Kinopoivre, les films critiqués par Jean-Pierre Marquet

Année 2016

L’année 2016 est décidément très morne. Comblons le vide avec un Entracte 26 qui récapitule le bilan très mitigé des Palmes d’Or au Festival de Cannes, lequel n’est pas brillant. En prime, une critique sur le premier long métrage d’Orson Welles, Too much Johnson, un excellent film sud-coréen, Dernier train pour Busan, et le dernier film d’Asghar Faradi, Le client.

[Entracte 26]

Voici, depuis la naissance du Festival de Cannes, la liste des Palmes d’Or qui ont été décernées :

- 1939 : Pacific Express, de Cecil B. DeMille. Titre original : Union Pacific

- 1944 : María Candelaria, de Emilio Fernández

- 1945 : Le poison, de Billy Wilder. Titre original : The lost weekend

- 1945 : La terre sera rouge, de Bodil Ipsen et Lau Lauritzen Jr. Titre original : De røde enge

- 1945 : Brève rencontre, de David Lean. Titre original : Brief encounter

- 1945 : Le tournant décisif, de Fridrikh Ermler. Titre original : Velikiy perelom

- 1945 : La dernière chance, de Leopold Lindtberg. Titre original : Die letzte Chance

- 1945 : Rome, ville ouverte, de Roberto Rossellini. Titre original : Roma città aperta

- 1946 : L’épreuve, d’Alf Sjöberg.Titre original : Iris och löjtnantshjärta

- 1946 : La ville basse, de Chetan Anand. Titre original : Neecha nagar

- 1946 : La symphonie pastorale, de Jean Delannoy

- 1946 : Les Hommes sans ailes, de Frantisek Cáp. Titre original : Muzi bez krídel

- 1947 : Ziegfeld Follies, de Vincente Minnelli

- 1948 : pas de festival cette année-là

- 1949 : Le troisième homme, de Carol Reed. Titre original : The third man

- 1950 : pas de festival cette année-là

- 1951 : Mademoiselle Julie, d’Alf Sjöberg. Titre original : Fröken Julie

- 1951 : Miracle à Milan, de Vittorio De Sica. Titre original : Miracolo a Milano

- 1952 : Othello, d’Orson Welles. Titre original : The tragedy of Othello: The Moor of Venice

- 1952 : Deux sous d’espoir, de Renato Castellani. Titre original : Due soldi di speranza

- 1953 : Le salaire de la peur, d’Henri-Georges Clouzot

- 1954 : La porte de l’enfer, de Teinosuke Kinugasa. Titre original : Jigokumon

- 1955 : Marty, de Delbert Mann

- 1956 : Le monde du silence, de Jacques-Yves Cousteau et Louis Malle

- 1957 : La loi du Seigneur, de William Wyler. Titre original : Friendly persuasion

- 1958 : Quand passent les cigognes, de Mikhaïl Kalatozov. Titre original : Letjât žuravli

- 1959 : Orfeu Negro, de Marcel Camus

- 1960 : La dolce vita, de Federico Fellini

- 1961 : Une aussi longue absence, d’Henri Colpi

- 1961 : Viridiana de Luis Buñuel

- 1962 : La parole donnée, d’Anselmo Duarte. Titre original : O pagador de promessas

- 1963 : Le guépard, de Luchino Visconti. Titre original : Il gattopardo

- 1964 : Les parapluies de Cherbourg, de Jacques Demy

- 1965 : Le Knack... et comment l’avoir, de Richard Lester. Titre original : The Knack... and how to get it

- 1966 : Un homme et une femme, de Claude Lelouch

- 1966 : Ces messieurs dames, de Pietro Germi. Titre original : Signore & signori

- 1967 : Blow-up, de Michelangelo Antonioni

- 1969 : If..., de Lindsay Anderson

- 1970 : M*A*S*H, de Robert Altman

- 1971 : Le messager, de Joseph Losey. Titre original : The go-between

- 1972 : La classe ouvrière va au paradis, d’Elio Petri. Titre original : La classe operaia va in paradiso

