Œuvres citées (en italiques, autres que des films) : Vive la bombe ! – Ressources humaines – Gerboise bleue – The sixth sense – The happening – Phénomènes – Chasse à l’homme – Man hunt – Qu’elle était verte ma vallée – La strada – Les nuits de Cabiria – La dolce vita – Casanova – La voce della Luna – Satyricon – Satiricon
Personnes citées : Jean-Pierre Sinapi – Daniel Tonachella – Quentin Raspail – Pierre Messmer – Gaston Palewski – Cyril Descours – Manoj Shyamalan – Haley Joel Osment – Bruce Willis – Fritz Lang – Dudley Nichols – Geoffrey Household – Adolf Hitler – Walter Pidgeon – George Sanders – Roddy McDowall – Arthur Miller – Marilyn Monroe – Federico Fellini – Tullio Pinelli – Ennio Flaiano – Anthony Quinn – Giulietta Masina – Nino Rota
De Jean-Pierre Sinapi, en 2006. Scénario de Daniel Tonachella et Jean-Pierre Sinapi, d’après une idée de Quentin Raspail. Durée, 1 heure et 30 minutes. Couleurs, format 16/9, car il s’agit d’un téléfilm. Sorti en France, au festival du film de télévision de Saint-Tropez, en septembre 2006. Diffusé sur France 2 le 16 mars 2007 sur Arte, puis le 28 avril 2009 sur France 2, et encore sur Arte ce 10 février.
Le sujet traite, sous une forme romancée, des irradiés de l’armée française, victimes des expériences de la France au Sahara en 1962 : notre pays avait fait pression sur les émissaires du FLN, pendant les négociations menant au cessez-le-feu, afin que lui soit louée une partie du territoire saharien, une zone circulaire de mille kilomètres de rayon autour de Reggane, pour y poursuivre ses expérimentations sur la bombe atomique, commencées le 13 février 1960, donc avant l’indépendance – bombe qui devait lui assurer une place au rang des pays possédant cette arme : États-Unis, U.R.S.S. et Royaume-Uni. Ce que tout le monde appelait alors « la bombinette » chère à De Gaulle.
Le téléfilm, tourné au Maroc, est extrêmement bien conçu et réalisé par un metteur en scène de qualité. Beaucoup de détails sont authentiques. Par exemple, les quatre soldats envoyés par leurs chefs pour inciter les populations sahariennes à se mettre à l’abri se sont retrouvés dans l’impossibilité de communiquer par radio avec leur base pour demander quoi faire juste après l’explosion, parce que les câbles reliant les téléphones de la base à l’émetteur avaient été coupés... pour pouvoir refermer les fenêtres et se protéger des retombées : ce détail a été certifié par des soldats ayant vécu cette horreur !
Le personnage le plus intéressant est celui du jeune lieutenant, très « service-service » au début, et qui, victime avec ses hommes d’une contamination par une explosion souterraine qui n’avait pas eu le bon esprit de rester confinée sous terre (encore un fait authentique, deux ministres ont même été contaminés, Pierre Messmer et Gaston Palewski), en venait à estimer que l’armée les avait trahis. En ce sens, il suit le même parcours mental que le jeune stagiaire de Ressources humaines, tout acquis au patronnat au début de l’histoire, et qui passait peu à peu dans le camp opposé, celui des ouvriers et des syndicats. Il fallait pour ce rôle un jeune acteur exceptionnel, et Cyril Descours l’était en effet.
La fin montre que les contaminés n’ont pas pu être complètement soignés, et que le mal va les gagner peu à peu. Comme il fallait s’y attendre, ce type d’accident n’a jamais été reconnu officiellement, ni les victimes indemnisées. Nous avons appris cette semaine seulement que les populations irradiées en Polynésie vont commencer à être indemnisées ; leur calvaire avait commencé le... 7 novembre 1961 ! Voir la notule sur le film Gerboise bleue, tourné avant Vive la bombe !
