Œuvres citées (en italique, autres que des films) : 36 quai des Orfèvres – Commissaire Moulin – Un bon flic – Gangsters – 11 heures 14 – 11:14 – Duel – Holy Lola – Le grand voyage – L’ennemi naturel – Mémoire effacée – The forgotten – X-Files – Wilbur – Wilbur wants to kill himself – Captains Courageous – Autant en emporte le vent – Wizard of Oz – Capitaines courageux – À tout de suite – Osmose – Maria pleine de grâce – Maria full of grace – Les Dalton – Un petit jeu sans conséquence – Volpone – Pas si grave – Les temps qui changent – Loin – Ocean’s twelve – Ocean’s eleven – Saraband – Fanny et Alexandre – Scènes de la vie conjugale – Les sœurs fâchées – Rois et reine – La sentinelle – Benjamin Gates et le trésor des Templiers – National treasure – Da Vinci code – Girl next door – The girl next door – The grudge – Apparences
Personnes citées : Olivier Marchal – Daniel Auteuil – Gérard Depardieu – Greg Marcks – Steven Spielberg – Johnny Hallyday – Bertrand Tavernier – Alain Delon – Nicolas Cazalé – Jalil Lespert – Alain Resnais – Joseph Ruben – Lone Scherfig – Rudyard Kipling – Victor Fleming – Isild Le Besco – Ouassini Embarek – Joshua Marston – Philippe Haim – Morris – René Goscinny – Philippe Haïm – Éric Judor – Ramzy Bedia – Michel Hazanavicius – Bernard Rapp – André Téchiné – Jean Dell – Gérald Sibleyras – Claude Villers – Bernard Rapp – Agnès Jaoui – Jean-Pierre Bacri – André Téchiné – Steven Soderbergh – Henri Jeanson – Benoît Jacquot – Catherine Breillat – Jean-Marie Straub – Philippe Garrel – Jean-Luc Godard – Steven Soderbergh – Vincent Cassel – Ingmar Bergman – Éric Rohmer – Woody Allen – Alexandra Leclère – Isabelle Huppert – Arnaud Desplechin – Emmanuelle Devos – Jon Turteltaub – Nicolas Cage – Diane Kruger – Justin Bartha – Luke Greenfield – Takashi Shimizu
Réalisé par Olivier Marchal
Sorti en France le 24 novembre 2004
Olivier Marchal, ancien policier (les journaux le rappellent sans cesse), fut d’abord le scénariste de séries télévisées, comme Commissaire Moulin sur TF1. Une référence ! Puis il est passé à la réalisation au cinéma, avec Un bon flic, en 1999, resté confidentiel. On a davantage parlé de Gangsters, en 2002, film dans lequel le chef des truands n’était autre que le commissaire, une femme, chargé de l’enquête – un truc mille fois utilisé. Le spectateur avait compris que, pour Marchal, l’ennemi était la hiérarchie.
C’est encore vrai ici, et le spectateur a droit à un épisode de plus de la fameuse guerre des polices qui fait tant recette dans le cinéma français. Dans « Le Figaro », une interview des véritables patrons de la BRI et de la BRB, dont les personnages sont tenus par Auteuil et Depardieu, tourne en dérision le peu de sérieux de ce type de scénario, très caricatural et conventionnel. Inévitable ! Le travail de la police, qui consiste principalement à conduire des enquêtes routinières sur de longs mois, ne se prête pas du tout au spectacle, et la nécessaire dramatisation impose de remplacer tout cela par des séquences d’action, rapides et violentes, qui n’ont que peu à voir avec la réalité.
Bref, Marchal a copieusement chargé la barque : l’un des deux policiers protagonistes a couvert un meurtre, commis par un de ses indicateurs, et l’autre, qui le hait depuis des années, réussit à l’envoyer en prison... pour sept ans ! C’est dire si tout cela est réaliste. Dans la « vraie vie », comme on dit, il s’en serait tiré avec un blâme et une mutation, voire une promotion !