- 1972 : L’affaire Mattei, de Francesco Rosi. Titre original : Il caso Mattei

- 1973 : La méprise, d’Alan Bridges. Titre original : The hireling

- 1974 : L’épouvantail, de Jerry Schatzberg. Titre original : Scarecrow

- 1974 : Conversation secrète, de Francis Coppola. Titre original : The conversation

- 1975 : Chronique des années de braise, de Mohammed Lakhdar-Hamina. Titre original : Waqa’i’ sanawat ed-djamr

- 1976 : Taxi driver, de Martin Scorsese

- 1977 : Padre padrone, de Paolo et Vittorio Taviani

- 1978 : L’arbre aux sabots, d’Ermanno Olmi. Titre original : L’albero degli zoccoli

- 1979 : Apocalypse now, de Francis Coppola

- 1979 : Le tambour, de Volker Schlöndorff. Titre original : Die Blechtrommel

- 1980 : Que le spectacle commence, de Bob Fosse. Titre original : All that jazz

- 1980 : Kagemusha, l’ombre du guerrier, d’Akira Kurosawa. Titre original : Kagemusha

- 1981 : L’homme de fer, d’Andrzej Wajda. Titre original : CzÅ‚owiek z żelaza

- 1982 : Missing, de Costa-Gavras

- 1982 : Yol, de Yılmaz Güney et Åžerif Gören

- 1983 : La ballade de Narayama, de ShÅhei Imamura. Titre original : Narayama bushiko

- 1984 : Paris, Texas, de Wim Wenders

- 1985 : Papa est en voyage d’affaires, d’Emir Kusturica. Titre original : Otac na službenom putu

- 1986 : Mission, de Roland Joffé. Titre original : The mission

- 1987 : Sous le soleil de Satan, de Maurice Pialat

- 1988 : Pelle le conquérant, de Bille August. Titre original : Pelle erobreren

- 1989 : Sexe, mensonges et vidéo, de Steven Soderbergh. Titre original : Sex, lies, and videotape

- 1990 : Sailor et Lula, de David Lynch. Titre original : Wild at heart

- 1991 : Barton Fink, de Joel Coen

- 1992 : Les meilleures intentions, de Bille August. Titre original : Den Goda viljan

- 1993 : Adieu ma concubine, de Chen Kaige. Titre original : Bàwáng biéjÄ«

- 1993 : La leçon de piano, de Jane Campion. Titre original : The piano

- 1994 : Pulp fiction, de Quentin Tarantino

- 1995 : Underground, d’Emir Kusturica. Titre original : Podzemlje

- 1996 : Secrets et mensonge, de Mike Leigh. Titre original : Secrets and lies

- 1997 : Le goût de la cerise, d’Abbas Kiarostami. Titre original : Ta’m-e gilÄs

- 1997 : L’anguille, de ShÅhei Imamura. Titre original : Unagi

- 1998 : L’éternité et un jour, de Theo Angelopoulos. Titre original : Mia éoniotita kai mia méra

- 1999 : Rosetta, de Luc et Jean-Pierre Dardenne

- 2000 : Dancer in the dark, de Lars von Trier

- 2001 : La chambre du fils, de Nanni Moretti. Titre original : La stanza del figlio

- 2002 : Le pianiste, de Roman Polanski. Titre original : The pianist

- 2003 : Elephant, de Gus Van Sant

- 2004 : Fahrenheit 9/11, de Michael Moore

- 2005 : L’enfant, de Luc et Jean-Pierre Dardenne

- 2006 : Le vent se lève, de Ken Loach.Titre original : The wind that shakes the barley

- 2007 : 4 mois, 3 semaines, 2 jours, de Cristian Mungiu. Titre original : 4 luni, 3 săptămâni È™i 2 zile

- 2008 : Entre les murs, de Laurent Cantet

- 2009 : Le ruban blanc, de Michael Haneke. Titre original : Das weiße Band

- 2010 : Oncle Boonmee, celui qui se souvient de ses vies antérieures, de Apichatpong Weerasethakul. Titre original : Lung Boonmee raluek chat

