Œuvres citées (en italique, autres que des films) : Vivre me tue – It’s all about love – Romeo + Juliet – The shining – Festen – Tarzan et le secret de la jeunesse – Tarzan and the immortals – Long way home – Raising Victor Vargas – Hulk – Matrix – La recrue – The recruit – Minority report – Le parrain – Exodus – Topaz – L’étau – Les bérets verts – Noí albinoí – Nos meilleures années – La Meglio gioventu – L’outremangeur – Mes enfants ne sont pas comme les autres – Johnny English – L’auberge rouge – I confess – La loi du silence – Douce – Tu ne tueras point – La traversée de Paris – My fair lady
Personnes citées : Jean-Pierre Sinapi – Jalil Lespert – Guillaume Depardieu – Stéphane Guillon – Thomas Vinterberg – Joaquin Phoenix – Claire Danes – Leonardo DiCaprio – Jack Nicholson – Jean-Pierre Cassel – Alfred Hitchcock – Johann Strauss – Edgar Rice Burroughs – Peter Solett – Ang Lee – Roger Donaldson – George Bush – Colin Farrell – Tom Cruise – Michael Moore – Charlton Heston – Charles De Gaulle – Philippe Thyraud de Vosjoli – Leon Uris – Michel Piccoli – Philippe Noiret – Al Pacino – Bruce Willis – George W. Bush – Al Gore – John Wayne – Ray Kellogg – Arnold Schwarzenegger – Ronald Reagan – Dagur Kari – Marco Tullio Giordana – Silvio Berlusconi – Éric Cantona – Richard Bohringer – William Shakespeare – Jean Gabin – Lino Ventura – Richard Berry – Malik Zidi – John Malkovich – Jeanne d’Arc – Claude Autant-Lara – Montgomery Clift – Fernandel – George Cukor
Mon article [Entracte 11] visait les faux comédiens qui plombent la situation des vrais. On ne peut vraiment pas dire que, si beaucoup sont en chômage, c’est parce qu’il n’y a « pas assez de rôles », par exemple ; ça, c’est se foutre du monde. Et même si c’était vrai, faudrait-il que l’État se décarcasse pour « créer des rôles » ? Ce n’est tout de même pas sa mission ! La mission de l’État, c’est d’assurer la sécurité des citoyens, de veiller au respect des lois, de protéger les faibles... pas de jouer les nounous pour des irresponsables qui se sont mis eux-mêmes dans la merde parce qu’ils rêvaient d’être vedettes, de décrocher des Oscars à Hollywood ou de monter les marches du Palais des Festivals à Cannes ! S’il y a un métier qui est soumis à la loi du marché et à la sélection, c’est bien celui-là. Quand on y entre, on le sait d’avance, et il ne faut pas se plaindre ensuite. Par conséquent, j’affirme que le fameux « chômage des comédiens » par la faute de « la société » est un mythe.
Quant au sabotage des festivals, belle preuve de connerie : scier la branche sur laquelle on est assis, c’est malin ! Au bout du compte, empêchés de fonctionner, un certain nombre de petits festivals désargentés vont mettre la clé sous la porte, et il y aura encore moins de rôles qu’auparavant. Qui y perdra ? Tout le monde !
Réalisé par Jean-Pierre Sinapi
Sorti en Espagne (Festival de San Sebastián) le 22 septembre 2002
Sorti en France le 18 juin 2003
Revu Vivre me tue. Le film n’est pas très réussi, en particulier parce que sa construction dans le désordre n’est ni judicieuse ni justifiée. Et les détails biographiques arrivent un peu comme un cheveu sur la soupe (on apprend au milieu du récit que Daniel est vierge, à la fin seulement qu’il est AUSSI homo, et ces deux détails n’ont aucune utilité pour l’histoire, quoique présents dans le roman à l’origine du film).
Mais les deux interprètes sont parfaits. Surprise de voir Jalil Lespert en culturiste un peu débile. Il a dû beaucoup travailler pour se faire le corps qu’il a dans le film. Je l’ai vu à poil à deux reprises (au cinéma. Qu’allez-vous imaginer ?), et il n’avait pas du tout cet aspect-là. En résumé, film mineur, mais pas déshonorant.
