Œuvres citées : Plus jamais seul – Nunca vas a estar solo – Marie-Francine – Palais Royal – One kiss – Un bacio – Suntan – Le vénérable W. – Retour à Montauk – Rückkehr nach Montauk – Conspiracy – Unlocked – My beautiful laundrette – Sebastiane – La passion du Christ – Ce qui nous lie – L’auberge espagnole – Visages Villages – À voix haute
Personnes citées : Alex Anwandter – Valérie Lemercier – Lady Diana Spencer – Sabine Haudepin – Ivan Cotroneo – Argyris Papadimitropoulos – Barbet Schroder – Ashin Wirathu – Aung San Suu Kyi – Volker Schlöndorff – Michael Apted – Daniel Day Lewis – Isabelle Adjani – Paul Humfress – Derek Jarman – Mel Gibson – Cédric Klapisch – François Civil – Agnès Varda – JR
Réalisé par Alex Anwandter
Titre original : Nunca vas a estar solo
Sorti en France (Festival de Cannes) le 18 mai 2016
Sorti en France le 26 avril 2017
Film très mal distribué, puisqu’il ne passe que dans une seule salle, et deux fois par semaine seulement. Il est vrai qu’il ne vaut pas grand chose sur le plan du scénario : Pablo, un jeune Chilien qui va sur ses dix-huit ans, est homosexuel. Sa meilleure amie est une lesbienne, il vit avec son père qui feint de ne rien voir, et lui-même, qui étudie la danse, tente de l’enseigner à des enfants dans la rue, ce qui lui vaut pas mal de quolibets, y compris de la part de Felix, son amant qui ne s’assume pas et participe à un tabassage en règle, envoyant Pablo, gravement blessé, à l’hôpital, pour un traitement que le père ne peut pas payer.
La scène de l’agression est plutôt dure, quoique tous les coups sont administrés hors-cadre, mais ensuite, le film sombre dans la banalité et ne suit plus que le père, contraint de voler sa propre entreprise pour trouver les huit millions de pesos nécessaires au paiement de sa dette envers la médecine chilienne.
Aucun des personnages n’est intéressant, pas même la victime, ce qui est un comble.
Réalisé par Valérie Lemercier
Sorti en France le 31 mai 2017
Des cinq films réalisés par Valérie Lemercier, le meilleur était Palais Royal, qui déboulonnait allègrement la statue de la défunte Lady Di, imposteur excessivement vénérée par les Britanniques et la presse du cœur. Ici, en collaboration avec Sabine Haudepin, elle a concocté un scénario qui part un peu dans tous les sens, dont surtout les acteurs parviennent à se tirer, avec quelques réserves. Bref, à cinquante ans et pourvue d’un bon emploi dans la recherche scientifique, Marie-Francine perd à la fois son mari, qui la largue pour une jeunette (laquelle va très vite le larguer à son tour, mais son ex-femme ne voudra plus de lui) et son emploi, puisque l’immeuble où elle travaillait est gorgé d’amiante, donc il faut le fermer pour de (longs) travaux. Faute de mieux, elle retourne vivre chez ses parents, des bourgeois qui la traitent comme si elle avait toujours quatorze ans et lui dénichent un nouveau travail ne lui convenant pas du tout.
Plutôt bien réalisé, le film est moyennement drôle, et on ne croit guère au dénouement un peu trop optimiste.
Réalisé par Ivan Cotroneo
Titre original : Un bacio
Sorti en Italie le 31 mars 2016
Sorti en France le 31 mai 2017
D’abord, pourquoi avoir affublé ce film italien d’un titre anglais qui en est la banale traduction ? Pour sacrifier à l’envahissante anglophobie ?
En outre, le scénario, bien mince, a été vu mille fois : des histoires sur l’homophobie et le harcèlement, on en sort des douzaines chaque année, et la plupart échouent à montrer du neuf. Pour ne rien arranger, le film abonde en séquences chantées qui deviennent vite lassantes, agrémentées de trucages en images de synthèse qui n’ajoutent rien, bien au contraire. Et puis, le scénariste a cru bon d’ajouter des scènes où le fantôme d’un frère mort vient épauler le garçon le plus âgé, lequel regrette de ne pas être mort à sa place ! Ridicule et parfaitement neu-neu.