À l’actif du film, une réalisation correcte et des acteurs qui font bien leur métier, notamment Depardieu, enfin sobre (je parle de son jeu). Au passif, une musique abominable, qui jamais ne vous laisse de répit, et sollicite impudemment l’émotion du spectateur.
Réalisé par Greg Marcks
Titre original : 11:14
Sorti en France (Festival de Cannes) le 16 mai 2003
Sorti en France le 1er décembre 2004
23 heures 14, à vrai dire. Un automobiliste un peu imbibé renverse un piéton et le tue. Il le croit, du moins, et le public aussi. En fait, la victime n’est morte ni à cet endroit ni de cette façon. Il y a aussi un second cadavre, et l’histoire, qui implique en tout quatorze personnes, nécessite d’être racontée cinq fois, avec un point de vue différent, le tout étant révélé peu à peu, au grand plaisir du spectateur, qui se laisse promener avec délectation. Le scénario est ironiquement sophistiqué, mêlant une fausse grossesse, une fille volage et ses trois amants, un quatuor de jeunots en goguette, deux parents dépassés, une employée de drugstore, un policier, deux infirmiers, un chien et une statue branlante qui orne une tombe ! Sans compter un pénis tranché accidentellement, épisode qui renouvelle d’originale façon le fameux « coup du lapin ».
En dépit de ce méli-mélo, le paradoxal aspect « rien d’inutile » et la rigoureuse conduite du récit font penser au Spielberg des débuts, celui de Duel. Retenez le nom du réalisateur, Greg Marcks, dont c’est, à vingt-huit ans, le premier long-métrage. Il ira loin.
Réalisé par Bertrand Tavernier
Sorti en France (Festival de Saint-Jean-de-Luz) le 16 octobre 2004
Sorti en France le 24 novembre 2004
Les tribulations d’un couple de Français au Cambodge. Candidats à l’adoption d’un enfant, mais moins chanceux que le très pistonné Johnny Hallyday, ils connaîtront, avant un dénouement heureux, l’amer parcours du combattant infligé à tout étranger qui se trouve confronté, que ce soit en Asie ou en Afrique, à l’administration et à la corruption – et pardon pour le pléonasme.
Ce pourrait être ennuyeux ou lugubre, ça ne l’est pas : Tavernier connaît son affaire.
Un détail cocasse, on apprend que les cigarettes Alain Delon sont vendues au Cambodge. Affiches rouges représentant les Champs-Élysées, avec, en caractères énormes, le nom du dieu vivant... qui contribue ainsi, non seulement au prestige du cinéma français à l’étranger, mais aussi à l’expansion du cancer au Cambodge. Lequel, pays sans aucuns soucis, peut bien s’offrir ce luxe.
Réalisé par Ismael Ferroukhi
Sorti en Italie (Festival de Venise) le 7 septembre 2004
Sorti en France le 24 novembre 2004
Le seul sujet du film est déjà un énorme cliché : un père et son fils s’opposent sur tout, opposition symbolisée par le choix d’un acteur français pour le rôle d’un jeune Arabe ; à la fin, vous l’avez deviné, ils « se comprennent ». Et parce que le film est un de ces redoutables road movies tant appréciés des critiques, il est également bourré des clichés du genre : incidents divers, disputes, rencontres, difficultés matérielles et administratives, etc. Comme ces incidents de parcours sont très peu inattendus, on corse la fin avec un dernier poncif, en faisant mourir le père peu après la réalisation de son rêve, le pèlerinage à La Mecque. Quant aux raisons qui l’ont poussé à entreprendre ce voyage, non par avion, mais par la route – depuis Aix-en-Provence –, obligeant son fils à louper son bac pour lui servir de chauffeur, entreprise absurde mais sans laquelle il n’y aurait pas de film, ces raisons, le spectateur ne les connaîtra pas. C’est dire que ce scénario ridicule n’est guère passionnant, même si la réalisation est acceptable.