Ce qui me frappe, c’est qu’il y a pas mal de bons films en ce moment. Bizarre, bizarre... Je ne sais plus sur quel pied danser. Contrairement à Guillaume Depardieu, qui n’a plus le choix (ne m’engueulez pas, je viens de faire une imitation de Stéphane Guillon).
Réalisé par Thomas Vinterberg
Sorti au Danemark le 10 janvier 2003
Sorti en France le 2 juillet 2003
It’s all about love est un navet interminable, avec Joaquin Phoenix et Claire Danes, dont le cher Leonardo avait dit gentiment qu’elle le « collait » durant le tournage de ce film idiot qu’était Romeo + Juliet. On y voit une patineuse clonée par son staff, de la neige en juillet, des Ougandais volants, un massacre au fusil à lunettes sur une patinoire, une catastrophe climatique qui dure deux minutes, et un type qui n’arrête pas de téléphoner depuis un avion (je ne sais pas si c’est possible. Et comment recharger la batterie ?). Pas compris pourquoi, à la fin, les trois personnages descendent d’un train au beau milieu d’un désert enneigé. Après ça, l’héroïne agonise longuement parce qu’elle est morte de froid, en répétant à satiété « Je t’aime, John », sous une étendue de neige en polystyrène. Au fait, il faudra m’expliquer pourquoi, après plus d’un siècle, le cinéma n’est pas encore parvenu à montrer de la neige crédible à l’écran. Ils ont tout essayé : les plumes, la mousse de savon, le plastique, la neige carbonique... Regardez The shining, dans la séquence de fin, où Nicholson va mourir dans le labyrinthe : la neige, c’est du sel !
Un seul détail marrant : le frère du héros avait peur de l’avion, alors il a suivi un traitement chimique. Mais les docteurs ont trop forcé la dose, et il est condamné à ne plus jamais descendre d’un avion. Il passe donc sa vie en l’air ! Mais ce n’est qu’un gag...
La genèse de ce navet s’explique par deux éléments. D’abord, son réalisateur, Thomas Vinterberg, a connu un succès mondial avec Festen (film qui, à mon avis, ne devait rien à sa mise en scène, plutôt brouillonne, et tout à son scénario – dont on a d’ailleurs tiré une pièce de théâtre, jouée à Paris par Jean-Pierre Cassel). Quand on a connu un succès mondial, on reçoit souvent des offres d’Hollywood. Si on a la faiblesse de les accepter, on se fait bouffer par l’excès de fric (ce film-ci est plutôt coûteux, c’est évident) et détruire par les conventions en vigueur actuellement outre-Atlantique. Il faut savoir qu’aux États-Unis, le réalisateur n’a pas un contrôle total sur ce qu’il filme, et que les studios font réécrire les scénarios par des scénaristes payés au mois et qui marchent à la baguette. C’est ce qui est arrivé.
L’autre explication, c’est que beaucoup de réalisateurs sont tentés de faire « autre chose » que ce qui a permis leurs premiers succès. Résultat : ils font ce qu’ils NE SAVENT PAS faire ! Hitchcock lui-même, qui pourtant pouvait prévoir qu’en s’écartant de ses compétences, il se planterait, est tombé dans le piège trois ou quatre fois, par exemple en filmant une comédie, une opérette ou une biographie de Johann Strauss.
France Inter nous apprend ce matin que le chimpanzé qui jouait dans tous les films de Tarzan, et qui était le même de film en film, vit toujours, à Palm Springs. Comment est-ce possible ? C’est parce qu’il a commencé au cinéma quand il avait deux ans. Il survit donc à ses partenaires humains, avec ses 71 ans qui en font le doyen des chimpanzés.