Finalement, le seul intérêt de ce film qui va dans tous les sens et n’aboutit à rien réside dans l’attrait des deux garçons. Mais on a gâché aussi cet avantage en incluant une fin tragique, qu’un dénouement saugrenu et lui aussi imaginé vient sottement contredire.
Réalisé par Argyris Papadimitropoulos
Sorti aux Pays-Bas (Festival de Rotterdam) le 2 février 2016
Sorti en France le 31 mai 2017
Kostis, médecin à la quarantaine bedonnante, est engagé pour remplacer son prédécesseur décédé, sur l’île grecque d’Antiparos, laquelle, peuplée de seulement huit cents habitants, ne s’anime qu’au mois d’août, quand déferle la vague des touristes étrangers, souvent nudistes. Or il tombe amoureux d’une fille de vingt ans, qui le délaisse après un seul et bref rapport sexuel. Et lorsqu’il lui annonce qu’il l’aime et veut vivre avec elle, toute la bande de ses copains vacanciers se paie sa tête. Alors, ayant sapé sa réputation en délaissant ses patients au cœur de la saison, prié par le maire de quitter son poste, il anesthésie la fille et l’enlève.
On a un peu de mal à croire à cette métamorphose d’un quadragénaire timide se laissant prendre aux mirages d’une petite communauté qui lui est complètement étrangère, et on a encore plus de mal face à la scène finale, qui d’ailleurs ne conclut rien.
Le film, dont les péripéties sont étirées au-delà du raisonnable, en paraît, du coup, interminable.
Réalisé par Barbet Schroder
Sorti en France (Festival de Cannes) le 20 mai 2017
Sorti en France le 7 juin 2017
Ashin Wirathu est un Birman bouddhiste qui, à l’âge de dix-sept ans, se fait moine – état très courant, d’autant plus qu’on ne reste pas moine toute sa vie, on peut en sortir quand on veut. Or lui, contre la volonté de sa famille, décide d’y rester, et... tourne mal, car son esprit se laisse envahir par sa haine pour les musulmans. Il va donc passer le reste de sa vie à verser de l’huile sur le feu, au travers de ses livres et du mouvement ultra-nationaliste et populiste qu’il crée et qu’il appelle « 969 ».
Les adeptes de ce mouvement clament qu’ils n’ont d’autre but que de protéger « la race et la religion », utilisent tous les prétextes pour s’opposer aux « kalals », comme ils disent, prétendent que ceux-ci mettent le feu à leurs propres maisons pour en obtenir de plus grandes grâce à l’aide internationale, et ils se livrent à toutes sortes d’exactions, y compris l’incendie et le meurtre. L’année la plus noire est 2013, qui voit se multiplier les massacres, auxquels le gouvernement militaire birman s’oppose peu, c’est le moins qu’on puisse dire.
Le film horrifie en montrant un aspect du bouddhisme peu connu, puisque cette pseudo-religion prêche la non-violence. Et il mentionne à la fin que la célébrissime Aung San Suu Kyi, qui fut Prix Nobel de la Paix en 1991, ancienne militante d’opposition aux militaires, et qui a conclu avec eux un accord lui permettant d’accéder au gouvernement (elle est conseillère d’État, et dirige le ministère des Affaires Étrangères), ne s’est pas opposée publiquement à la politique répressive des généraux contre la minorité musulmane de Rohingyas. Elle s’est plutôt opposée à la mise en place d’une mission d’information pour faire la lumière sur les crimes dans la région de l’Arakan.
Les politiques français ne sont pas les seuls à tourner leur veste.