Et puis, que veut dire ce film ? Le spectateur est-il convié à admirer, par les yeux « dessillés » du fils finalement orphelin, ce père rigoriste, qui sacrifie tout à son obsession de pèlerinage, tout, et notamment la liberté de ce malheureux Turc, Mustapha, qui, après leur avoir rendu un fier service, est pris pour un voleur par les deux pèlerins ? Lorsque, plus tard, est retrouvé l’argent qu’ils ont cru dérobé, mais que le père a seulement égaré, celui-ci ne fait rien, il ne téléphone seulement pas à la police turque pour dissiper le malentendu ! On ne garde de tout cela qu’une impression de malaise...
Le plus surprenant est d’avoir pu introduire une caméra dans une ville qui n’est certes pas La Mecque (ha ha !)... du cinéma, et surtout, chose prohibée, d’avoir fait déambuler dans la foule des pèlerins un jeune comédien, Nicolas Cazalé, aussi musulman que la reine d’Angleterre.
Interview de Jalil Lespert sur France Inter, à l’occasion de la sortie, le lendemain, de L’ennemi naturel, présenté fin novembre au Festival des films gays et lesbiens de Paris, dans lequel il joue un inspecteur de police qui tombe amoureux du suspect de meurtre sur lequel il enquête – un homme de vingt ans plus âgé. Péripétie très courante dans les milieux de la police, comme on s’en doute.
Cet excellent acteur fournit la preuve de ce qu’on n’ignore plus depuis longtemps : être comédien n’implique pas qu’on soit forcément intelligent et cultivé. Il peine à s’exprimer, accumule les expressions de parler djeunz, souligne à plusieurs reprises que tel sujet « n’est pas de [sa] génération », notamment à propos du film de Resnais dans lequel il jouait un rôle, et fait des fautes grotesques (« des non-z-acteurs », à deux reprises, comme d’autres disent « des super-z-héros »). C’est un peu dommage, mais pas surprenant. De sorte qu’on se demande pourquoi les membres de cette envahissante profession sont invités si souvent à la radio ou à la télévision, afin d’y donner leur avis sur des sujets auxquels, en général, ils ne connaissent ni ne comprennent rien.
Réalisé par Joseph Ruben
Titre original : The forgotten
Sorti au Canada le 24 septembre 2004
Sorti en France le 1er décembre 2004
Telly a perdu son fils de neuf ans dans un accident aérien, et ne s’en remet pas. Or son entourage, mari, psy, amie, affirme qu’elle n’a jamais eu d’enfant. Est-elle psychotique ? Cela commence donc, style aidant, comme une histoire émouvante, humaine, très humaine, sur l’amour maternel. Puis, très vite, on s’égare : Telly n’avait pas tort, et ses prétendus fantasmes sont le résultat d’un lavage de cerveau ; avec, à la clé, complot gouvernemental, inquisition de la National Security Agency, robots à l’aspect humains et autres aspirations brutales et saugrenues de divers personnages en direction de la stratosphère.
On croit rêver devant un tel étalage de stupidités, qui, par comparaison, propulse X-Files au rang de documentaire scientifique le plus rigoureux.
Réalisé par Lone Scherfig
Titre original : Wilbur wants to kill himself
Sorti au Danemark le 8 novembre 2002
Sorti en France le 1er décembre 2004
Le titre original, Wilbur wants to kill himself, livre la moitié de l’histoire : Wilbur est un obsédé du suicide... mais il se rate chaque fois. Son frère Harbour, libraire, veille sur lui tant bien que mal : une vraie perle, Harbour. Puis Harbour se marie avec Alice, Wilbur couche en cachette avec la femme de son frère, Harbour contracte un cancer du pancréas, et Wilbur n’a plus envie de se suicider. Transfert ? Harbour meurt, et Wilbur le remplace en tout.