- 2011 : The tree of life, de Terrence Malick

- 2012 : Amour, de Michael Haneke

- 2013 : La vie d’Adèle, d’Abdellatif Kechiche

- 2014 : Winter Sleep, de Bilge Ceylan. Titre original : Kış uykusu

- 2015 : Dheepan, de Jacques Audiard

- 2016 : Moi, Daniel Blake, de Ken Loach. Titre original : I, Daniel Blake

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Too much Johnson

Réalisateur : Orson Welles

Scénario : William Gillette et Orson Welles

Interprètes : Joseph Cotten (Augustus Billings), Virginia Nicolson, alias Anna Stafford (Lenore Faddish), Edgar Barrier (Leon Dathis), Arlene Francis (Mrs Clairette Dathis), Ruth Ford (Mrs Billings), Mary Wickes (Mrs Upton Battison), Eustace Wyatt (Francis Faddish), Guy Kingsley Poynter (Henry MacIntosh), George Duthie (commissaire de bord), Orson Welles (policier), Marc Blitzstein (figurant), Herbert Drake (policier), John Houseman (duelliste / policier), Erskine Sanford (Frederick), Howard Smith (Joseph Johnson), Richard Wilson (garçonde cabine), Judy Holliday (figurante)

Directeurs de la photographie : Paul Dunbar et Harry Dunham

Décors : James Morcom

Montage : William Alland, Orson Welles et Richard Wilson

Durée : 1 heure et 6 minutes

Sorties : en Italie le 9 octobre 2013 (Giornate del Cinema Muto di Pordenone), en France le 1er décembre 2013 (Festival de Belfort), aux États-Unis le 30 août 2014 (Festival de Telluride)

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Les deux premiers « longs Â» métrages de Welles et de Kubrick ont en commun la courte durée (66 minutes), et d’être ratés. Mais celui de Welles est un film comique, alors que Kubrick se prenait au sérieux et tentait de faire un film sur la guerre, avec beaucoup moins d’acteurs.

Le scénario de Too much Johnson est dû à William Gillette, auteur et interprète de plusieurs pièces sur Sherlock Holmes, dont une écrite en collaboration avec Arthur Conan Doyle. Too much Johnson, qui n’en fait pas partie, était donc une pièce que Welles voulait adapter avec sa troupe Mercury Theater, et il avait projeté de réaliser un film en trois parties, chacune servant d’introduction pour les trois actes de la pièce, dans le style du cinéma burlesque et muet des années 1910-1920. Il comptait montrer des personnages seulement cités dans le dialogue d’origine : un homme marié et infidèle, joué par Joseph Cotten, son épouse et sa belle-mère, un mari jaloux, et une jeune femme promise par son père à un propriétaire agricole mais amoureuse d’un autre prétendant.

Ce projet fut abandonné, parce que la Paramount, qui possédait les droits de la pièce, s’y est opposée, dit-on. Mais surtout, parce que Welles manquait d’expérience (comme Kubrick) pour tourner quarante minutes en quelques semaines, et en plein New York. Welles dut par conséquent réécrire l’histoire, et déboucha sur un bide !

Plus tard, dans les années soixante, il voulut reprendre et monter le matériel tourné, pour en faire un cadeau à son ami Joseph Cotten, mais ne finit jamais le montage, la copie fut égarée, finit dans un carton qui fut donné à une association cinéphile, laquelle ne se pressa pas pour en faire expertiser le contenu, et le tout ne ressurgit qu’en... 2013 ! Les 66 minutes de pellicule ne fut jamais revues, jusqu’à ce que le film soit redécouvert dans un entrepôt à Pordenone, en Italie. Des quatre heures tournées, il ne restait que 66 minutes.

Il faut dire que la dernière partie n’est qu’un interminable poursuite, plus de la moitié du film, agrémentée d’un duel à la rapière, très au-dessous des possibilités acrobatiques montrées par les acteurs – qui ne sont pas doublés.

Le film peut être vu et téléchargé gratuitement ICI.

