon acteur qui était parti pour faire une brillante carrière, mais qui est mort prématurément, à trente ans, d’un accident – il n’avait pas mis sa ceinture de sécurité. Doté alors d’un visage rond et poupin, il va beaucoup s’améliorer en grandissant, devenir très beau et interpréter une quarantaine de films et téléfilms.
L’histoire comporte deux détails curieux. D’une part, le méchant est un Yankee, c’est-à-dire un Nordiste de la Guerre de Sécession, et il abat un gentil Sudiste. C’est peut-être ce qui a fait tiquer certains critiques français, qui dès lors ont détesté le film. Et puis, il y a cette scène où Shane apprend à l’enfant, très demandeur, comment se servir d’un révolver ; la mère désapprouve, et il réplique qu’une arme n’est pas nuisible par elle-même, que c’est celui qui s’en sert qui compte. Elle lui réplique alors : « Nous serions tous plus heureux si personne n’en possédait ». Cette hostilité envers les armes à feu est très rare dans le cinéma hollywoodien, surtout à cette époque, et l’on entend dire le contraire dans Je dois tuer (en anglais, Suddenly), interprété par Frank Sinatra en 1954.
Réalisé par Brad Anderson
Sorti en Russie le 4 mars 2013
Sorti en France le 29 mai 2013
J’aurais dû me méfier : un réalisateur venu de la télévision et qui n’a fait qu’un bon film de cinéma, The machinist (suivi d’un autre en 2008, que je n’ai pas vu), puis qui est retourné à la télé et n’a plus fait que cela, c’est suspect.
Pourtant, le film commence bien, comme un documentaire passionnant sur les méthodes des opérateurs du 911, le service des urgences de la police aux États-Unis. Tout une gamme de cas, des plus tragiques aux plus comiques, sont rapidement exposés, et l’on s’attache à l’inspectrice qui semble être le meilleur élément de Los Angeles, prénommée Jordan, et qui est parfaitement incarnée par cette belle actrice qu’est Halle Berry. Puis on entre dans le vif du sujet, avec l’enlèvement par un détraqué d’une jeune fille, enfermée dans le coffre d’une voiture par le méchant, et qui, ayant conservé son téléphone mobile, parvient à appeler le 911 depuis sa prison ambulante. Or elle ne peut être localisée, car son téléphone est à carte pré-payée
On devine que le reste de l’histoire va résoudre l’énigme et nous faire assister à deux crimes du tueur, dont on saura tout à la fin qu’il enlevait des filles pour leur prendre... leur scalp, afin d’en décorer une tête de mannequin qui puisse lui rappeler sa sœur, morte d’un cancer ! (Soit dit en passant, alors que sa sœur était blonde, pourquoi a-t-il aussi scalpé une fille rousse, dont on aperçoit la chevelure conservée dans son réfrigérateur ? L’accessoiriste n’avait pas lu le scénario ?).
Certte histoire à suspense serait passable, quoique teintée de déjà-vu, si la réalisation était à la hauteur. Mais, sottise classique, on croit soutenir l’action par une bande son fracassante, où un percutionniste fou se déchaîne sur ses timbales et souligne lourdement, c’est le moins qu’on puisse dire, toutes les scènes de violence – et elles ne manquent certes pas ! Bref, poncif digne d’un mauvais cinéaste qui veut donner dans l’horreur.
Conclusion d’un goût douteux, la fille et la policière ligotent le tueur sur un fauteuil et l’abandonnent dans un cave dont nul ne soupçonne l’existence. Il mourra là, lentement et sans aucun secours.
On aura au passage remarqué les deux références à Hitchcock : le tueur veut recréer une femme morte à partir d’une vivante, comme dans Vertigo, et il est poignardé dans le dos avec une paire de ciseaux, comme dans Le crime était presque parfait. Mais cela ne suffit pas à sauver le film... qui n’aurait pas été meilleur si le réalisateur prévu au départ, Joel Schumacher, avait fait le travail.
Réalisé par Riton Liebman
Sorti en France le 29 mai 2013
Maurice, surnommé Milou depuis sa naissance, est moniteur d’auto-école, mais il ne s’intéresse qu’au football, et plus précisément au Standard de Liège, alors qu’il vit à Bruxelles. Cette passion est si envahissante qu’il néglige Martine, une fille à laquelle il donnait des leçons de conduite automobile, si bien qu’elle rompt (rassurez vous, ils vont se réconcilier avant la fin). Pour se tirer de là, il va tenter une désintoxication, et même créer, après sa guérison, les Footballiques Anonymes !
Le réalisateur Riton Liebman a commencé tôt, à 14 ans, dans Préparez vos mouchoirs, de Bertrand Blier, en 1978. Depuis, il est devenu metteur en scène de théâtre, et a joué dans beaucoup de films (dans Le petit lieutenant, il était aux... Alcooliques Anonymes) et téléfilms moins connus. Ce film, qu’on nous affirme autobiographique et qu’il interprète lui-même, est son premier long métrage comme réalisateur, et il est plutôt réussi, comme la plupart des films belges. Même les cinq vaches de la scène du pré ont du talent !
Sites associés : Yves-André Samère a son bloc-notes films racontés
Dernière mise à jour de cette page le jeudi 1er janvier 1970.