Ce qui me fournit une digression à ce que je disais hier sur les canons d’Hollywood : tous ceux qui ont plongé le nez dans un livre des aventures de Tarzan, écrits par Edgar Rice Burroughs (livres mal écrits, mal foutus, invraisemblables et répétitifs, mais dotés d’un certain charme) savent que le singe de Tarzan ne s’est jamais appelé Cheetah, qui est le nom du léopard ! Le singe s’appelait Nkima, en fait. Mais les producteurs ont dû estimer que c’était un nom imprononçable, et l’ont rebaptisé.
Les livres de Tarzan (il y a vingt-quatre romans, plus deux recueils de nouvelles) contiennent pas mal de surprises pour quiconque n’aurait connu que les films. Ainsi, Tarzan, qui en fait était le fils d’un lord, quitte très tôt l’Afrique pour aller vivre en Angleterre, il se marie et a un enfant. Mais le bébé est kidnappé, se retrouve en Afrique et revit l’aventure de son père en devenant à son tour un homme-singe. Il prend le nom de Korak (et non pas « Boy », encore une ineptie due aux producteurs de cinéma). Puis ses parents le retrouvent et le rejoignent. On le voit grandir et même se marier. Tarzan passe le reste de sa vie à lutter contre ses deux ennemis mortels, les Allemands et les Arabes trafiquants d’esclaves.
Tout comme Cheetah est le seul survivant des aventures de Tarzan au cinéma, je dois être le seul humain ayant connu les aventures de Tarzan en livre ! Le plus excitant à mes yeux : Tarzan et le secret de la jeunesse (en anglais, Tarzan and the immortals). Lu une bonne douzaine de fois dans mon enfance. Tarzan y saute même en parachute...
Réalisé par Peter Sollett
Titre original : Raising Victor Vargas
Sorti en France (Festival de Cannes) le 16 mai 2002
Sorti en France le 2 juillet 2003
Vu Long way home. En fait, ce n’est pas le vrai titre, car le film s’intitule Raising Victor Vargas, et ce titre « français » a l’inconvénient d’avoir déjà été utilisé plusieurs fois, et même récemment. Donc, une boulette de plus à l’actif de nos chers distributeurs.
Le film est la suite d’un court métrage de 29 minutes du même réalisateur, Peter Solett, avec le même interprète, Victor Rasuk, accompagné cette fois de son petit frère Silvestre. C’est réjouissant, ça déborde de sympathie, et ça fustige au passage les ravages de la religion catholique chez les Latino-Américains, quand la grand-mère qui a recueilli les trois gosses menace de refiler l’aîné aux services sociaux parce qu’elle croit qu’il « donne de mauvais conseils » à son jeune frère (qu’elle a surpris dans les toilettes faisant L’HORRIBLE CRIME que vous devinez).
Ça a dû coûter quatre sous, et c’est parmi les meilleurs films du moment.
Réalisé par Ang Lee
Sorti aux États-Unis le 17 juin 2003
Sorti en France le 2 juillet 2003
Vérification faite, Hulk, sorti au cinéma cette semaine, est un film de propagande contre les OGM. D’ailleurs, le fait que le personnage devienne VERT, ça veut tout dire.
Le film est une grosse connerie, bourrée d’images de synthèse, comme Matrix. Une curiosité : lorsque le personnage se transforme en Hulk sur un coup de colère, son corps devient au moins dix fois plus volumineux, et tous ses vêtements partent en lambeaux... sauf son slip ! Ce doit être une très bonne marque de slip, je ne vois pas d’autre explication.
Réalisé par Roger Donaldson
Titre original : The recruit
Sorti en République Tchèque (Festival de Febio) le 25 janvier 2003
Sorti en France le 11 juin 2003
[À un internaute qui n’avait pas aimé La recrue, estimant que ce film était une propagande à la gloire de la CIA :]
Je n’ai pas non plus apprécié La recrue, même si je ne pense pas vraiment que ce soit un film de propagande POUR la Central Intelligence Agency. C’est l’impression qu’on a au début, parce que le dialogue y incite. Mais il s’avère que les actions de ladite Centrale d’Intelligence se révèlent – à l’usage – tellement négatives, qu’en fin de compte, le spectateur n’en sort pas vraiment dans la peau d’une groupie de l’ex-entreprise de Bush père.