Réalisé par Volker Schlöndorff
Titre original : Rückkehr nach Montauk
Sorti en Allemagne (Festival de Berlin) le 15 février 2017
Sorti en France le 14 juin 2017
Film nombriliste, dans lequel le cinéaste, qui n’avait pas démérité jusqu’alors, raconte sa propre vie à travers la vie d’un auteur allemand de romans, venu à New York faire la publicité de son dernier livre. Mais cet écrivain tient à revoir une ancienne maîtresse, quitte à larguer sa femme actuelle. Or l’ancienne maîtresse, une avocate très chère, l’envoie d’abord bouler, avant de lui fixer un rendez-vous à Montauk, une bourgade sinistre (nous sommes en hiver, et tout est gris) à l’extrémité de Long Island, et dont on se demande comment certains commentateurs ont pu y voir des paysages magnifiques !
Mais les personnes que l’avocate, très froide et très ennuyeuse, comptait rencontrer, ne sont pas venues, et les deux ex-amants n’ont rien de mieux à faire que de prendre une chambre dans un hôtel désert, renouer leur ancienne liaison, et... parler. Si bien que ce film, qui ne dure que cent cinq minutes, paraît se traîner sur cinq heures. Les personnages ne sont pas intéressants car ce sont des clichés de la société intellectuelle, et leurs problèmes de cœur, présents ou passés, n’ont rien pour nous intéresser.
Réalisé par Michael Apted
Titre original : Unlocked
Sorti en Italie (Festival de Bari) le 24 avril 2017
Sorti en France le 31 mai 2017
Pourquoi remplacer le titre original, qui signifie déverrouillé, par une telle banalité ? Mais passons. Toute l’histoire tourne autour du personnage joué par Naomi Rapace, qui fait comme dans tous ses autres films : c’est une bagarreuse qui casse la gueule de tout le monde, mais n’en est pas moins intelligente, comme tout membre de la CIA. Tout cela, dans une ambiance de coups de feux, coups de poignard et coups de théâtre.
Mais le fond de l’histoire, qui n’est révélé que quelques minutes avant la fin, est le suivant : des extrémistes états-uniens estiment que leur gouvernement est trop faible avec ses adversaires (voyez les World Trade Center en 1993 et en 2001, puis tous les attentats qui ont suivi). C’est vrai, les dirigeants de Washington ont prouvé leur indulgence excessive avec les deux bombes atomiques sur le Japon, avec la Corée, avec le Vietnam, puis des amusettes comme le Chili, la Grenade, les deux guerres en Irak et l’Afghanistan. Bref, ce gouvernement a besoin d’une piqûre de rappel, et pour cela, quoi de mieux que de... faire mourir massivement quelques milliers de leurs compatriotes ?
Ainsi, en utilisant une poignée de terroristes islamistes, on contaminera, par un virus fabriqué en Russie, quelques centaines de Yankees venus à Londres assister à un match de football. Rentrés chez eux et sans le savoir, ils provoqueront une hécatombe.
Évidemment, la fille que l’on suit d’un bout à l’autre va faire échouer le complot, car nous sommes à Hollywood...
Le récit est très mouvementé, sans doute un peu trop, et les vedettes font leur travail sans se poser trop de questions sur le scénario qui les emploie. Donc, à condition d’être averti et de ne rien prendre au sérieux, on peut voir ce film, qui n’est pas mal fait du tout.
On apprend ce matin que Daniel Day Lewis renonce au métier d’acteur, parce qu’il préfère être... cordonnier. Pourquoi pas ?
Cet acteur, qu’on avait connu à ses débuts dans un bon film, My beautiful laundrette, a tout de même reçu trois Oscars. Père d’un des deux fils d’Isabelle Adjani, il possède sans doute suffisamment d’intelligence pour comprendre que le métier d’acteur n’en est pas un, et que, le plus souvent, on y va d’imposture en imposture.
Beaucoup d’acteurs français devraient l’imiter. Si vous cherchez des noms, lisez les pages que j’ai déjà écrites, ils y foisonnent !
Réalisé par Paul Humfress et Derek Jarman
Sorti au Royaume-Uni en décembre 1976
Ressorti en France le 31 mai 2017
Le centurion Sebastiane, que la publicité du film qualifie absurdement de « magnifique » alors que l’acteur est plutôt moche, appartient à la garde personnelle de l’empereur Dioclétien, mais, chrétien, il a voulu empêcher une exécution, si bien que l’empereur le dégrade et l’exile dans une garnison lointaine située dans un lieu désertique, où ne se trouvent que... sept soldats. Or son nouveau chef tombe amoureux de lui ! Sebastiane aussi trouve ce supérieur « beau comme le Soleil », mais il refuse de sauter le pas, et finira sous les flèches de ses camarades (image ICI).
