Œuvres citées : La kermesse héroïque – L’auberge rouge – Les tontons farceurs – The family jewels
Personnes citées : Jacques Feyder – Charles Spaak – Bernard Zimmer – Robert A. Stemmle – Lazare Meerson – Alexandre Trauner – Georges Wakhévitch – Marcel Carné – Louis Jouvet – Michel Simon – Claude Autant-Lara – Jean Aurenche – Pierre Bost – Honoré de Balzac – Bertrand Tavernier – Fernandel – Françoise Rosay – Julien Carette – René Cloërec – Yves Montand – Jerry Lewis – Bill Richmond – Anne Baxte
De Jacques Feyder, en 1935. Scénario du réalisateur, de Charles Spaak, Bernard Zimmer et Robert A. Stemmle (absent du générique). Durée, 1 heure et 50 minutes. Noir et blanc, format 1,37/1. Sorti en France le 3 décembre 1935.
Au XVIe siècle, en Flandre sous la domination espagnole, le village de Boom va recevoir la visite d’un régiment de l’occupant. Tous lâches, les hommes se terrent, le bourgmestre feint d’être mort, et c’est sa femme qui fait les honneurs aux intrus, bien secondée par toutes les femmes du village, qui ont vite fait de constater que leurs ennemis sont beaucoup plus séduisants et mieux élevés que leurs propres maris ! Au matin suivant, le régiment espagnol quitte le village, laissant une exemption d’impôts pour un an après un accueil aussi chaleureux, où bien des maris laissèrent leur honneur.
Comme souvent, il s’est trouvé des critiques pour tout politiser en prétendant que ce film faisait l’éloge de la Collaboration. Il aurait fallu être extra-lucide pour s’y risquer en 1935 ! En fait, c’est un film qui tend à ridiculiser la domination des mâles, et qui le fait très bien. Cela dit, le film est un peu en deçà de ce qu’on pourrait attendre : un bon film, certainement pas un chef-d’œuvre. On retient les excellents décors de Lazare Meerson, Alexandre Trauner et Georges Wakhévitch. Mais que les costumes masculins étaient laids !
À noter, d’une part, que Marcel Carné est assistant technique sur le film, et, d’autre part, que Louis Jouvet, dans un rôle de chapelain papelard et hypocrite, annonce le rôle de l’évêque de Bedford qu’il jouera deux ans plus tard dans Drôle de drame, du même Marcel Carné – ce qu’il détestera de faire, à cause de son partenaire Michel Simon qu’il détestait (c’était réciproque), et de l’obligation de porter un kilt !
De Claude Autant-Lara, en 1951. Scénario du réalisateur, de Jean Aurenche et de Pierre Bost. Durée, 1 heure et 38 minutes. Noir et blanc, format 1,37/1. Sorti en France le 19 ctobre 1951.
La légende prétend que le film a été adapté d’un texte d’Honoré de Balzac, et le site Internet Movie Database, souvent mieux inspiré, entretient cette légende en mentionnant Balzac parmi les auteurs, quoique non mentionné au générique. Or, s’il existe bien un roman de Balzac portant ce titre, il n’a rien à voir avec l’histoire que conte le film, celle, très médiatisée à l’époque, de l’auberge de Peyrebeille, en Ardèche ; et les éditions Gallimard ont entretenu la confusion en rééditant ce roman en 2007, doté en couverture d’une reproduction de l’affiche du film de 2007 !
En réalité, Bertrand Tavernier, qui connaît bien le cinéma, affirme qu’il s’agit d’une escroquerie, que ce prétexte balzacien avait été inventé pour convaincre le producteur de financer le film de 1951, et que tout vient d’une histoire écrite par Jean Aurenche, originaire de la région, en Ardèche, où un couple d’aubergistes assassinait les voyageurs pour les détrousser. Dans le film, leur domestique noir est complice, ainsi que leur fille de 17 ans, qui sait tout mais ne participe pas. Mais un moine, joué par Fernandel, va tout apprendre, et faire le maximum, non seulement pour éviter un sort fatal aux passagers de la diligence qui est arrivée le même soir que lui, mais aussi pour faire découvrir aux gendarmes le dernier crime en date... sans trahir le secret de la confession que l’aubergiste, jouée par Françoise Rosay, lui a faite, car elle a de la religion, au contraire de son mari, un affreux, interprété par le cher Julien Carette – lequel, pour une fois, tient un grand rôle dans un film.
Au-delà de l’anecdote, le souci visible des auteurs est de faire acte d’anticléricalisme, aussi s’en donnent-ils à cœur joie. Et c’est un exploit d’avoir pu faire participer Fernandel à cette aventure, comme on dit à la télévision, alors que son public habituel était plutôt familial, attaché aux valeurs de la religion, et que lui-même était franchement de ce bord. Il semble aussi que le producteur, catholique à tout crin, ait coupé les vivres à l’équipe de tournage quand il prit conscience de ce qu’il était en train de financer, si bien qu’une séquence, non encore tournée, ne fut jamais réalisée.
Le film, excellent, dépasse de très loin le pitoyable remake fabriqué l’année dernière. On ne peut guère critiquer que la musique de René Cloërec, laquelle, peu inventive et plutôt répétitive, a été plaquée de façon mécanique sur certaines séquences, avec lesquelles elle n’a aucun rapport. C’est aussi le cas de la chanson d’introduction et de conclusion, chantée par Yves Montand, et qu’on se permettra de trouver interminable.
De Jerry Lewis, en 1965. Titre original : The family jewels, c’est-à-dire « Les bijoux de famille ». Scénario du réalisateur et de Bill Richmond. Durée, 1 heure et 39 minutes. Couleurs (Technicolor), format 1,85/1. Sorti aux États-Unis le 1er juillet 1965, en France le 24 novembre de la même année.
Une petite fille de neuf ans, riche héritière et dont le père vient de mourir, doit choisir un père adoptif parmi ses six oncles, tous joués par Jerry Lewis, et dont aucun ne lui convient. Elle choisit alors Willard, son chauffeur, également interprété par Jerry. C’est donc la perspective de jouer sept personnages qui a inspiré l’auteur-réalisateur. Mais il faut avouer que le résultat n’est pas fameux, et seules quelques scènes permettent d’échapper à l’ennui et rappellent la virtuosité et la précision de Jerry Lewis. Le générique donne d’ailleurs l’occasion de vérifier que l’équipe habituelle de Jerry a changé. C’est peut-être un début d’explication à l’échec du film, qui n’a plus d’intérêt qu’historique.
Une curiosité : Anne Baxter, que le générique ne cite pas, joue dans le film qui est projeté à bord de l’avion. C’est l’un des rares gags originaux typiquement lewisiens, car les secousses dues aux turbulences qui affectent l’avion se répercutent sur le film qui est montré aux passagers. Remarque annexe, à l’époque, les génériques de fin n’étaient pas encore frappés d’obésité, puisqu’on pouvait y omettre la participation d’une vedette de cette importance. De nos jours, on cite jusqu’au nom du chauffeur de l’acteur principal !
Sites associés : Yves-André Samère a son bloc-notes films racontés
Dernière mise à jour de cette page le jeudi 1er janvier 1970.