Cela dit, j’avais écrit que Colin Farrell était un très bon acteur et qu’il éclipsait Tom Cruise (pas difficile !) dans Minority report.
[Au même, qui argüait que la CIA avait prêté son concours à la réalisation du film :]
Pas probant. Aux États-Unis, on obtient facilement la collaboration d’un organisme, même si on n’en dit pas du bien. De même qu’un personnage important accepte facilement de rencontrer le premier venu qui lui demande un rendez-vous – voir, dans ses films, Michael Moore rencontrant les chefs d’entreprise qu’il démolit, ou encore Charlton Heston après avoir simplement sonné à sa porte (chez nous, essayez donc, seulement, d’avoir au téléphone la secrétaire d’un grossium, vous m’en direz des nouvelles !). C’est une extension du Premier amendement de la Constitution américaine, qui prohibe toute atteinte à la liberté d’expression. On ne compte plus les films célèbres qui dénigrent l’Armée et qui ont été tournés avec son aide. Il est notoire, également, que Le parrain a été tourné avec l’aide de la mafia, et il ne faisait cettes pas l’éloge de la mafia ! Il est tout aussi notoire que les gens du cinéma détestent le gouvernement et ce qui tourne autour. Seulement, il y a cette nuance qu’on ignore chez nous : ils sont patriotes jusqu’au ridicule. Donc peu dangereux. Ce qui explique sans doute qu’on les laisse faire.
Fiction ou documentaire, ça ne change rien au fond du problème. Question de mentalité. Aux États-Unis, l’idée même d’empêcher quelqu’un de s’exprimer révulse le commun des mortels. Au point que les radios et télés locales qui donnent la parole à la population ont l’obligation de la donner à tout le monde ; ce qui signifie que si une organisation néo-nazie réclame de pouvoir répandre sa propagande, on ne peut pas le lui refuser. Ou alors, c’est le tribunal ! Chez nous, on est très loin de cette façon de voir, et les émissions de radio qui prétendent « donner la parole » aux auditeurs filtrent soigneusement les appels. Il est même interdit de tenir des propos révisionnistes. On peut penser ce qu’on voudra de ces faits, mais il est indéniable que chez nous, la liberté d’expression, souhaitable ou néfaste – ce n’est pas mon propos – s’en trouve réduite.
Qu’on se souvienne des prétendues conférences de presse de De Gaulle, où les questions étaient préparées à l’avance, et posées par des journalistes complaisants. Inconcevable aux États-Unis !
La question était : la CIA a-t-elle ou non inspiré le film La recrue ? Certainement pas, car le cinéma hollywoodien est indépendant des instances politiques, et on voit mal un producteur aux ordres de la CIA : les producteurs d’Hollywood ne visent qu’à gagner de l’argent, et ne militent jamais pour ceci ou pour cela. À ma connaissance, il n’y a qu’un seul exemple où les services secrets des États-Unis ont inspiré, non pas un film, mais un livre. Il s’agissait d’une tentative de déstabiliser De Gaulle en répandant le bruit qu’il y avait dans son entourage un agent soviétique très important. Pour cela, on a utilisé les connaissances de Philippe Thyraud de Vosjoli, ancien chef des services secrets français à Washington, fort lié avec ses collègues yankees ; et engagé un écrivain connu, Leon Uris, l’auteur d’Exodus, qui a ainsi écrit Topaz, une histoire très romancée et très fantaisiste sur ce thème. Le livre a été interdit en France, si si !, mais il était traduit au Québec, ce qui m’a permis de le lire, l’ayant acheté... à Rabat.
Le comble, c’est qu’Alfred Hitchcock en a fait un film, l’un des plus mauvais de sa carrière, avec des acteurs français, dont Piccoli et Noiret. L’étau en français, Topaz en anglais.