Profitons de l’occasion pour enfoncer le clou : Arte se confirme comme une chaîne de merde, ce que je répète chaque fois qu’elle en fournit le prétexte. Elle se permet de laisser son logo sur l’image tout au long du film, et elle pollue le générique de fin par des bandeaux publicitaires sur ses prochains programmes et par des annonces sonores dont on se passerait bien de la part d’une chaîne qui se prétend « culturelle » ! Dans la mesure où aucun impératif technique n’empêcherait d’attendre la fin du film pour envoyer ces messages, le téléspectateur est bien obligé de penser que la chaîne est dirigée par des marchands de soupe, qui emploient exactement les mêmes procédés que TF1 ou M6.
De Manoj Shyamalan, en 1999. Titre original : The sixth sense. Scénario du réalisateur. Durée, 1 heure et 47 minutes. Couleurs (Technicolor), format 1,85/1. Sorti aux États-Unis le 2 août 1999, en France le 5 janvier 2000.
C’est le troisième film du petit Shyamalan, qui avait débuté en 1992, mais le premier qui a eu du succès, et quel succès ! Pourtant, le public s’est focalisé sur le scénario, dont il ne voyait pas les déficiences, au lieu de louer la mise en scène, qui n’est pas si mauvaise : ce réalisateur est plutôt bon lorsqu’il s’agit d’installer une atmosphère trouble. En revanche, il s’obstine à écrire ses scénarios, entreprise pour laquelle il n’est pas doué. Je n’avais pas du tout marché à son histoire de psychiatre qui n’a qu’un seul patient, un enfant joué par une tête à claques, Haley Joel Osment, un peu tombé dans l’oubli aujourd’hui (il va sur ses vingt-deux ans et fait principalement de la télévision et surtout du doublage de voix), mais a remporté deux prix pour ce film, car il y traînait d’un bout à l’autre une figure lugubre et ruisselante de larmes, et ne parlait que d’une voix étouffée, ce qui vous rend infailliblement oscarisable.
Parlons donc du scénario : un psy renommé de Philadelphie est agressé par un ancien et jeune patient qu’il a « laissé tomber », aux dires du patient ; lequel lui tire une balle dans le ventre pour se venger – petit accident dont on ne se remet pas. À la scène suivante, quelques mois plus tard, notre psy est frais comme une rose, et on le voit poursuivant une cure auprès d’un nouveau patient, un jeune enfant, Cole. Mais ce traitement est assez bizarre : jamais le praticien ne rencontre son malade dans son cabinet, il le voit dans une église, dans un bus, dans le cabinet d’un autre médecin, chez l’enfant et jusque dans sa chambre, et dans les coulisses d’un théâtre. Et il fallait être un spectateur bien naïf pour ne pas comprendre que le psy, en fait, était un fantôme, puisque, à la quarante-cinquième minute, l’enfant lui déclare que lui-même « voit des morts », lesquels « ne savent pas qu’ils sont morts ». Mais il faudra une heure de plus à Bruce Willis pour comprendre qu’il s’agissait de lui ! Que voulez-vous, c'est Bruce Willis... Lorsqu’il comprend, il admet enfin sa mort et se félicite d’avoir « aidé quelqu’un », quoique on voit mal en quoi il a aidé l’enfant à sortir de sa psychose.
Après ce film, Shyamalan est tombé de Charybde en Scylla, et ses histoires, toutes fondées sur le surnaturel, sont devenues de plus en plus tarabiscotées, au point qu’il a perdu tout crédit auprès de la critique et surtout du public, qui ne se bouscule plus à la sortie de ses films. Le dernier, The happening (en France, Phénomènes), a fait un bide qui semble mérité. Aujourd’hui, Sixième sens fait figure de curiosité archéologique.
De Fritz Lang, en 1941. Titre original : Man hunt. Scénario de Dudley Nichols, d’après un roman de Geoffrey Household. Durée, 1 heure et 45 minutes. Noir et blanc, format 1,37/1. Sorti aux États-Unis le 13 juin 1941, en France le 15 juin 1949.