Ce pourrait être parfaitement sinistre, mais ça ne l’est pas complètement, car les deux frères sont de beaux caractères. La grisaille est davantage dans le décor, Glasgow. La réalisatrice, Lone Scherfig, est danoise, mais elle a tourné son film en Écosse, on ne sait pourquoi.
Noté un nouvel exploit de nos amis les sous-titreurs, ici, une sous-titreuse. Le dialogue mentionne un livre bien connu de Rudyard Kipling, Captains Courageous. Cette histoire d’un gosse de riche, âgé de seize ans, et qui, tombé à la mer d’un paquebot, est repêché par un bateau de pêche, va devoir y rester des mois et y apprendre la vraie vie, a d’ailleurs été portée à l’écran par Victor Fleming, le réalisateur d’Autant en emporte le vent et de Wizard of Oz, et n’importe quel gosse de CM2 la connaît sous le titre de Capitaines courageux. Mais dans Wilbur, les sous-titres, évidemment dus à une personne très cultivée, le rebaptisent « Capitaine Courage », au singulier, et avec une majuscule. Ce capitaine était sans doute un parent de la mère du même nom...
Réalisé par Benoît Jacquot
Sorti en France (Festival de Cannes) le 14 mai 2004
Sorti en France le 8 décembre 2004
À (ne pas voir) tout de suite. Ni même plus tard ! Un film dont l’intérêt n’est pas flagrant... L’histoire, une « cavale » de plus, retient peu l’attention, et les personnages encore moins. Isild Le Besco, déjà dotée d’un visage peu attirant, reste lugubre d’un bout à l’autre du film ; son partenaire, Ouassini Embarek, vu précédemment dans le très raté Osmose, et jugé « beau comme un dieu » par certains critiques, est tout juste gentillet ; et Benoît Jacquot ponctue son film d’une demi-douzaine de scènes de nu complètement inutiles. On perd vraiment son temps.
Réalisé par Joshua Marston
Titre original : Maria full of grace
Sorti aux États-Unis (Festival de Sundance) le 18 janvier 2004
Sorti en France le 8 décembre 2004
Intéressant dans les deux premiers tiers : on analyse minutieusement la manière de faire passer de la drogue aux États-Unis, en bourrant de capsules l’estomac de jeunes femmes élégamment appelées « mules ». Le dernier tiers, après l’arrivée à New York, donne davantage dans l’anecdote, et c’est du déjà vu. Mais enfin, le tout reste honorable.
Réalisé par Philippe Haim
Sorti en France le 8 décembre 2004
En dépit de la dédicace de fin et du très fugitif hommage à « saint Morris » (sic), le film doit peu à Morris, le dessinateur de Lucky Luke, et rien à René Goscinny, son scénariste et dialoguiste. Si le réalisateur Philippe Haïm connaît son métier, s’il a su déborder d’imagination dans ses trouvailles visuelles, le scénario est en revanche d’une sottise consternante – peut-être en hommage à ce quatuor, capable, pour s’évader de prison, de creuser quatre trous, les outlaws les plus crétins de l’ouest (états-unien). Retenez son nom afin d’éviter ses travaux futurs : avec Éric et Ramzy, ses complices, il s’agit de Michel Hazanavicius, le scénariste le plus dangereux de l’ouest (européen).
Réalisé par Bernard Rapp
Sorti en France le 15 décembre 2004
Le Volpone du couple : l’annonce, par jeu, d’une séparation prochaine et purement imaginaire, entraîne une suite de révélations aigres-douces dans l’entourage des intéressés, puis la rupture, bien réelle cette fois. L’intérêt du scénario est de ne pas traiter la situation sur le mode tragique ; son cruel manque d’intérêt est dans la qualité des personnages, tous d’une banalité presque lassante.