[Au même internaute, qui doutait que les gens d’Hollywood soient vraiment apolitiques, et citait Bruce Willis :]
À ce détail près : Al Pacino, qui joue dans La recrue, n’est pas Bruce Willis ! Il refuserait de jouer dans « un clip à la gloire de » la CIA ! En majorité, les vedettes d’Hollywood sont des opposants à Bush. Et on n’y fait guère de films qui militent pour quoi que ce soit, abstraction faite du ton patriotique quasi-général là-bas, mais qui est nationaliste plutôt que partisan : autrement dit, « Vivent les États-Unis », mais pas « Vive Bush » ou « Vive Al Gore ». Une des très rares exceptions, John Wayne signant Les bérets verts (qu’en fait il n’avait pas réalisé, c’était le travail de Ray Kellogg, un spécialiste des effets spéciaux), film plaidant pour la guerre au Vietnam pendant qu’elle se déroulait.
À propos de Schwarzy, on raconte que les lauriers politiques de Reagan le font rêver, et qu’il envisage de se présenter à la Présidence. Il va avoir du mal, vu qu’il est d’origine autrichienne et que son père était nazi. J’ai vu le fac-simile de sa carte du parti.
Réalisé par Dagur Kari
Sorti en France (Festival d’Angers) le 24 janvier 2003
Sorti en France le 9 juillet 2003
Vu Noí albinoí. Noí – se prononce Noé – est un lycéen glandeur mais intelligent, qui vit dans un bled paumé, sis en plein couloir d’avalanche. La preuve qu’il est surdoué : il sait remonter le Rubik’s cube (idée bizarre que les gens se font de l’intelligence : je sais aussi, et je n’ai rien d’un génie).
On voudrait aimer davantage, car c’est un film islandais, donc une rareté. Mais on ne comprend pas très bien où ça va. Dommage, c’était sympathique, et plein de petits détails curieux.
Réalisé par Marco Tullio Giordana
Titre original : La meglio gioventu
Sorti en France (Festival de Cannes) le 19 mai 2003
Sorti en France le 9 juillet 2003
Je viens de voir la première partie de Nos meilleures années, film italien de six heures, fait pour la télé. La suite demain, si je survis à cette chaleur caligulaire (!). Bizarre, les Français ne font jamais ce genre de films : l’histoire du pays à travers celle d’une famille. Les Italiens s’y sont essayé plusieurs fois. Je me souviens de Novecento, de Bertolucci, qui durait aussi longtemps. À propos, ce titre avait été bêtement traduit en français par « 1900 », alors que ça veut dire, à une année près, « Vingtième siècle » (de 1900 à 1999).
Vu la deuxième partie de Nos meilleures années. Je confirme que c’est très bien. On suit quatre membres d’une même famille : la sœur aînée va devenir juge, l’un des frères médecin psychiatre, un autre policier, et la plus jeune sœur va épouser un futur haut fonctionnaire de la Banque d’Italie. Rien que des personnages clés de la vie politico-sociale, donc. Oui, mais le médecin va se mettre en ménage avec une gauchiste qui s’enrôle dans les Brigades Rouges, et il la dénonce avant qu’elle ait l’occasion de tuer. Elle aboutit en prison. Le policier est chargé de réprimer les Brigades Rouges, et il se suicide par chagrin d’amour. Etc. On voit défiler toute l’Histoire de l’Italie sur quarante ans.
Curiosités : il n’est jamais question de Berlusconi, et on ne voit jamais aucun homosexuel. Ce doit être que ça n’existe pas dans ce pays. Ou alors, ils sont tous au Vatican. Oui, c’est sûrement ça.
Comme d’habitude, les sous-titres sont lamentables. Ici, ils sont l’œuvre d’une femme, une démagogue jeuniste (traduire fidanzata par « copine » et amico par « pote ») totalement analphabète (emploi de l’expression « se rappeler DE quelque chose », une horrible faute qui me gonflait déjà quand j’avais six ans ; mais je suis sûr que le dictionnaire Robert doit trouver cela parfait).
Réalisé par Thierry Binisti
Sorti en France le 16 juillet 2003
Je sais que vous A-DO-REZ les spoilers. Alors, voici celui de L’outremangeur. Aucun scrupule, ce film commence assez bien mais finit en eau de boudin. De plus, comme Cantona joue dedans, aucun de vous n’aurait l’idée d’aller le voir en payant.
