On trouve couramment, chez les marchands de cassettes vidéo, de ces collections généralement intitulées « Les films de ma vie », ou quelque chose de ce genre. Ce nest quun argument commercial, et les gens de cinéma célèbres qui parrainent ce type dopération se font sans doute rétribuer. Aussi, réjouissez-vous, je vous fais la même chose ici, et en fonction de ma propre notoriété, donc sans bourse délier.
Cette section traite des grands films, ceux qui font date dans lhistoire du cinéma. Lorsque vous visionnez pour la première fois lune de ces uvres, vous savez demblée quelle comptera dans votre vie de cinéphile, et que vous la reverrez maintes fois sans jamais vous lasser.
Après la suppression du Ciné-Club de France 2 par Jean-Pierre Elkabbach, qui aura ainsi trouvé une glorieuse façon de marquer son passage à la présidence de France Télévisions, ne demeure sur les chaînes hertziennes que le Cinéma de Minuit de France 3, à des heures impossibles tandis que se multiplient les chaînes sur le câble, bonheur des cinéphiles... qui peuvent payer. Il est assez triste de constater que cette évolution accompagne la quasi-totale disparition, en salle, des ciné-clubs, si bien que la connaissance de ces films par ce quon appelle, sans doute par antiphrase, le « grand public », na fait que reculer. À la place, nous avons hérité des « films-culte », dont le moins quon puisse dire, cest quils tendent à vous rendre athée ! En 1982, on ne jurait que par Le père Noël est une ordure ; en 1988, par Le grand bleu ; en 1999, par Matrix ; en 2001, par Le fabuleux destin dAmélie Poulain, et désormais, par un mensuel film de « super-héros » qui, en général, se ramasse au bout de deux semaines – comme quoi il y a une justice. Autant de productions médiocres, tout juste bonnes à impressionner les naïfs, les incultes, et ceux qui nont pas la moindre idée que de meilleurs films existent et sont visibles. On se demande avec angoisse de quoi demain sera fait ! C’est d’ailleurs la question que se sont posée en 2012 Spielberg et Lucas, qui savent un peu de quoi ils parlent...
Voici un autre choix, loin de ces médiocrités. Commençons par un éblouissant chef-duvre, souvent reprogrammé en salle et à la télévision, par bonheur. Non seulement Alfred Hitchcock fut un cinéaste populaire, au point que son image figure sur les affiches plutôt que celle de ses acteurs cas unique , mais il fut également le plus grand réalisateur de tous les temps, et ce nest pas moi qui le dit, cest Orson Welles, lui-même un grand maître du cinéma. Hitchcock est né à Londres le 13 août 1899, et décédé le 29 avril 1980, après une double carrière, anglaise puis hollywoodienne. Notons au passage quil eut ainsi le bonheur de ne pas voir les studios Universal, où il travaillait et dont il était lun des cinq plus gros actionnaires, tomber quelque temps entre les mains dun Jean-Marie Messier, très éphémère patron d’un cinéma dont il ignorait tout. Le film dont il sagit ici est Vertigo.
Ensuite, un film qualifié « lun des dix plus grands films de lhistoire du cinéma ». Cette façon de décerner des prix me fait bien rigoler en général, mais Citizen Kane semble mériter cette distinction. Si, pour ma part, je devais faire un classement des centaines de films que jaime, je le placerais sans doute parmi cette dizaine. Cest le tout premier long métrage dOrson Welles (il avait réalisé deux courts métrages avant cela, détail quon ignore en général), et son uvre majeure. Le seul, en tout cas, quil a maîtrisé du début à la fin.
Puis le grand film italien de Luchino Visconti, Le guépard, un sommet dintelligence et de beauté.
Ensuite, un film d’horreur très particulier, au style unique, L’autre, de Robert Mulligan, grand artisan.
Et le chef-duvre de Stanley Kubrick, Orange mécanique. Je sais quil est de mode aujourdhui daffirmer que le film est un peu surfait, mais ce nest pas mon avis.
Les comédies sont rarement distinguées, surtout lorsquelles font rire (non, ce nest pas un paradoxe facile), et les critiques préfèrent encenser Jacques Tati. Attention ! Je ne dis pas que Tati nétait pas un génie de linvention ; mais il navait ni le sens du rythme ni celui de la durée, les neuf dixièmes de ses gags passent inaperçus ce quil serait saugrenu de reprocher au public , et son interminable Playtime, lorsquil sortit en 1968, faisait fuir tous les spectateurs qui ne sétaient pas endormis dans les fauteuils de lEmpire, il faut tout de même avoir le courage de le rappeler. Dailleurs, le film a été inlassablement remanié, et davantage raccourci à chaque nouvelle sortie, ce qui doit bien signifier quelque chose.
Rien de cela chez Jerry Lewis, aussi magistral dans lécriture du scénario que dans la conception du gag, la rigueur de la réalisation technique, et la conscience aiguë de ce qui fait rire... non moins que de la durée cinématographique ! Son Docteur Jerry et mister Love, unanimement reconnu comme son chef-duvre, est lune des plus belles satires jamais réalisées sur l’american way of life.
Enfin, la seule comédie musicale française digne de ce nom est due à Jacques Demy. Cest aussi son meilleur film : Les demoiselles de Rochefort.
Une citation pour terminer :
« Je pense quon verra davantage de films se tourner
mais quils ne seront pas aussi bons.
Il est important de comprendre les dangers que représente le fait de faire trop de films,
et trop de films pas bons. »
Steven Spielberg, en 1986.
Sites associés : Yves-André Samère a son bloc-notes films racontés
Dernière mise à jour de cette page le jeudi 1er janvier 1970.