En bref : à voir à la rigueur.Haut de la page

Dernier train pour Busan

Réalisateur : Sang-ho Yeon

Titre original : Busanhaeng

Scénario : Sang-ho Yeon

Interprètes : Yoo Gong (Seok Woo), Soo-an Kim (Soo-an), Yu-mi Jeong (Sung Gyeong), Dong-seok Ma (Sang Hwa), Woo-sik Choi (Gook jeune), Sohee (Jin-hee), Eui-sung Kim (Yong-Suk), Gwi-hwa Choi (le clochard), Seok-yong Jeong (le commandant du train), Chang Hwan Kim (l’adjoint Kim)

Musique : Jang Young-gyu

Durée : 1 heure et 58 minutes

Sorties : en Italie le 9 octobre 2013 (Giornate del Cinema Muto di Pordenone), en France le 1er décembre 2013 (Festival de Belfort), aux États-Unis le 30 août 2014 (Festival de Telluride), en France le 17 août 2016

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En Corée du Sud, le KTX est un train rapide qui relie la capitale Séoul à la ville de Busan, ville de trois millions et demi d’habitants, premier port du pays, tout au sud, à 330 kilomètres de là, et siège d’un festival de cinéma. Et Sok-woo, bureaucrate séparé de sa femme et pas follement sympathique (il est dans la finance), emmène sa fille Soo-ahn voir sa mère. Mais, très vite, on apprend qu’un virus s’est répandu, qui transforme les personnes contaminées en morts-vivants, dont la morsure génère d’autres morts-vivants. C’est donc le thème créé par George Romero en 1968, avec La nuit des morts-vivants, mais traité sur un mode beaucoup moins gore, et presque entièrement débarrassé de ses prétentions politiques un peu bidons, il faut le reconnaître. Or, dès le départ, ces morts-vivants ont réussi à monter dans le train, donnant lieu à un huis-clos apparemment sans issue, et pas du tout parodique, comme on est souvent tenté de faire au cinéma.

En fait, presque tout le film est un huis-clos, car, à l’exception de l’épilogue, on sort très peu du train, une fois passé le prologue, qui est assez basique. Or le train est un cadre idéal, car il est impossible d’en sortir tant qu’il roule, et parce que ses couloirs étroits favorisent la promiscuité et les affrontements physiques. On pourrait dès lors penser que le récit va être répétitif, mais il n’en est rien, et le réalisateur-scénariste est assez adroit pour éviter cet écueil. Si bien que les scènes d’action, très variées, magnifiquement conçues, fonctionnent parfaitement.

Le scénario ne comporte aucun véritable héros, tous les personnages ont leur faiblesse, et les « bons Â» finissent par perdre, au point que le personnage du père, qui n’a pas pu éviter de se faire mordre, se suicide pour ne pas contaminer sa fille – laquelle sera la seule à survivre, avec une femme enceinte. À noter que, contrairement à ce qui se passe dans la plupart des films d’horreur, il n’y a aucune scène repoussante, dans le style j’éventre-un-type-et-je-lui-bouffe-ses-tripes ! Et les victimes pourchassées non plus ne tentent pas de tuer leurs agresseurs, qui sont déjà morts, et veulent surtout les fuir, ce qui est logique...

Sur ce point, l’utilisation des cascadeurs est remarquable, car leur foule est plusieurs fois traitée à l’image comme une vague qui se déverse, or l’on ne voit quasiment jamais cela dans les autres films.

Celui-ci, adapté d’un manga, est une suite, en réalité : celle de Seoul station, Å“uvre d’animation du même réalisateur, sortie sous le titre original Seoulyeok, qui n’a été projeté en France qu’au festival d’Annecy le 13 juin. Il est très différent de World war Z, qui avait néanmoins lui aussi quelques belles séquences d’action, comme cette escalade d’un très haut mur, à Jérusalem. Et il lui est supérieur par le traitement des caractères, mieux définis me semble-t-il, où l’individualisme est dénoncé, même s’il est impossible au spectateur de s’identifier aux personnages, et donc d’être ému. Et, pour une fois, on n’a pas de super-héros qui veut « sauver le monde Â», alibi classique, le personnage principal ne veut que sauver sa peau et celle de sa fille.