Donc, Richard, le personnage de Cantona, enfant et futur commissaire de police à Marseille, a dénoncé pour meurtre le père de sa petite amie, qui en est morte. Il se punit en devenant obèse et en restant vierge. Richard Bohringer, lui, a tué son frère parce qu’il couchait avec sa fille Elsa (la fille de Bohringer, pas la fille du frère. Ça va, vous suivez ? Sinon, faut me dire). Le commissaire Richard (mais non, pas Bohringer, relisez le début du paragraphe) soupçonne Elsa, mais, au lieu de l’arrêter, il l’oblige à le regarder manger tous les soirs pendant un an, pour la punir. Mais tout s’arrange, Bohringer avoue, Richard (mais non... l’autre !) maigrit et redevient presque normal, et Elsa tombe amoureuse de lui. Ils se marieront et auront beaucoup de petits footballeurs qui joueront à l’O.M., c’est sûr.
Merci qui ?
Cantona n’est pas pire qu’un autre, et c’est un grand compliment que je fais là. En fait, étant donné que le film n’a pas été écrit par Shakespeare, il n’a pas grand-chose à faire, excepté bouffer comme un goret dans la première moitié du film. Mais la plupart des grandes vedettes ne faisaient rien non plus. Voyez Gabin ou Lino Ventura. Il est du même style : massif.
Réalisé par Denis Dercourt
Sorti en France le 23 juillet 2003
Ce matin, j’ai vu un film sur la musique, Mes enfants ne sont pas comme les autres. Mauvais titre, on a l’impression que lesdits enfants sont anormaux, énoncé comme ça. En fait, c’est plutôt le père qui est zinzin.
Bref, Richard Berry, modeste violoncelliste d’orchestre (et on se demande comment, faisant ce métier, il peut vivre dans une si belle villa, avec de si beaux meubles, des tableaux, un piano à queue, etc.), veut que ses deux enfants deviennent ce que lui n’est pas devenu : virtuoses. Sa fille, Adèle, a dix-huit ans et joue très bien du violoncelle, son fils, Alexandre, a onze ans et joue plutôt bien du piano, mais il s’en fout et s’intéresse surtout aux généraux de Napoléon (!). Le jour où la fille tombe amoureuse du beau Malik Zidi, elle dit à son père qu’elle ne veut plus participer au grrrand concours international qui lui permettrait d’entrer dans une grrrrande école pour virtuoses, à Moscou. Colère du père, mais, pour détourner son attention, le garçon s’écrase volontairement les doigts, ce qui est vachement vraisemblable de la part d’un gosse de onze ans. Et surtout chez un petit sournois qui dénonçait sa sœur quand elle se rendait en cachette à un rendez-vous amoureux. Pour ne pas accabler le père, la fille passe donc le grrrrrand concours, est reçue et part pour Moscou, tandis que son petit frère apprend à jouer... du tambour !
Voilà, vous avez compris que le film est à côté de la plaque. Pourtant, le réalisateur devrait connaître son affaire, il est professeur de musique au conservatoire de Strasbourg. C’est peut-être l’illustration de ce principe selon lequel un médecin ne devrait pas être ministre de la Santé, ni un militaire ministre de la Défense.
Un détail, pourtant, m’a bien plu : les acteurs jouent réellement des instruments, violoncelle et piano. En tout cas, ils ont appris à faire semblant d’en jouer avec vraisemblance, ce qui est assez rare. En général, c’est grotesque de voir jouer du piano à l’écran un acteur qui n’y connaît rien : il caresse les touches d’un air alangui, sans la moindre synchronisation avec la musique, et se dandine de gauche à droite comme le fait un Juif, mais d’avant en arrière, devant le Mur des Lamentations. Si vous avez vu jouer Vladimir Horowitz, qui ne gesticulait pas, vous savez qu’on n’a pas besoin de faire tout ce cinéma pour jouer du piano. Oh, pardon ! C’est Glenn Gould que vous préférez ?
