Œuvres citées : Délivrance – Deliverance – Big fish – Pelo malo
Personnes citées : John Boorman – James Dickey –
De John Boorman, en 1972. Scénario de James Dickey, d’après son roman, dialogues du réalisateur. Durée, 1 heure et 50 minutes. Couleurs (Technicolor), format 2,35:1. Sorti aux États-Unis le 30 juillet 1972, en France le 20 septembre 1972.
Chacun connaît l’histoire de ce célèbre film : quatre amis décident de descendre en canoé la rivière Cahulawassee, en Géorgie du Nord, avant qu’elle disparaisse, car on y contruit un barrage destiné à alimenter en électricité la ville d’Atlanta. Cela se passera très mal : l’un sera violé par un bouseux du coin, l’autre, qui refusait qu’on cache à la police cet évènement et la mort du coupable (exécuté d’une flèche !), va mourir d’un accident causé par les rapides, le troisième se cassera une jambe et sera sans doute amputé, et le dernier, poursuivi par un second bouseux qui veut leur peau, se blessera lui-même avec une des flèches qu’ils ont emportées, avant de tuer ledit bouseux – alors que, quelques heures plus tôt, il n’osait tuer une biche ; mais à présent, il n’hésite plus à immerger le cadavre après l’avoir lesté d’une grosse pierre.
Le retour en zone habitée sera presque aussi pénible que les suites de cette expédition : personne ne croit à leur version, car le canoé de leur copain mort a été retrouvé en amont de l’endroit où ils prétendent que cet homme a perdu la vie. Mais, faute de preuves, on les laisse repartir, traînant leurs souvenirs et le remords de leurs actes.
Le film est réalisé de main de maître, ce qui n’étonne pas de Boorman, vieux routier du cinéma – quand bien même il a raté quelques-uns de ses films.
Mais la scène la plus connue se situe au début du film, lorsque les quatre aventuriers d’occasion se sont arrêtés à une station-service. L’un d’eux, guitariste, commence à jouer un air connu – voir plus loin –, et un jeune garçon rejoue le même air au banjo. Bientôt, tous deux rivalisent de virtuosité, sans jamais prononcer une parole, car le garçon, visiblement déficient mental, ne prononcera jamais un mot, et il refusera de lui serrer la main après cela. Vous pouvez voir cette scène ci-dessousU, et regretter que Boorman ait tenu à faire dire un dialogue aux autres personnages durant le numéro musical, car cela parasite ce qu’on aurait préféré entendre :
Le morceau s’intitule Dueling banjos, et vous pouvez trouver ICI la tablature permettant de le jouer. Quant au personnage du jeune garçon, jamais nommé, il est censé s’appeler Lonnie, et il est joué par Billy Redden, né en 1956 et qui avait donc seize ans. Il a été payé cinq cents dollars pour sa participation, il était de Rabun County, en Georgie, c’était son premier film, et il en a fait trois autres, en 1984, en 2003 et en 2009, celui de 2003 étant Big fish, de Tim Burton, qui l’avait redécouvert, allors qu’il était employé comme homme de peine et laveur de vaisselle au Cookie Jar Cafe de Clayton, toujours en Géorgie. Comme dans Délivrance, il ne faisait dans ses films que jouer du banjo. Son physique, très maigre, et sa physionomie, très particulière, aux yeux à demi-fermés, ont fait qu’il a servi à fabriquer un poster de propagande sur la consanguinité et la déficience mentale ! Il n’était pourtant pas arriéré, comme en témoigne son avis sur Tim Burton : « C’était un type vraiment sympathique, beaucoup plus que Burt Reynolds » (Reynolds était l’un des quatre aventuriers de Délivrance) !
De Mariana Rondón, en 2013. Scénario de la réalisatrice. Durée, 1 heure et 33 minutes. Couleurs. Format non spécifié. Sorti au Canada (Festival de Toronto) le 7 septembre 2013, en France le 2 avril 2014.
Un film tout simple, une petite histoire de famille apparemment insignifiante : Junior, garçon de neuf ans qui vit avec sa mère célibataire (elle est vigile, profession masculine) et voit souvent sa grand-mère, ne rêve que de participer à un concours de chant, et de... lisser sa chevelure, abondante et frisée, qui lui vaut quelques moqueries de ses camarades, tous ayant la tête rasée. Pour aplatir ses cheveux, il utilise les procédés les plus extravagants, allant jusqu’à les enduire de mayonnaise ! Il faut dire que nous sommes au Venezuela, où les cheveux plats représentent un idéal de beauté.
Mais sa mère s’inquiète : n’aurait-elle pas un fils homosexuel ? Pourtant, Junior a refusé le costume de scène que la grand-mère lui a confectionné, car il estime que cette défroque ressemble trop à une robe.
Face à l’obstination de sa mère, qui veut à tout prix le normaliser, Junior finira par se raser la tête, et abandonnera toute idée de chant : la dernière scène le montre au sein d’une chorale d’écoliers, et il est le seul à ne pas chanter...
Le film en dit beaucoup sur les idées qui ont cours dans ce pays, et sur les obsessions des mères, qui ne peuvent accepter que leurs enfants ne se conforment pas aux usages.
Sites associés : Yves-André Samère a son bloc-notes films racontés
Dernière mise à jour de cette page le jeudi 1er janvier 1970.