Lang avait quitté l’Allemagne au début du nazisme, après avoir refusé de diriger les studios de l’UFA que les nazis lui proposaient, compte tenu de sa célébrité. Il ne fut pas le seul à émigrer, et l’Allemagne nazie a ainsi fait cadeau à ses ennemis de la plupart de ses artistes. Le film ici traité est donc un film de propagande anti-nazi. Malheureusement, j’ai le regret de dire que l’histoire n’a pas une once de crédibilité : après un prologue près de Berchtesgaden, le reste de l’histoire se déroule presque entièrement à Londres, qui semble peuplée de nazis ou de sympathisants d’Hitler. Passe encore, mais le scénario s’emberlificote dans une histoire d’amour du héros, en aventureux fils de famille, avec une fille du peuple, histoire annexe dont on se fiche éperdument et qui alourdit le récit. La fin est rocambolesque : le héros, joué par Walter Pidgeon, a été muré par le méchant nazi, joué par George Sanders, lequel exige pour le libérer (du moins le promet-il, sans aucun intention de tenir sa promesse) que son adversaire signe un document par lequel il se reconnaît comme un terroriste ayant tenté de tuer Hitler. Mais celui-ci a fabriqué un arc et une flèche – avec l’ornement d’un chapeau de sa dulcinée, que le méchant lui a fait passer pour lui prouver qu’elle est bien morte !), et le tue par une lucarne improvisée.
On ne se réveille un peu que grâce au personnage d’un jeune enfant, mousse sur un bateau de la marine marchande, et qui est joué par Roddy McDowall, bon acteur alors âgé de 13 ans (à son actif, 252 films et téléfilms), et qui retrouvera Walter Pidgeon la même année dans Qu’elle était verte ma vallée.
Reconnaisssons que la photographie, signée d’un certain Arthur Miller qui n’avait rien à voir avec le dernier mari de Marilyn Monroe, est excellente.
De Federico Fellini, en 1954. Scénario de Federico Fellini, Tullio Pinelli et Ennio Flaiano. Durée, 1 heure et 48 minutes. Noir et blanc, format 1,37/1. Sorti en Italie le 6 septembre 1954, en France le 11 mars 1955.
C’est manifestement un mélo : une jeune femme innocente est achetée à sa mère par un bateleur de foire, brutal et inculte, interprété par Anthony Quinn, très sobre et jouant juste. Elle va s’attacher à lui, mais elle finit par le quitter car il ne la ménage pas. Cinq ans après, on apprend qu’elle est morte, et la brute est écrasée de chagrin. Il est juste de dire qu’on croit peu à ce revirement, mais il fallait bien une fin...
C’est le cinquième film de Fellini, qui avait débuté en 1950, et celui qui l’a rendu célèbre. Mais je me permets de préférer Les nuits de Cabiria, qu’il tourna trois ans plus tard, toujours avec sa femme Giulietta Masina dans le rôle principal. Il faut dire que les films qu’elle a tournés sans lui n’ont guère eu de succès : madame Masina était une effroyable cabotine, surjouant tout, et jouant à contretemps.
La photo est assez belle, et la musique, de l’illustre Nino Rota, est connue de tout le monde.
Jusque là, Fellini avait du talent. À partir de 1960 et de La dolce vita, on cria au génie, et Fellini agit donc en génie : il oublia le public, ne fit plus de films DE Fellini mais des films POUR Fellini, et inclut à quatre reprises son nom dans les titres ! Il en résulta quelques mauvais films, comme son Casanova, ou son dernier, en 1990, La voce delle Luna – le pire étant probablement Satyricon, au titre racoleur (le roman dont il est tiré est Satiricon, ce n’est pas une histoire de satyres, mais une satire !) : Fellini était en effet incapable de comprendre le thème de l’histoire, qui était l’amour homosexuel ; il se contenta donc de filmer, comme toujours, des décors extravagants et ses monstres de prédilection.
Sites associés : Yves-André Samère a son bloc-notes films racontés
Dernière mise à jour de cette page le jeudi 1er janvier 1970.