Il s’agit ici d’une reprise d’un film qui n’avait connu de succès, il y a quarante ans, qu’auprès des homosexuels, car les nus masculins abondent. D’ailleurs, le film ressort, pour de rares séances, dans une salle parisienne très spécialisée, qui programme chaque semaine ce genre de film. En réalité, le seul détail qui avait fait la publicité de ce navet, c’est que les dialogues étaient... en latin, tout comme, plus tard, le film de Mel Gibson La passion du Christ sera dialogué en araméen. Mais les acteurs jouent très mal, la réalisation est cafouilleuse, les deux ou trois scènes de chorégraphie sont interminables et ridicules, et le tout, qui dure pourtant moins d’une heure et demie, semble ne jamais devoir s’achever. En outre, on se garde bien de préciser que, pour le peu qu’on en sait, la cible n’est pas morte d’avoir été criblée de flèches, mais a été battue à coups de bâtons jusqu’à ce que mort s’ensuive. Le prétendu saint, très portraituré depuis la Renaissance et dans des poses ultra-suggestives, est devenu une icône gay à partir du dix-neuvième siècle.
Le co-réalisateur Paul Humfress n’a rien fait d’autre, mais Derek Jarman s’est fait une petite réputation dans le cinéma gay.
Réalisé par Cédric Klapisch
Sorti en France (à Clermont-Ferrand) le 16 mai 2017
Sorti en France le 14 juin 2017
Encore un film sur la famille et ses drames internes... La seule originalité est que tous s’occupent du vin, sujet qui les passionne. Si on ne s’y intéresse pas, ou médiocrement, on trouve le temps terriblement long, et cette histoire, terriblement banale. Seuls les acteurs retiennent l’attention, surtout François Civil.
Klapisch, qui a raté tous ses films après L’auberge espagnole (en 2003, tout de même !), ne parvient pas à redresser la barre. Mais les images de la campagne française sont belles.
Réalisé par Agnès Varda et JR
Sorti en France (Festival de Cannes) le 19 mai 2017
Sorti en France le 28 juin 2017
Non, ce film n’est PAS un documentaire, pas plus que ceux de Michael Moore. C’est une fantaisie sur la rencontre de deux personnages que rien ne destinait à un rapprochement, ne serait-ce qu’en raison de leur différence d’âge (88 ans contre 33 ans) et d’activité. Et donc, les gens déçus ne peuvent s’en prendre qu’à eux-mêmes pour avoir désiré autre chose : un film n’a rien d’une auberge espagnole.
En fait, ce merveilleux film illustre toute la magie du montage, ce qu’Agnès Varda fait très bien et depuis toujours : juxtaposer des séquences n’ayant en apparence aucun rapport entre elles. Avec, parfois, des épisodes un peu douloureux, comme ce rendez-vous avec Jean-Luc Godard, que les deux auteurs sont allés visiter à Dolle, en Suisse, mais ce salaud leur avait fait faux bond (Truffaut avait dit de lui que cétait « une merde »), ne laissant sur sa porte qu’une remarque sarcastique. Ou encore, cette très belle photo d’un jeune homme assis, adossé à un mur (il est mort depuis longtemps) que les deux acolytes ont désiré coller sur un blockhaus de béton qui était tombé sur une plage de Normandie. Travail ingrat mais mené à bien, or, quelques heures plus tard, la marée montante avait tout détruit.
Loin des stupides films de super-héros dont on nous gave, deux beaux films humanistes ont marqué cette année : À voix haute et Visages, villages. Et dans ce dernier, que de recherche, que d’imagination, quelle abondance d’idées !
Sites associés : Yves-André Samère a son bloc-notes films racontés
Dernière mise à jour de cette page le jeudi 1er janvier 1970.