Jean Dell et Gérald Sibleyras ont travaillé à France Inter, notamment pour Claude Villers, avant d’écrire la pièce qui a servi de base à ce film. L’origine boulevardière de l’histoire, via la comédie de mœurs dont le cinéma français est le spécialiste mondial et radoteur, est très perceptible. Le film est correctement réalisé, mais Bernard Rapp avait mieux réussi son film précédent, Pas si grave. Ici, on ne dépasse pas le niveau habituel du genre, illustré en particulier par Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri. Attendons son cinquième film...
Réalisé par André Téchiné
Sorti en France (Festival L’industrie du rêve) le 8 décembre 2004
Sorti en France et en Belgique le 15 décembre 2004
Tout comme Loin, du même Téchiné, l’action se passe à Tanger, quoique dans un autre milieu social, et rassemble, en moins vaste, les histoires de plusieurs personnages pas très bien dans leur peau, comme on dit. Mais cette fois, il n’y a plus cette unité de thème qui faisait l’intérêt du film de 2001, l’envie de quitter un pays sans avenir, le Maroc.
On retiendra surtout un Depardieu pataud et déboussolé, bien meilleur que dans ses rôles plus exubérants, tout attaché à faire, de son premier amour vieux de trente et un ans, son dernier amour. Rien ne semble devoir combler ses vœux... mais il y parvient à la dernière image. Ouf ! Le reste est un peu schématique, et pas très intéressant, pour tout dire.
Réalisé par Steven Soderbergh
Sorti aux États-Unis le 8 décembre 2004
Sorti en France le 15 décembre 2004
Des réalisateurs qui, de son temps, fabriquaient des films abscons, Henri Jeanson disait qu’ils faisaient du cinéma « où le public est de trop ». Il ne faudrait surtout pas croire que cette espèce de metteurs en scène est éteinte ! Benoît Jacquot, Catherine Breillat, Jean-Marie Straub, Philippe Garrel et quelques autres, dont leur maître à tous Jean-Luc Godard, alimentent toujours la flamme.
Mais notre époque si inventive a su apporter sa pierre à l’édifice, et nous connaissons aujourd’hui une sous-catégorie de cette branche artistique : les « films de copains » – en anglais, les buddy movies. En France, c’est principalement le milieu de la télévision qui s’avère le meilleur fournisseur. Il suffit qu’un rigolo, ou plus souvent un tandem de rigolos, ait connu un petit succès dans une émission pour jeunes, en général sur Canal Plus, pour que le prurit de la réalisation commence à exercer ses ravages. Avec les fabuleux résultats que l’on connaît. Aux États-Unis, le phénomène reste confiné à Hollywood, et le dernier film de Soderbergh en est la meilleure illustration, puisque cette production ne répond qu’à un seul impératif : pour les participants de son précédent chef-d’œuvre, Ocean’s eleven, « refaire un film ensemble ».
Au bout du compte, un film à l’imagination aussi paresseuse que la réalisation. Ainsi, les deux « clous » du film sont bâclés comme rarement auparavant. Avec le premier, la bande est censée soulever une maison d’Amsterdam au moyen de puissants vérins immergés sous les eaux d’un canal, mais on ne sait ni comment ces vérins ont été installés, ni comment les cambrioleurs ont pu se les procurer, et en si peu de temps ; on ne voit pas non plus l’effet produit sur la maison, puisque le dialogue seul mentionne l’exploit ! Avec le second, Vincent Cassel est censé traverser une salle de musée protégée par un réseau de rayons lasers qui la balayent aléatoirement. On le voit faire une série d’acrobaties, mais, visiblement, les rayons lasers ont été dessinés ensuite pour correspondre à ses mouvements, et c’est si ringard que la séquence ferait pitié à un gosse de douze ans. Ajoutons que les péripéties, plutôt mornes, restent assez incompréhensibles auprès du public, qui ne semble pas s’amuser énormément. Certes, il vient, avec une distribution aussi prestigieuse, mais il s’ennuie et ne réagit pas.