En bref : à voir absolument.Haut de la page

Le client

Réalisateur : Asghar Fahradi

Titre original : Forushande

Scénario : Asghar Fahradi

Interprètes : Taraneh Alidoosti (Rana), Shahab Hosseini (Emad), Mina Sadati (Sanam), Babak Karimi (Babak), Maral Bani Adam (Kati), Farid Sajjadi Hosseini (l’homme), Mehdi Koushki (Siavash), Shirin Aghakashi (Esmat), Emad Emami (Ali), Sam Valipour (Sadra), Sahra Asadollahe (Mojgan), Ehteram Boroumand (Madame Shahnazari), Mojtaba Pirzadeh (Majid)

Musique : Sattar Oraki

Directeur de la photographie : Hossein Jafarian

Montage : Hayedeh Safiyari

Décors : Keyvan Moghaddam

Durée : 2 heures et 17 minutes

Sorties : en France (Festival de Cannes) le 21 mai 2016, puis le 9 novembre 2016

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Ce dernier film de Fahradi aura moins de succès que ceux qui l’ont précédé, malgré deux récompenses au dernier festival de Cannes : le prix du scénario pour son auteur, et le prix d’interprétation pour son interprète masculin Shahab Hosseini – l’interprète féminine Taraneh Alidoosti l’aurait mérité tout autant, à mon avis. Pour ce qui est du scénario, il est moins ramifié, plus simple, que ceux des films précédents, sa principale originalité étant que, pour la première fois, le personnage masculin principal fait preuve d’un certain goût pour la vengeance, alors que la marque des films de Farhadi est que personne n’y est jamais vraiment coupable, même si beaucoup mentent, contraints par les circonstances.

Bref, un couple de comédiens de Téhéran, le mari étant aussi professeur de lycée, doit déménager parce que leur immeuble menace ruine, et va s’installer dans un autre appartement qui vient de se libérer, et dont la locataire est partie, on ne saura jamais pourquoi. Or Emad et sa femme Rana ignorent que cette femme se prostituait, et l’inattendu va se produire : un nouveau client de la demoiselle se présente pour « consommer », et tombe sur Rana prenant sa douche, car, ne sachant encore se servir de l’interphone,  elle lui a ouvert lorsqu’il a sonné, sans lui demander son nom !

Cris, évanouissement de la femme, fuite du visiteur qui se blesse le pied en partant, blessure qui va permettre ultérieurement de le confondre. Et fureur du mari lorsqu’il apprend l’épisode, si bien que, dès lors, il va tout faire pour retrouver le prétendu agresseur et menacer de révéler sa conduite à sa famille. Or c’est sa femme qui va le détourner de sa vengeance.

On le voit, l’histoire est simple, quoique racontée lentement, et révèle surtout les divers caractères des personnages, comme toujours chez Farhadi. Et la description des milieux théâtral et social est particulièrement minutieuse. Mais, comme de plus en plus souvent, les critiques français estiment que Farhadi creuse trop souvent le même sillon. Ils auraient sans doute pensé que Marcel Carné explorait trop souvent le thème du destin, et que Renoir était trop occupé de questions sociales.

 

*

Le film est sorti en Iran le 31 août. Le public, en raison du thème central, le viol et l’agression d’une femme mariée, et les élites non religieuses du pays, lui ont fait un succès, si bien que le million de spectateurs a été atteint à Téhéran deux mois plus tard. Mais il a été également beaucoup critiqué, parce que, selon certains politiques au pouvoir, il donne du pays « une mauvaise image » : à l’étranger, l’Iran doit apparaître comme un pays où tout va bien. Chanson bien connue, on a entonné le même refrain au Maroc l’année dernière ! Or ce film doit représenter l’Iran aux prochains Oscars...

Il faut dire que le personnage incarné par Shahab Hosseini est un homme cultivé qui, cédant à la crainte du qu’en-dira-t-on et à la pression des traditions, se laisse tenter par la violence et la vengeance, et ce détail fait tache. D’autant plus que la pièce qu’il joue sur scène, Mort d’un commis voyageur, est plutôt censée mettre en lumière la compassion. Si bien que les médias de gauche, en Iran, craignent qu’on voit en Emad l’Iranien type. Tandis que les médias de droite se méfient surtour des festivals internationaux : voire l’interdiction faite à Jafar Pahani de se rendre à l’étranger...

En bref : à voir absolument.Haut de la page

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Dernière mise à jour de cette page le jeudi 1er janvier 1970.