Réalisé par Peter Howitt
Sorti au Royaume-Uni le 6 avril 2003
Sorti en France le 23 juillet 2003
On va encore prétendre que j’ai mauvais goût, mais j’ai vu Johnny English et j’ai bien aimé. C’est beaucoup mieux que Bean. En fait, le film se moque des Anglais autant que des Français – leurs chiottes préhistoriques, par exemple. Il faut entendre John Malkovich, qui joue le rôle d’un Français, parler l’anglais avec l’accent de chez nous : « Le top, le best of, comme disent les Français ! ».
Et c’est vrai que les frenchies collectionnent les mots à consonnance britannique, et qu’ils prennent pour de véritables mots anglais : parking, speaker (dans le sens de « qui parle à la radio »), smoking, tennisman. Aucun de ces mots n’existe dans le sens qu’ils croient, et le dernier n’existe pas du tout.
Les Français ont aussi l’exclusivité de croire à n’importe quoi, notamment à des lubies inconnues à l’étranger : la crise de foie, maladie inconnue, le danger de se baigner pendant la digestion, la graphologie. Cette dernière croyance est si ancrée dans les esprits que même les services publics exigent des lettres de motivation manuscrites !
Pour ne rien dire de tout ce qui entoure les Croisades et Jeanne d’Arc.
Revu L’auberge rouge hier soir à la télé. Comme le film d’Hitchcock I confess (en français, La loi du silence), l’histoire traite d’un prêtre catholique qui a reçu la confession d’un assassin et ne peut pas en parler, alors qu’il devrait le faire, moralement. Mais Hitchcock voulait faire un film sérieux, pas du tout satirique. Alors, il utilise une coïncidence très peu probable : son prêtre, joué par Montgomery Clift, avait un intérêt à la mort de la victime, et il se retrouve finalement accusé du crime. Claude Autant-Lara, lui, fait de son prêtre, joué par Fernandel, un tartuffe qui trouve un autre moyen de dénoncer les criminels... grâce à une boule de neige !
Bizarre, cet Autant-Lara : il a passé sa vie à faire des films de gauche, souvent excellents, comme Douce, son meilleur film, qui raillait les riches, ou Tu ne tueras point, qui militait contre la peine de mort et a été interdit, ou La traversée de Paris, qui fustigeait la Collaboration. Sans compter L’auberge rouge, qui tournait en dérision la religion catholique. Eh bien, il a fini au Front National ! Il a tout de même vécu jusqu’à 99 ans, preuve que ça conserve.
Réalisé par George Cukor
Sorti aux États-Unis le 21 octobre 1964
Sorti en France le 23 décembre 1964
Samedi soir, je me suis repassé My fair lady. Ce film est si délicieusement misogyne que je me suis demandé si ce n’était pas moi qui l’avais réalisé dans un moment de distraction. Très politiquement incorrect, puisque le « méchant » triomphe à la fin.
Souvenez-vous : le professeur Higgins, linguiste londonien réputé, parie avec son collègue et ami Pickering de si bien éduquer une petite fleuriste ignare et vulgaire qu’ils ont ramassée dans la rue, que, six mois plus tard, on pourrait la faire inviter à Buckingham Palace. Il installe la fille chez lui et la dresse comme il convient. Six mois plus tard, le pari réussit, mais les deux compères n’ont pas un mot de félicitations pour la pauvre Eliza, et se congratulent mutuellement. Comme, bien sûr, cette gourde est tombé amoureuse de son professeur, elle est furieuse et quitte le domicile. Mais le lendemain, c’est elle qui met les pouces et qui revient toute seule. Or, aux premiers mots qu’elle prononce, Higgins, qui lui tourne le dos, ne la regarde même pas, s’enfonce avec délices dans son fauteuil et lui réclame ses pantoufles. Fin. J’adore.
Le film est de George Cukor, homosexuel célèbre, et dont on dit qu’il était « le spécialiste des femmes » au cinéma. Ça se voit !
Sites associés : Yves-André Samère a son bloc-notes films racontés
Dernière mise à jour de cette page le jeudi 1er janvier 1970.