Pourvu qu’on nous épargne un Ocean’s thirteen !
Réalisé par Ingmar Bergman
Sorti en Suède le 1er décembre 2003
Sorti en France (sur Arte) le 14 décembre 2004
Sorti en France le 15 décembre 2004
Encore un téléfilm, et encore de qualité. Le mythe de la télé qui « ne produit que des merdes » a du plomb dans l’aile. Il est vrai que ses détracteurs visent surtout la télévision française...
À 86 ans, Ingmar Bergman signe probablement son ultime film, et ne change rien à sa manière après avoir, croyait-on, abandonné le cinéma en 1982 (Fanny et Alexandre, si on ne compte pas le documentaire sur ce film, en 1986). Bergman filme des sentiments, des crises sentimentales, et se contente pour cela de montrer des gens qui parlent.
Cela dit, Éric Rohmer et Woody Allen ne procèdent pas autrement, mais eux du moins sont plus amusants. Tout au plus, un procédé nouveau : toutes les scènes du récit, lequel ne montre que cinq personnages vivants et la photo d’une morte, ne mettent en scène que deux personnes à la fois, jamais davantage. Le théâtre n’est pas loin.
On assiste donc au retour des deux personnages principaux de Scènes de la vie conjugale, avec trente ans de plus. De ce film, j’avais prétendu qu’on pouvait le résumer en une phrase : mariés, on se tape dessus, mais dès qu’on est divorcés, on s’adore. Ici, Marianne et Johan sont toujours divorcés, se sont remariés chacun de son côté, et se retrouvent pour la dernière fois. Hélas pour eux, ils ont eu des descendants, et c’est là que le bât blesse. L’histoire finit mal, et le récit charrie son poids d’amertume et de lourdes rancœurs familiales. Le spectateur n’est donc pas surpris. S’il est fan de Bergman, il sera comblé, et la critique a couvert le film de fleurs. On peut aussi le couvrir de pleurs : nul n’est obligé d’être fan de Bergman.
Réalisé par Alexandra Leclère
Sorti en Grèce le 21 novembre 2004
Sorti en France et en Belgique le 22 décembre 2004
Louise, esthéticienne au Mans, « monte » à Paris pour présenter chez l’éditeur Grasset le livre qu’elle a écrit. Sa sœur Martine l’héberge. Louise est aimable, sans apprêt, ouverte, spontanée, un peu naïve ; Martine est aigrie, jalouse, acariâtre, hautaine, donc sa frangine l’agace. Une fois posé ce principe, il faut remplir le canevas si l’on veut en faire un film. La réalisatrice et scénariste Alexandra Leclère peine à mener cette tâche à bien et invente des histoires d’adultère qui n’ont rien à voir avec son sujet. Pour ne rien arranger, une fois le happy end conclu, la méchante se repend et s’excuse auprès de la gentille...
Au passage, un sujet d’étonnement récurrent : Isabelle Huppert passe pour cultivée ; en outre, son statut de grande vedette devrait lui donner le poids nécessaire pour faire observer à une réalisatrice débutante qu’on fait dire à son personnage une grossière faute de français, « Tu te rappelles DE ça ? Il se rappelle DE ça ! ». Elle est trop timide, Isabelle Huppert ? Ou elle ne connaît pas sa langue maternelle ? C’est fou, ces « comédiens » qui piétinent leur instrument de travail...
Réalisé par Arnaud Desplechin
Sorti en Italie (Festival de Venise) le 3 septembre 2004
Sorti en France et en Belgique le 22 décembre 2004
Arnaud Desplechin n’avait, selon moi, qu’un seul bon film à son actif, La sentinelle, son troisième, qui date déjà de douze ans. On pourra enfin rajouter celui-ci, quoique légèrement moins excitant sur le plan intellectuel. Nora, jouée par Emmanuelle Devos, une actrice qui a l’air vrai – ce n’est pas courant –, travaille dans une galerie d’art, a « aimé quatre hommes et en a tué deux », résume-t-elle. Mais elle exagère un peu, puisque le premier s’est suicidé avant la naissance de son enfant, et qu’elle s’est contentée de « débrancher » son père à l’agonie, avant de découvrir qu’il la haïssait et aurait souhaité qu’elle meure à sa place ! En face d’elle, un ancien amant, Ismaël, plutôt cinglé, mais intéressant.
Deux scènes dominent le film, l’une comique, l’autre grave. La première montre l’agression ratée de trois petits voyous contre un épicier, le père d’Ismaël, qui les ratatine en moins de deux ; la seconde est la conversation d’Ismaël avec Élias, le fils de Nora qu’il a élevé mais refuse d’adopter – une vraie leçon de vie, que certains, non sans raison d’ailleurs, ont vu comme une profession de foi un peu plaquée sur l’histoire. On est très loin de la sempiternelle comédie de mœurs à la française. Dire qu’on porte aux nues les scénarios d’Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri !...
Réalisé par Jon Turteltaub
Titre original : National treasure
Sorti aux États-Unis le 8 novembre 2004
Sorti en France et en Suisse (de langue française) le 22 décembre 2004
En dépit du titre original, National treasure, les distributeurs français voulaient un titre qui évoque les aventures d’Indiana Jones, et qui mentionne le thème des Templiers, afin de profiter du succès de Da Vinci code, un roman qui triomphe dans les pays anglo-saxons. Cela mis à part, le film est agréable et distrayant. Encore une histoire de hold-up, mais pour la bonne cause : les héros volent le document original de la Déclaration d’Indépendance des États-Unis... pour empêcher les méchants de le faire. Accessoirement, ils font cela aussi parce que le plan d’un trésor est indiqué au verso, à l’encre sympathique. La morale est sauve, puisqu’ils s’enrichissent à la fin en touchant un pour cent du butin. Mais que Nicolas Cage est peu charismatique ! Ses partenaires Diane Kruger et Justin Bartha ramassent tout.
Réalisé par Luke Greenfield
Titre original : The girl next door
Sorti aux États-Unis (Texas Film Festival) le 18 février 2004
Sorti en France le 29 décembre 2004
Commence assez bien, mais tourne très vite en eau de boudin : un trio de lycéens doit tourner en catastrophe un film porno, afin de gagner 25 000 dollars destinés à faire venir un petit génie cambodgien aux États-Unis. Une scène trahit le conformisme du propos, lorsque l’un des trois doit faire un discours en public à la fête de fin d’études ; il a pris de l’ecstazy, et l’on s’attend à une tirade explosive ; mais non, il se dégrise subitement et sort une logorrhée sur la « fibre morale » ! Évidemment, tout le monde applaudit. Aucune scène ne tient debout.
Réalisé par Takashi Shimizu
Sorti aux États-Unis et à Singapour le 22 octobre 2004
Sorti en France le 29 décembre 2004
Quel dommage que ce film soit sorti le 29 décembre ! Une semaine plus tard, et on tenait dès le 5 janvier le film le plus con de l’année 2005... Il renouvelle l’éternelle question de l’œuf et de la poule : est-ce que la daube sert à faire de la bouse, ou l’inverse ? Inutile de refaire la critique écrite naguère pour Apparences, car le système est le même, en plus accentué, plus caricatural, et beaucoup moins rigolo. Toutes les intrusions brusques, dans le cadre de l’écran, d’un élément étranger censé faire peur, sont ponctuées d’un choc violent sur la bande sonore. Comme, ici, cela se produit toutes les trois minutes, c’est très vite prévisible, et on s’ennuie. L’absence de scénario n’arrange rien.
Sites associés : Yves-André Samère a son bloc-notes films racontés
Dernière mise à jour de cette page le jeudi 1er janvier 1970.